Observatoire
compétences-emplois
Bulletin de l’Observatoire compétences-emplois, vol.9 n°3 (2019)
L’apprentissage et la formation en milieu de
travail
Sylvie Ann Hart
Université du Québec à Montréal, QC,
Canada
Résumé
Aujourd’hui, les entreprises sont considérées comme des lieux d’apprentissage au même titre
que les écoles. Cette conscience est à l’origine de la volonté des gouvernements de soute-
nir et de suivre le développement des pratiques de formation en entreprise. Quant aux cher-
cheurs, ils s’intéressent aux modalités des pratiques de formation, de même qu’à l’évalua-
tion de leur rendement. Voici le sommaire des articles consacré à chacun de ces thèmes.
Mots-clés: formation, évaluation, éducation formelle, éducation informelle
Aujourd’hui, les entreprises sont considé-
rées comme des lieux d’apprentissage au même titre
que les écoles. Cette conscience est à l’origine de la
volonté des gouvernements de soutenir et de suivre
le développement des pratiques de formation en en-
treprise. Quant aux chercheurs, ils s’intéressent aux
modalités des pratiques de formation, de même qu’à
l’évaluation de leur rendement. Nous avons consacré
des articles à chacun de ces thèmes.
1. Les pratiques de formation et d’apprentissage
en entreprise
L’apprentissage ou la formation formel et in-
formel sont les principales notions utilisées par les
chercheurs et les praticiens pour comprendre et dé-
crire les pratiques de formation et d’apprentissage
en milieu de travail. L’éducation formelle a marqué
le XXe siècle correspondant au mouvement d’émer-
gence et d’institutionnalisation de l’éducation pour
tous.
Les années 70 vont voir naître des perspec-
tives théoriques qui vont mettre de l’avant la for-
mation et l’apprentissage informels. Aujourd’hui,
toutefois, un équilibre semble vouloir s’établir et
les chercheurs ont tendance à considérer que la for-
mation formelle et l’informelle ont toutes deux leur
place dans les pratiques de formation en milieu de
travail (Solar-Pelletier, 2013).
Quoiqu’il en soit, ces notions sont difficiles
à opérationnaliser. Colley, Hodkinson, Malcom
(2003) ont analysé les travaux des grands chercheurs
du domaine (Eraut, Beckett et Hager, Hodkinson et
Hodkinson, Simkins, Hunt, Stern et Sommerlad, Li-
vingstone) pour conclure qu’il n’y a pas de consensus
sur les paramètres permettant de définir la formation
formelle et l’informelle. De plus, ceux-ci sont si nom-
breux (une vingtaine) qu’il est possible de retrouver
des caractéristiques de formalité et d’informalité
à divers degrés dans toutes situations ou activités
d’éducation, de formation ou d’apprentissage (Hart,
2013b).
Pour Stephen Billett, chercheur australien et
grand spécialiste du domaine, décrire le milieu de
travail comme un environnement d’apprentissage in-
formel ne permet pas de comprendre les pratiques de
formation en milieu de travail. Pour résumer briève-
ment son approche, disons que le milieu de travail
offre des curriculums d’apprentissage et des pratiques
pédagogiques qui assurent le transfert et l’acquisition
des compétences et que ces curriculums et pratiques
sont influencés par des facteurs relatifs à l’environ-
nement de travail – certains offrant plus d’opportuni-
tés d’apprentissage que d’autres – de même que par
l’engagement des individus. Nous avons consacré un
article à la présentation de son approche (Solar-Pel-
letier, Hart, 2014) et un autre, à son application dans
une industrie manufacturière (Hart, 2015).
2. Les enquêtes sur la formation en entreprise
Pendant deux décennies, de 1990 à 2010,
Statistique Canada a produit de grandes enquêtes sur
la formation continue et la formation en entreprise.
Ainsi l’Enquête sur la formation des adultes (EFA)
qui s’est tenue à trois reprises en 1993, 1997 et 2002
suivie de l’Enquête sur l’accès et le soutien à l’édu-
cation et à la formation (EASEF) en 2008. Au même
moment, l’Agence a produit l’ Enquête sur le milieu
du travail et les employés (EMTE) en 1999, 2001 et
2005. Ces enquêtes ont montré que la participation
des adultes à la formation avait augmentée sur cette
période pour des taux oscillant peu ou prou entre 30%
et 40%.
Au Québec, il y a eu l’ Enquête sur les pra-
tiques de formation en emploi de l’Institut de la Statis-
tique du Québec (ISQ) conduite en 2011 et 2014 pour
le compte d’Emploi-Québec. Cette enquête, menée
auprès des entreprises, a montré que plus ou moins
60% des entreprises investissaient dans la formation
dite structurée (2011 : 63 et 2014 : 42). Aujourd’hui
nous disposons de l’Enquête sur le recrutement, l’em-
ploi et les besoins de formation (EREFQ) menée par
SOM en 2015 pour le compte d’Emploi-Québec dont
les résultats sont publiés par région.
Nous disposons également des résultats de la
déclaration des activités de formation produites par
les entreprises dans le cadre de la Loi 90 depuis main-
tenant presque 20 ans et de la liste des formateurs
agréés de la Commission des partenaires du marché
du travail. Il y a aussi les comités sectoriels de main-
d’œuvre qui produisent des enquêtes sectorielles sur
les besoins de formation des entreprises et des infor-
mations sur l’offre de formation continue des secteurs
d’activités qu’ils représentent.
Les Européens ont l’Enquête sur la forma-
tion professionnelle continue (Continuing Vocational
Training Survey – CVTS). Menée dans les 28 pays
de l’Union européenne et en Norvège, il existe au-
jourd’hui cinq éditions : 1993, 1999, 2005, 2010,
2015. Cette enquête est aujourd’hui une source de
données internationalement comparables sur :
•
•
•
•
•
la formation professionnelle continue, l’offre
et demande de compétences et les besoins de
formation;
la mesure de la forme, du contenu et du volume
de la formation continue;
les ressources propres des entreprises en forma-
tion et le recours à des formateurs extérieurs;
les coûts de la formation continue;
la formation professionnelle initiale.
Le Québec pourrait mener la CVTS sur son
territoire. Les responsables québécois d’une telle en-
quête profiteraient d’une expertise bâtie sur plus de
vingt ans. Les chercheurs et les entreprises d’ici au-
raient la possibilité d’établir des comparaisons claires
avec les pays européens. Un tel projet est d’autant plus
réalisable que chaque pays européen est responsable
de l’enquête sur son territoire, de l’administration du
questionnaire à la production des rapports, en passant
par le traitement et l’analyse des données. Sans comp-
ter qu’ils disposent aussi d’une marge de manœuvre
qui leur permet d’ajouter des questions adaptées au
contexte national, s’ils le souhaitent (Hart, 2013a).
2
Hart / Bulletin de l’Observatoire compétences-emplois, vol.9 n°3 (2019) 3. L’évaluation des impacts de la formation en
entreprise
Le phénomène est bien connu, les entreprises
ont du mal à évaluer les impacts des formations
qu’elles financent ou dispensent. Dans ce contexte,
nous avons voulu présenter des méthodes et des ins-
truments conviviaux qui leur permettent de le faire
elles-mêmes.
En voici deux : le Cycle de construction et de
Gestion qualité d’évaluation du transfert (De souza,
Chochard et Gilles, 2017) développé par équipe de
chercheurs québécois et suisses et le Q4TE un ques-
tionnaire d’évaluation de la formation développé par
des chercheurs allemands (Chochard, 2013).
Références
Bishop, D. (2012). «Firm size and skill formation pro-
cesses an emerging debate». Journal of Education
and Work 25(5).
Chochard, Y. (2013). L’évaluation de la formation :
un instrument simple et fiable à la portée des prati-
ciens. Bulletin de l’Observatoire compétences-em-
plois, 4(3).
Colley, H., Hodkinson, P., Malcom, J. (2003),
Informality and formality in learning: a report for
the Learning and Skills Research Centre. Londre :
Learning and Skills Research Centre.
De souza, G., Chochard, Y. et Gilles, JL. (2017).
Évaluation du transfert des acquis de formation en
milieu de travail : une nouvelle méthode. Bulletin
de l’Observatoire compétences-emplois, 7(3).
Hart, S.A. (2015). Pour aller vers la formation duale,
il faut reconnaître la valeur de l’apprentissage et du
travail en milieu manufacturier. Bulletin de l’Ob-
servatoire compétences-emplois,5(4).
Hart, S.A. (2013a). L’enquête européenne sur la for-
mation des entreprises : des résultats qui interpellent.
Bulletin de l’Observatoire compétences-emplois,
4(3).
Hart, S.A. (2013b). Apprentissage formel, informel,
non-formel, des notions difficiles à utiliser… pour-
quoi ? Bulletin de l’Observatoire compétences-em-
plois, 4(2).
Hart, S.A. (2011). Les skillnets de l’Irlande, un dis-
positif qui s’apparente aux mutuelles de formation
du Québec. Bulletin de l’Observatoire compé-
tences-emplois, 2(1).
Solar-Pelletier, L. et Hart, S.A. (2014).Curriculums
d’apprentissage et pratiques pédagogiques en entre-
prise, l’approche de Stephen Billett. Bulletin de
l’Observatoire compétences-emplois, 5(1).
Solar-Pelletier, L. (2013). L’apprentissage dans les
PME : l’emprise de l’informalité. Bulletin de l’Ob-
servatoire compétences-emplois, 4(4).
Tousignant, P. (2012). La formation dans les PME:
pour des stratégies de soutien respectueuses de
leur spécificité. Bulletin de l’Observatoire compé-
tences-emplois, 3(1).
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Hart / Bulletin de l’Observatoire compétences-emplois, vol.9 n°3 (2019)