La pandémie COVID-19 : une opportunité pour développer la
formation en Santé Mondiale 
Joël Ladner1,2, Janie Giard3
1 UFR Santé, Université de Rouen, Rouen, France
2 Conférence Internationale des Doyens des Facultés de Médecine d’Expression Française
(CIDMEF)
3 Faculté de Médecine, Université Laval, Québec, Canada 
La  pandémie  COVID-19,  véritable  crise  sanitaire  planétaire,  a  déclenché  en  quelques
semaines  des  mesures  transnationales  sans  précédent  dans  le  monde  entier.  De  très
nombreux pays ont mis en place des limitations des déplacements individuels et des politiques
de  confinement.  Les  conséquences  de  cette  crise  risquent  d’être  lourdes  et  d’accroître  les
inégalités sociales. 
Nos  facultés  de  médecine  doivent  préparer  la  période  et  la  suite  après  la  pandémie.  La
formation en santé mondiale offre une avenue prometteuse pour faire face aux conséquences
qui en découleront, travailler à réduire les inégalités sociales de santé et davantage concrétiser
un engagement envers la responsabilité sociale. 
Concepts en santé mondiale
La Santé mondiale (Global Health dans la littérature internationale) apparaît pour la première
fois en 1997 dans un rapport publié par l’Institute of Medicine, instance scientifique américaine.
Elle  désigne  l’ensemble  des  enjeux  de  santé  humaine  qui  transcendent  les  frontières
nationales.  
Différentes définitions de la santé mondiale sont apparues ces dernières années. La définition
princeps fut celle proposée par Koplan, insistant sur la nécessité d’appréhender les problèmes
de santé par une approche transnationale, de prendre en compte l’ensemble des déterminants
environnementaux et sociaux de la santé (au-delà du seul système de soins) et d’apporter une
réponse globale et multilatérale (1). 
La  santé  mondiale  s’est  au  fil  des  années  progressivement  structurée  en  une  discipline
reconnue,  avec  ses  concepts  novateurs,  ses  champs  disciplinaires  (santé,  mondialisation,
transition  démographique,  risques  d’épidémie  et  de  pandémie,  gouvernance,  fardeau  des
maladies  chroniques,  politiques  de  santé,  etc.),  ses  spécialistes  en  santé  mondiale,  sa
pluridisciplinarité
(santé  publique,  épidémiologie,  sciences  humaines  et  sociales,
économiques,  politiques  et  environnementales),  sa  multi-sectorialité  et  une  large  diversité
d’implication des acteurs, car les enjeux de santé sont aussi liés à̀  l’éducation, à la culture, au
climat,  à  l’environnement,  etc.  Elle  engage  à  la  fois  les  acteurs  publics  nationaux  et
internationaux,  les  professionnels  de  santé,  les  chercheurs  de  multiples  disciplines,  les
organisations non gouvernementales et associatives, le secteur privé et les citoyens (1,2). 
 Ces dernières années, un nouveau concept est apparu, celui de santé planétaire (3). Elle est
définie comme « la santé de la civilisation humaine et l’état des systèmes naturels dont elle
dépend ». La santé planétaire défend le fait que nous sommes confrontés non seulement au
changement climatique, mais aussi à la diminution de la biodiversité, à la pénurie de terres
arables et d’eau douce, à la pollution et à l’évolution des flux biogéochimiques.  
Santé mondiale et responsabilité sociale : des liens évidents
Sans surprise, nombre des concepts de santé mondiale sont retrouvés dans la démarche de
responsabilité sociale des institutions de formation en santé : problèmes de santé, fardeau des
maladies  (infectieuses  et  chroniques),  démarches  privilégiées  vers
les  populations
vulnérables, les enjeux nationaux, internationaux et transnationaux des politiques de santé, la
gouvernance, etc. Santé mondiale et responsabilité sociale sont toutes deux très transversales
dans leurs concepts, leurs champs et leurs démarches, ainsi que par les thèmes abordés et
les  acteurs  et  institutions  concernés  et  impliqués.  Les  interactions  sont  ainsi  fortes.  Les
politiques  de  santé  mondiale  rejoignent  les  principes  de  la  responsabilité  sociale,  elles  ont
pour but d’améliorer la santé de l’ensemble des populations dans le monde, dans un esprit
d’équité, de solidarité et d’efficacité (4). 
La pandémie COVID-19 et les menaces pour la santé mondiale
La  santé  mondiale  est  face  à  de  nouveaux  défis.  Les  transitions  démographiques,  les
changements climatiques, les situations de conflits et de fragilité, la mondialisation rapide et
aisée facilitent l’émergence ou la réémergence de nouveaux agents pathogènes à potentiel
épidémique  et  pandémique  et  les  résistances  antimicrobiennes  constituent  de  réels  enjeux
pour la santé mondiale. En 2019, l’OMS a identifié dix menaces sanitaires en santé mondiale,
dont le risque infectieux pandémique, (grippe, dengue, Ebola) la pollution et les impacts du
changement climatique sur la santé, les pays et populations vulnérables (conflits, sécheresse,
inondations) ou encore les résistances antimicrobiennes.  
La crise actuelle nous enseigne qu’un changement de paradigme dans les politiques de santé
publique et de santé mondiale doit être initié. Les politiques de santé mondiale ne devraient
pas être seulement conçues pour une réponse aux menaces ponctuelles, au cas par cas, mais
elles devraient adopter une approche plus large dans une démarche continue et suivie de la
santé, plus systémique du fardeau mondial des maladies, des risques et des déterminants de
santé et des politiques en santé, associant des engagements plus significatifs pour la sécurité
et la gestion des risques pour la santé humaine (5). 
Il est nécessaire de réviser notre vision des politiques de santé, très curatives à l’heure actuelle
pour  aller  vers  des  politiques  plus  préventives  et  de  promotion  de  la  santé,  coordonnées,
multisectorielles prenant en compte les facteurs et risques environnementaux, sachant réduire
les  inégalités  sociales  de  santé  et  adaptées  aux  spécificités  et  contextes  locaux,  afin  de
pouvoir mieux répondre aux besoins et aux attentes de la population. Nous sommes bien dans
une démarche de responsabilité sociale.  
Même dans la situation d’urgence que nous vivons depuis quelques semaines, l’adhésion de
la population est un des facteur-clefs du succès de la réponse. La confiance des citoyens dans
les politiques publiques suppose qu’elles ne soient pas exclusivement vécues par un contrôle
(plus ou moins contraint) venu « d’en-haut » (experts, administration publique, politique), mais 
 avec une forte implication et responsabilisation de la société. Les organisations de la société
civile et les associations par leur expertise propre ont une connaissance forte de la diversité
sociale des populations, un repérage des publics et des populations spécifiques, vulnérables,
une  capacité,  des  habiletés  et  un  savoir-faire  dans  les  interventions  dans  leurs  contextes
locaux (5).  
L’Implication  des  étudiants  en  santé  est  cruciale  dans  le  contexte  actuel  tant  pour  la
contribution qu’ils ont pu apporter pendant la crise sanitaire que pour leur permettre d’en tirer
des acquis et une expérience qu’ils pourront intégrer dans leur pratique future.  
Plaidoyer pour la formation en santé mondiale
Pour  répondre  aux  besoins  des  personnes  les  plus  vulnérables,  les  médecins  doivent  être
formés en vue d’être socialement plus responsables (6-8). Il faut davantage promouvoir une
approche universelle et apporter une perspective globale de la médecine pour qu’ils soient en
mesure de donner des soins les plus appropriés et d’assurer l’accès aux soins de santé pour
tous  (9).  Une  formation  en  santé  mondiale  permet  aussi  de  promouvoir  la  responsabilité
sociale des médecins (6-8).  
Les  facultés  de  médecine  américaines  ont  été  pionnières  dans  la  création  de  curricula
d’enseignements en santé mondiale. Ces enseignements existent sous différentes modalités.
Ils peuvent être inclus dans le tronc commun de la formation médicale, ils peuvent aussi être
proposés sous une forme optionnelle. Certains s’adressent à̀  des professionnels de santé en
formation  professionnelle  continue,  d’autres  s’adressent  aux  étudiants  en  formation  initiale.
Leur contenu peut être uniquement théorique, ou à l’inverse, uniquement opérationnel, avec
des stages sur le terrain, voire souvent mixte (10, 11).  
Depuis  2015,  l’UFR  Santé  de  l’Université  de  Rouen,  pionnière  en  France,  propose  un
enseignement  optionnel  en  santé  mondiale  interdisciplinaire  aux  étudiants  en  médecine,
pharmacie  et  maïeutique.  Il  connait  un  franc  succès  avec  plus  d’une  centaine  d’étudiants
inscrits chaque année (12). 
Plusieurs facultés de médecine canadienne se sont engagées dans ces dernières années à
former  les  étudiants  à  la  fois  en  santé  mondiale  et  la  responsabilité  sociale  (8).  Cet
engagement devient maintenant impératif et la formation à la santé mondiale en est un outil
incontournable.  Cette  ambition  de  structurer  la  formation  à  la  responsabilité  sociale  et  à  la
santé mondiale dans les communautés universitaires de santé est une réponse déterminante
pour former des futurs professionnels qui auront l’aptitude d’anticiper les réponses de santé
face à des crises sanitaires. Les étudiants formés seront mieux à même de répondre dans leur
quotidien  aux  besoins  diversifiés  des  populations  qu’ils  auront  à  desservir  de  la manière  la
plus humaine possible, avec une ouverture d’esprit, une capacité à s’adapter, à être compétent
inter culturellement et à échanger avec sensibilité et humilité culturelle. La prise de conscience
des inégalités sociales qui existent tant dans leur communauté qu’à l’échelle planétaire et les
compétences  qui  découleront  de  cette  exposition  leur  permettra  ultimement  de  développer
leur ouverture à la richesse interculturelle, l’intérêt à servir les populations les plus vulnérables,
le sens de l’engagement et le souci de justice sociale. 
 Les  effets  de  l’enseignement  de  la  santé mondiale chez  les  étudiants  en médecine  ont  été
documentés  par  différents  auteurs  (7-9,13-15).  La  plupart  des  études  rapporte  des  effets
bénéfiques  suite  à  leur  participation  à  un  programme  de  santé  internationale  ou  de  santé
mondiale qui le plus souvent comprenait une formation académique et un stage à l’étranger. 
Les principaux effets rapportés sont une meilleure compréhension des déterminants de  santé,
le  développement  des  habiletés  cliniques  et  une  meilleure  capacité  à  se  fier  à  l’examen
physique,  une  plus  grande  exposition  aux  maladies  cliniques  rares,  une  utilisation  plus
efficiente des ressources disponibles, une plus grande sensibilité culturelle avec un respect
des cultures et une considération des facteurs culturels dans la dispensation des soins et la
communication  interculturelle,  une  plus  grande  implication  dans  les  décisions  et  une  plus
grande appréciation de la santé publique et la valorisation de la participation communautaire. 
Cette formation a aussi un impact sur les choix de carrière et le type de pratique retenu avec
une  plus  grande  orientation  vers  une  pratique  de  médecine  générale  et  dans  les  soins
primaires,  le  choix  de  pratiquer  plus  souvent  en  région,  la  préférence  pour  l’exercice  d’une
pratique  de  groupe,  un  engagement  dans  des  activités  communautaires,  un  intérêt  et  un
engagement à servir les populations les plus vulnérables et les communautés ethnoculturelles
et un intérêt pour la pratique de la santé mondiale (7-9,13-15). 
En conclusion
Un des premiers enseignements de la pandémie COVID-19 nous convainc sans aucun doute
de la nécessité de poursuivre et de développer rapidement des filières de formation structurée,
multidisciplinaire et habilitée, proposant un curriculum en santé mondiale pour les étudiants,
les professionnels (de santé ou non) et les chercheurs.  
Cette formation en santé mondiale et pour la responsabilité sociale des étudiants en santé est
essentielle  et  devrait  être  maintenant  amplement  développée  et  accessible  à  tous.  La
littérature  confirme  l’impact  largement  positif  de  la  dispensation  d’un  curriculum  en  santé
mondiale chez les étudiants en médecine (meilleure compréhension des déterminants de la
santé, compétences en communication, orientation de leur pratique pour mieux répondre aux
besoins  des  personnes  les  plus  vulnérables  etc.).  Des  arguments  convaincants  de  santé
publique,  professionnels,  pédagogiques,  économiques  et  sociétaux  plaident  en  faveur  de
l’intégration  et  le  renforcement  des  programmes  de  santé  mondiale  dans  les  institutions
académiques  en  santé.  La  pandémie  COVID-19  par  son  ampleur  et  ses  conséquences
multiples et dramatiques est un argument de plus.  
Références
1  –  Koplan  JP,  Bond  TC,  Merson  MH,  Reddy  KS,  Rodriguez  MH,  Sewankambo  NK,  et  al.
Towards a common definition of global health. Lancet 2009; 373:1993-5.
2 – Fried LP, Bentley ME, Buekens P, Burke DS, Frenk JJ, Klag MJ, et al. Global health is
public health. Lancet 2010; 375:535-7
3 – Lancet Planetary Health. Welcome to the Lancet Planetary Health. 2017; 1:e1
4  –  Cauli  M,  Boelen  C,  Ladner  J,  Millette  B,  Pestiaux  D.  Dictionnaire  francophone  de  la
responsabilité sociale. 2018; Presses Universitaires de Rouen et du Havre, 598p. 
 5 – Paul E, Brown GW, Ridde V. COVID-19: time for paradigm shift in the nexus between local,
national and global health. BMJ Global Health 2020; 5:e002622.
6 – Heck JE, Wedemeyer D. International health education in US medical schools: trends in
curriculum focus, student interest, and funding sources. Fam Med. 1995; 27:636-40.
7 – Drain PK, Primack A, Hunt DD, Fawzi WW, Holmes KK, Gardner P: Global health in medical
education: A call for more training and opportunities. Academic Medicine. 2007; 82:226-30.
8 – Izadnegahdar R, Correia S, Ohata B, et al: Global health in Canadian medical education:
current practices and opportunities. Acad Med. 2008; 83:192-8.
9 – SmithJK, Weaver DB, Capturing medical students’ idealism. Ann Fam Med. 2006; Suppl
1:S32-8.
10 – Mendes IAC, et al. Global Health Education Programs in the Americas: A Scoping Review.
Annals of Global Health. 2020; 86:1-8
11 – Arthur MA, Battat R, Brewer TF. Teaching the basics: core competencies in Global Health.
Infect Dis Clin N Am 2011; 25:347-8.
12 – Bruyère L. Un enseignement de Santé Mondiale à la faculté de médecine de Rouen : quel
profil  et  quelles  attentes  des  étudiants  en  santé  ?  Thèse  2018 ;  UFR  Santé,  Université  de
Rouen.
13 – Ramsey AH, Haq C, Gjerde CL, Rothenberg. Career influence of an international health
experience during medical school. Fam Med. 2004; 36:412-6.
14 – Haq C, Rothenberg D, Gjerde CL. New worldviews: preparing physicians in training for
global health work. Fam Med. 2000; 32:566-72.
15 – Redwood-Campbell l, Ouellette V, Rouleau K, Lemire F et al., 2007: International health
and Canadian family practice. Relevant to me, is it? Can fam Physician 2007, 53:600-2.