UN « BON » COURS EX CATHEDRA ?
QUELQUES PISTES DE RÉFLEXION…
— Martine FALLA, Randy FREDERIC, Julien FURNEMONT BAUDOIN, Christophe GENETTE, Charlotte MAGAIN, Clara VILLERS —
Paradoxalement, le cours ex cathe-
dra aurait la nature du dialogue
sans en avoir
la forme extérieure…
(Schleiermacher, 1808, cité par Ferry, Pesron &
Renaut, 1979, cités par Lejeune, 2014)
Ce débat, ouvert il y a près de deux
cents ans, a traversé les Âges et reste-
rait toujours d’actualité…
En effet, à l’ère des pédagogies actives
où l’on préconise de placer l’étudiant
au centre de ses apprentissages et de
favoriser son activité, le cours ex cathe-
dra ferait mine de « mauvais élève », par-
fois jugé inefficace ou d’un autre temps,
comme l’indique un enseignant de
Haute École interrogé dans le cadre de
ce mémo (Enseignant, 2018). Ses dé-
tracteurs ne manquent pas d’argu-
ments pour en pointer les faiblesses.
Dans un contexte de massification et
d’hétérogénéité du public étudiant,
mais aussi de contraintes budgétaires
(Daele & Sylvestre, 2011), le cours ma-
gistral resterait une méthode très ré-
pandue dans l’enseignement supérieur
(Daele & Berthiaume, 2010). Son utili-
sation soulèverait certaines questions
chez les enseignants : quelle(s) straté-
gie(s) choisir pour que les étudiants ap-
prennent « mieux » ? Dans quel(s) cas
recourir à un exposé magistral ? Com-
ment rendre le mode ex cathedra plus
dynamique et plus interactif, au service
des apprentissages ?
UN COURS EX CATHEDRA, KE-
ZAKO ?
Locution latine, ex cathedra signifie éty-
mologiquement « du haut de la Chaire
(de Saint-Pierre) » (Centre National de
Ressources Textuelles et Lexicales,
n.d.). Autrefois employée dans un con-
texte uniquement religieux, elle est
progressivement entrée dans le do-
maine de l’Éducation.
En pédagogie, le cours ex cathedra est
défini comme étant un « mode d’ensei-
gnement » dans lequel un professeur
expose son savoir devant un auditoire
[…] » (Bruter, 2008, p. 5). La communi-
cation y est réalisée par l’enseignant-
expert et vise à transmettre des « élé-
ments de formation (théories ou con-
cepts) en vue d’un apprentissage » (De
Roth, 2003, p. 7), et ce, en un minimum
de temps, comme le souligne le Profes-
seur José-Luis Wolfs (ULB).
De plus, cette communication peut être
qualifiée de transmission car elle « se
fait la plupart du temps […] sans
échanges véritables avec les étudiants
[…] » (Altet, 1994, p. 37). Cela peut no-
tamment s’expliquer par le fait que l’in-
teraction entre l’enseignant et les étu-
diants est à la fois asymétrique (Par-
pette, 2002, cité par Houart, 2009) et
hiérarchique (Papi & Glikman, 2015).
Asymétrique, car l’enseignant y est ac-
tif, expert dans les savoirs qu’il trans-
met, et l’étudiant plutôt passif ; « hié-
rarchique » par la relation d’autorité
entre l’enseignant (qui possède cette
autorité) et l’étudiant (qui doit, en
quelque sorte, s’y « soumettre »).
Enfin, retenons qu’un cours ex cathedra
est caractérisé par « une série d’instru-
ments qui en transforment la fonction
et les formes […] » (Loizon & Mayen,
2015, p. 1) avec, par exemple, l’intégra-
tion d’outils numériques.
Les composantes d’une telle définition
permettent de comprendre en quoi le
mode ex cathedra a parfois « mauvaise
presse » car allant à l’encontre des évo-
lutions pédagogiques qui placent l’ap-
prenant au centre du processus d’en-
(Daele &
seignement/apprentissage
Berthiaume, 2010) et non l’enseignant
en tant que « dispensateur de savoirs ».
ET LES ETUDIANTS DANS
TOUT ÇA ?
Interrogés sur le sujet, des étudiants
nous livrent en quelques mots-clés leur
perception du cours ex cathedra :
Nuage de mots reprenant les termes utilisés par 36
étudiants pour qualifier un cours ex cathedra (sondage
effectué via un réseau social, octobre 2018)
On retrouve ici de nombreux éléments
caractérisant les avantages et inconvé-
nients présents dans la littérature (cf.
« Des forces et des faiblesses » en page
2).
UN INTERET A NE PAS NEGLIGER
Différents auteurs (Clerc, Honoré, Kauf-
mann, Roduit, & Zosso, 2011 ; Sander-
Regier, Abou Merry, & McColl, 2007)
ont permis de mettre en évidence des
contextes dans lesquels le recours au
mode ex cathedra peut s’avérer parti-
culièrement indiqué :
§ pour de la diffusion rapide d’informations
à un public conséquent ;
§ pour la présentation de notions nouvelles
avant une activité ;
§ pour une vision générale sur un sujet, pour
une activation de l’intérêt ;
§ pour la présentation de principes théo-
riques et de termes de base ;
§ pour l’enseignement d’informations ob-
servables et réelles ;
§ pour une évaluation dite traditionnelle.
UNE ENTREE A QUATRE VOIES
Intéressons-nous
à
quelques pistes qui permettraient d’as-
maintenant
Des forces, et des faiblesses…
Le cours ex cathedra permettrait de/d’ :
ments) (Sander-Regier et al., 2007)
u rassembler des informations émanant de diverses sources, de modifier rapidement la matière (ajouts, suppressions ou ajuste-
u expliquer ou répéter directement des contenus plus complexes (Sander-Regier et al., 2007),
u utiliser un panel d’effets de voix, d’expressions, de traits d’humour… pour rendre le cours moins monotone (Sander-Regier et al.,
2007),
u faire face à un manque de moyens ou un nombre trop conséquent d’étudiants (Daele & Sylvestre, 2011),
u communiquer, en tant qu’expert, son savoir (Daele & Berthiaume, 2010),
u transmettre un large contenu dans un temps limité (Wolfs, 2018),
u se trouver dans une méthode familière et sécurisante (Enseignant, 2018).
Il présenterait toutefois les inconvénients suivants :
u attitude essentiellement passive des étudiants (Romainville, 2004 ; Ménard & St-Pierre, 2014 ; Daele & Sylvestre, 2013),
u apprentissage en surface (Daele & Sylvestre, 2013),
u tâches intellectuelles attribuées à l’enseignant seul (Ménard & St-Pierre, 2014),
u pas/peu d’informations quant à la compréhension et au niveau de rétention de la matière par les étudiants (Ménard &
St-Pierre, 2014),
u mode auditif comme principal canal (Ménard & St-Pierre, 2014),
u lassitude et manque d’assiduité au cours (Mann, Robinson & Moore, cités par Desbiens, Kozanitis & Lanoue, 2015),
u attention décroissante (Burke & Ray, cités par Desbiens et al., 2015),
u compréhension et mémorisation limitées des contenus (Denman, Short & Martin, cités par Desbiens et al, 2015).
surer un « bon » enseignement ex ca-
thedra. Celles-ci vous seront présen-
tées selon quatre angles de vue : (1)
l’enseignant, (2) le dispositif, (3) la mo-
bilisation des étudiants, et (4) les mé-
diateurs. Ces angles sont ici pensés
comme autant de voies ou chemins à
explorer. L’idée étant que chaque en-
seignant puisse y trouver son compte,
en fonction de sa situation (contexte
d’enseignement,
visés…)
et/ou ses besoins. Certaines pistes pro-
posées à travers ces quatre voies au-
raient pour fonction d’offrir au mode ex
cathedra une ouverture à l’engage-
ment des étudiants.
objectifs
1RE VOIE
ADAPTER SA POSTURE
D’ENSEIGNANT
Cette première voie vous concerne di-
rectement. Effectivement, la communi-
cation ne passe pas seulement par les
mots. Les postures, les gestes, l’expres-
sion du visage, l’intonation ont, eux
aussi, toute leur importance. Alors
comment pourriez-vous mobiliser ces
éléments ?
Pour capter au mieux l’attention de
votre public, il s’agirait, par exemple, de
regarder les étudiants, de leur parler di-
rectement sans lire votre support de
cours de manière monotone, tout en
ponctuant votre discours d’anecdotes
personnelles (Sander-Regiers et al.,
2007). Vous pourriez également chan-
ger de place, avoir recours à la gestuelle
pour appuyer vos contenus… (Sander-
Regiers et al., 2007).
5 pistes pour optimiser
un cours « transmissif »
Bain (2004) présente cinq règles d’or pour
délivrer un cours ex cathedra le plus effica-
cement possible, à savoir :
1/ Aider à la compréhension des étudiants :
Par quels moyens ?
à CF. VOIES 2 & 4
2/ Interactions = outils d’enseignement :
Quelles interactions ? à CF. VOIES 3 & 4
3/ Cours magistral = conversation : Évidem-
ment ! à CF. VOIES 3 & 4
4/ Remplir l’auditoire (de sa présence) :
Comment ? à CF. VOIE
1
5/ Qualités oratoires : Oui, mais pas que !
à CF. VOIE 1
Un autre aspect auquel il conviendrait
d’être attentif concerne la place de l’en-
seignant telle qu’elle est perçue par les
étudiants. Celle-ci serait plus ou moins
proche de l’expertise dans le mode ex
cathedra (De Roth, 2003). Une telle
posture pourrait engendrer une forme
de relation verticale, l’enseignant évo-
luant dans un univers de savoirs experts
perçu par l’étudiant comme « impos-
sible à atteindre » (Faulx & Danse,
2015). Nous pourrions alors nous inter-
roger sur la manière de transmettre le
savoir nécessaire, tout en le rendant ac-
cessible aux étudiants. C’est sur cet élé-
ment plus particulier que se penchent
les trois voies suivantes.
2E VOIE
PENSER SON DISPOSITIF
Comment
aména-
pourriez-vous
ger/penser/choisir… votre dispositif ex
cathedra, afin de pallier certains obs-
tacles (manque de clarté, ennui, mono-
tonie…) (Gibss, 1992, cité par Vanpee,
Godin & Lebrun, 2008) ? Organiser mé-
thodiquement le dispositif d’enseigne-
ment/apprentissage constituerait une
piste d’action (parmi d’autres !)
Nous choisissons de nous focaliser sur
deux stratégies, retenues pour leur de-
gré de faisabilité : clarifier son exposé
magistral et varier les séquences à l’in-
térieur du dispositif.
CLARIFIER, OUI, MAIS QUAND ?
Les étudiants assistant à des cours ex
cathedra éprouveraient des difficultés
à cerner l’objectif général du cours, des
activités proposées, de l’évaluation…
(Gibbs, 1992, cité par Vanpee et al.,
2008). Découleraient de ce manque de
2
de
« clarté » des déficits d’attention, d’en-
gagement,
compréhension…
(Vanpee et al., 2008). Néanmoins, clari-
fier, comme tout acte pédagogique, ne
s’improvise pas. Si l’avantage de ce der-
nier semble assez évident, il convient
de le mobiliser à bon escient… Dès lors,
quand clarifier ?
Généralement, deux étapes-clés de
tout dispositif (qu’il s’agisse d’un cours
envisagé durant une année acadé-
mique, un quadrimestre ou une séance
isolée…) sont invoquées : le début et la
fin (phénomène de primauté-récence) ;
les étudiants retiendraient mieux les sa-
voirs transmis en début (primauté)
et/ou en fin de cours (récence) que
ceux enseignés au milieu (Ko, Rana &
Burgin, 2018). Par exemple, il serait
possible d’utiliser un sommaire intro-
ductif (primauté) clarifiant les objectifs,
les modalités d’évaluation… (Siberman,
1990, cité par Roduit, Kaufmann &
Clerc, 2014). Dans le même ordre
d’idées, synthétiser les notions impor-
tantes en fin de cours (récence) infor-
merait les étudiants sur les éléments
« à retenir ». Une diapositive lacunaire,
si vous utilisez un « PowerPoint », pour-
rait être proposée aux étudiants : ils ré-
fléchiraient alors sur le contenu de ces
lacunes (selon diverses modalités ; cf.
voies 3 et 4).
10 clés pour réussir une présentation
PowerPoint
Afin d’optimiser la clarification des sa-
voirs enseignés/appris, le lien ci-des-
sous vous informe sur un aspect plus
spécifique du dispositif : la présenta-
tion des diapositives (si vous en utili-
sez, ou que vous souhaitez en utiliser).
GERER LA TEMPORALITE SYMBOLIQUE : QUOI
ET COMMENT ?
Ce qui est entendu par « temporalité
symbolique » est le temps tel qu’il est
vécu par les étudiants (Faulx & Danse,
2015). Varier les séquences à l’intérieur
même d’un dispositif de cours permet-
trait de sortir l’étudiant de la monoto-
nie et de favoriser l’assimilation du con-
tenu enseigné. Une piste concrète pour
l’enseignant serait de commencer son
cours en invitant les étudiants à noter,
individuellement, ce qu’un concept leur
évoque. Il peut ensuite collectiviser les
idées proposées sous forme de brains-
torming, qu’il écrit au tableau. Il pour-
suit par un exposé théorique. Pour illus-
trer ce qui vient d’être abordé, l’ensei-
gnant projette alors une séquence vi-
déo. Il propose aux étudiants d’y réagir.
Il poursuit par une autre partie théo-
rique avant d’inviter son public à un
moment de réflexion autour d’une
question liée au sujet abordé (cf. voie
3).
Outre l’avantage de laisser un temps
nécessaire – incompressible – à l’ap-
prentissage, l’exemple ci-dessus illustre
comment il est possible d’agir sur les di-
mensions asymétriques, hiérarchiques
et transmissives du cours ex cathedra.
En alternant des séquences dans le dis-
positif de cours, l’enseignant développe
deux rôles : celui « de pair » (qui mobi-
lise/collectivise les apports des étu-
diants) et « d’expert » (qui détient des
connaissances) (Faulx & Danse, 2015).
Nous retrouverons cette gestion de la
temporalité à travers diverses procé-
dures évoquées au sein des autres
voies.
3E VOIE
MOBILISER LES ETUDIANTS
Un des enjeux de l’interaction avec les
étudiants réside dans la capacité du
professeur à leur donner le sentiment
qu’il enseigne à chacun d’eux indivi-
duellement, et non au groupe (Faulx,
2015). Cela permettrait de « personna-
liser » le processus de transmission des
savoirs (Enseignant, 2018). Comment
réussir ce tour de force ? Par la mobili-
sation des étudiants, qu’elle soit cogni-
tive, expérientielle ou – plus rarement
dans ce cas-ci – corporelle.
LES PROJECTIONS EN SITUATION OU LE DIA-
LOGUE VIRTUEL
Ces techniques de projection en situa-
tion visent à plonger les étudiants dans
leurs expériences passées ou futures
(Faulx & Danse, 2015). Concrètement,
cela se traduit par certaines phrases du
type « Vous êtes-vous déjà demandé
si… ? ». D’autres techniques ont pour
objectif de susciter un dialogue virtuel
chez les étudiants, en leur suggérant
des questions qu’ils pourraient se poser
(Faulx & Danse, 2015). Ces sollicitations
peuvent prendre certaines formes, par
exemple : des formules collectives, des
sollicitations directes ou des supposi-
tions.
Ces techniques pourraient stimuler
l’éveil, l’attention et la concentration
de l’étudiant, en se référant à ses expé-
riences passées, aux sensations qui y
sont liées, ou en l’invitant à se poser des
questions.
FAVORISER LES INTERACTIONS ENTRE ETU-
DIANTS
Pour être efficace, il est indispensable
que l’exposé magistral comporte des
« vides », qu’il suscite le questionne-
ment des étudiants, qu’il crée des es-
paces de « suspension » (Faulx & Danse
2015). Mais encore faut-il laisser aux
étudiants la possibilité de se poser ces
questions, voire d’élaborer et cheminer
autour de celles-ci. Une manière de
rendre ce processus possible est de pro-
poser des temps de réflexion, d’explica-
tion, d’application et de traitement
(Ménard & St-Pierre, 2014). Concrète-
ment, suite à un moment d’exposé plus
théorique, il peut être proposé aux étu-
diants d’échanger quelques minutes
avec les voisins, de tenter de faire des
liens entre leurs expériences person-
nelles et/ou professionnelles et ce qui
vient d’être enseigné, de porter un re-
gard critique sur cette théorie, d’imagi-
ner des applications possibles de celle-
ci en contexte, etc. Ces moments d’in-
teraction pourront enrichir la réflexion
des étudiants durant la suite du cours.
Mettre en commun le contenu de cette
réflexion serait entre autres l’occasion,
pour l’enseignant, de se créer une re-
présentation (plus ou moins réaliste) du
degré de compréhension des étudiants
(Enseignant, 2018). Cela implique tou-
tefois d’anticiper la manière de récupé-
rer l’attention de l’auditoire et de per-
mettre une mise en commun riche de
sens.
Pourquoi, et comment, rendre un amphi in-
teractif ? (Berthiaume, 2013)
Conférence vidéo de Denis Berthiaume
où le chercheur en pédagogie de l’ensei-
gnement supérieur présente comment
l’innovation pédagogique peut soutenir
l’interaction et l’apprentissage des étu-
diants.
http://sup.univ-lorraine.fr/conference-pourquoi-et-
comment-rendre-un-amphi-interactif/
3
4E VOIE
EXPLOITER LES
MEDIATEURS TICE
Un autre aspect sur lequel miser dans
une perspective de redynamisation de
ses pratiques pédagogiques touche au
large champ des médiateurs didac-
tiques et, plus particulièrement ici, celui
de l’insertion des outils technologiques
au sein des méthodes d’enseignement.
Cette intégration est multiple et doit
le
nécessairement s’envisager sous
prisme de potentielles plus-values. Il
s’agit de réfléchir à la manière dont
l’outil sélectionné va aider à optimiser
les activités d’enseignement/apprentis-
sage (Denis, 2017). Nous appuyant sur
les faiblesses du cours ex cathedra
telles qu’énoncées ci-avant, c’est dans
une optique d’opérationnalisation que
nous vous présentons quelques outils
sélectionnés parmi les multiples possi-
bilités qu’offrent les TICE (Technologies
de l’Information et de la Communica-
tion pour l’Éducation).
EN (PRE-)SEANCE
Dès la réalisation de leur matériel péda-
gogique, les enseignants ont parfois re-
cours à des présentations assistées par
ordinateur (diaporamas), qu’ils peu-
vent agrémenter d’illustrations, vidéos
ou autre support multimédia, de façon
à soutenir la matière enseignée et à ac-
crocher au contenu, tentant par la
même occasion d’éviter le piège de la li-
néarité du cours magistral stricto sensu.
L’intégration, en séance, d’outils tels
que les cartes mentales (mind maps) et
nuages de mots (word clouds) peut ai-
der lors de phases d’accroche (brains-
torming) ou de rappel commun (ré-
sumé, débriefing), et présente l’avan-
tage d’intégrer ce que chacun amène.
Deux autres stratégies didactiques sont
les quizz/QCM et la méthode LQRT
(Lecture, Questions-Réponses, Test)
(Leclercq, 1998). En effet, des question-
naires en cours ou fin de séance aident
au travail en spirale nécessaire à la fixa-
tion des apprentissages en amenant les
étudiants à sélectionner une réponse
via des boîtiers de vote électronique. La
méthode LQRT suppose une phase de
lecture (à domicile ou en séance) de do-
(syllabus,
cuments de
notes…) lors de laquelle les étudiants
sont invités à lister des questions ou
référence
problèmes de compréhension. En
séance, l’enseignant consacre du temps
afin de répondre aux questions soule-
vées. La fin du cours est dédiée à une
séance de QCM sur la matière abordée.
Ce test permet aux étudiants de se si-
tuer dans leur apprentissage. Quant à
l’enseignant, il peut réguler son disposi-
tif d’enseignement selon les informa-
tions récoltées.
ET A DISTANCE ?
Dans une optique d’individualisation de
la relation enseignant-étudiant, on
pourrait envisager la mise en place d’un
forum de discussion ou autre système
de communication asynchrone. Un es-
pace de discussion en ligne présente
l’avantage de multiplier les moyens de
contact ainsi que les espaces d’expres-
sion des étudiants, tendant ainsi vers
davantage d’équité de parole. Il donne
aussi aux enseignants la possibilité de
s’informer sur la compréhension de la
matière chez leurs étudiants et de four-
nir des feedbacks plus individualisés
(formalisés ou non), selon les possibili-
tés et les cas. Il s’agit cependant de bien
évaluer a priori la potentielle charge de
travail additionnel que la gestion d’un
tel procédé peut engendrer, tant pour
l’enseignant
(création, préparation,
animation/modération, régulation du
processus), que pour l’étudiant (faisabi-
lité de la tâche demandée pour la date
fixée, volume de travail à intégrer dans
le calcul des crédits du cours).
D’autres pistes intéressantes mènent
aux plates-formes virtuelles (exercices
à réaliser en ligne, cas concrets à analy-
ser débouchant ou non sur un feedback
plus ou moins personnalisé…) N’ou-
blions pas le potentiel des espaces nu-
mériques de travail collaboratif, per-
mettant aux étudiants d’alimenter et
de réajuster leurs représentations et
connaissances entre pairs, par exemple
dans la co-réalisation de tâches.
(Goff, 2000) www.tedgoff.com
CLOTURER SANS CONCLURE…
Clôturons comme nous avons débuté,
en nous (ré)intéressant au paradoxe
soulevé par Schleiermacher.
En 2018, il semblerait que les nombreux
instruments pouvant être mobilisés
(gestuelle de
l’enseignant, smart-
phones, PowerPoint…), jouent un rôle
non négligeable sur les formes que peut
prendre l’exposé ex cathedra. Toute-
fois, agir sur sa forme irait-il de pair
avec une modification de sa nature ?
Nous pensons que c’est en tentant l’ex-
périence de certaines stratégies propo-
sées ici qu’une réponse, que nous ne
prétendons pas détenir, pourrait émer-
ger… Il semblerait que certaines des
pistes de réflexion proposées dans ce
mémo accordent davantage d’espace,
de temps, d’attention… à l’apprenant,
en envisageant un peu différemment le
point d’ancrage du mode ex cathedra.
Comme illustré au fil de nos quatre
voies, c’est notamment en misant sur
l’interaction entre pairs, en sollicitant la
réflexion des étudiants, en engageant
des échanges avec ceux-ci (aussi bien
en séance qu’à distance) que l’ensei-
gnant-expert ouvre la porte à de réels
dialogues, à plusieurs voix, diminuant
ainsi l’asymétrie du cours ex cathedra.
« L’enseignement aux grands groupes : une interaction redécouverte par l’intégration des
TIC au cours magistral » (De Paoli, 2003)
Le Centre d’études et de formation en enseignement supérieur (CEFES) de l’Université de
Montréal a publié un article du professeur De Paoli relatant, entre autres, comment l’in-
tégration d’un outil TIC a aidé à la refonte d’un cours dont il est titulaire…
http://www.cefes.umontreal.ca/ressources/bulletins/BulletinCEFESno8.pdf (article en page 5)
4
Il apparaît en outre que le cours ex ca-
thedra demeure bien au cœur de pré-
occupations actuelles (ce mémo en est
l’exemple !). Il ne constituerait pas, se-
lon nous, un mode d’enseignement ob-
solète : celui-ci a bénéficié, au fil du
temps, de réflexions, d’innovations…
aussi diverses que multiples.
Nous espérons que ce mémo aura été
l’occasion de vous présenter quelques
réflexions répondant à certains de vos
questionnements passés, actuels et,
qui sait, peut-être futurs…
R É F É R E N C E S B I B L I O G R A P H I Q U E S
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