Union des Fédérations des Associations de Parents de l’Enseignement Catholique
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LA FORMATION EN ALTERNANCE
Rapprocher l’école de l’entreprise
pour valoriser l’enseignement qualifiant ?
Jean-Luc VAN KEMPEN
Analyse UFAPEC 2009 N°14
Introduction
L’enseignement en alternance est assez peu développé en Communauté française de
Belgique où il est souvent considéré comme une filière qui favorise plutôt la (re)socialisation
de jeunes qui vivent l’échec ou le décrochage scolaires.
Or, dans d’autres pays, comme la Suisse ou l’Allemagne, cette forme d’enseignement
connaît un certain développement.
Est-il possible de développer davantage l’apprentissage sur le lieu de travail de manière à
augmenter les compétences des jeunes tout en permettant aux entreprises de recruter une
main d’œuvre plus efficace ?
1. Les différences entre formation en alternance et stages en entreprises
Il convient d’abord de bien distinguer la formation en alternance et le stage :
« – Le stage est une période d’immersion en entreprise ou en institution qui fait partie d’un
processus de formation et d’apprentissage plus global mis en place par l’école.
– La formation en alternance est une formation professionnelle qui se déroule dans deux
lieux distincts, un lieu d’enseignement systématique et un lieu de production ou de services,
et au cours de laquelle le jeune a un statut d’élève lorsqu’il est à l’école et un statut de
travailleur lorsqu’il est en entreprise. »1
Une définition opérationnelle de la formation en alternance a été élaborée en avril 2004 par
le Conseil Consultatif de la Formation en Alternance (CCFA) :
« 1. L’existence de fonctions correspondant à deux temps et deux lieux : celui de la
production en entreprise (de biens ou services, secteur marchand ou non-marchand) et celui
de la formation (en établissement scolaire ou centre de formation) ;
2. l’articulation de la production et de la formation dans un même projet négocié de formation
ayant pour objectif l’acquisition de compétences liées à un métier ;
3. la reconnaissance des compétences acquises ;
4. une alternance mensuelle de temps et de lieux, de formation et de travail, inscrite
dans des cycles de minimum 6 mois ;
5. deux temps minimum pour chacune des fonctions (20 % minimum pour la formation et
50 % minimum pour la production), l’addition de ces deux temps ne pouvant excéder le
temps plein ;
6. une fonction d’encadrement dans les deux lieux permettant au minimum un contact
pédagogique mensuel et s’inscrivant dans une perspective d’évaluation formative ;
7. la reconnaissance de la situation d’apprenant du stagiaire qui lui octroie le temps
nécessaire à l’acquisition de compétences et la marge d’erreur relative à la nature de
l’opération de formation ;
8. la reconnaissance financière du stagiaire et son accès aux droits sociaux. »2
2. La formation en alternance en Communauté française
1 FESEC (Fédération de l’Enseignement secondaire catholique), Guide méthodologique des stages en
entreprise ou en institution), avril 2000.
2 SIEP-Charleroi, Le Guide de la Formation et de l’Enseignement en alternance, 2007.
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Le nombre d’élèves qui suivent une véritable alternance est assez limité. De plus, elle est
plutôt considérée dans notre pays comme une filière de relégation.
Alors que l’entreprise était pratiquement la seule possibilité de formation technique avant la
dernière guerre, nous avons assisté à un processus de séparation entre l’école et
l’entreprise.
2.1. Le nombre d’élèves concernés
Malgré l’utilité de l’enseignement en alternance, tant pour les jeunes que pour les
entreprises, le nombre d’élèves qui poursuivent des études secondaires en alternance est
très limité. On en compte 12.500 dans les deux grandes filières qui s’offrent à eux à partir de
15 ans :
– Les 40 Centres d’Education et de Formation en Alternance (CEFA) : 8.721 élèves en
2006-2007, soit 2,4 % de l’ensemble des élèves de l’enseignement secondaire.3
– Les 14 centres de l’Institut wallon de formation en alternance pour les indépendants
et les petites et moyennes entreprises (IFAPME) et l’Espace formation PME (EFP) à
Bruxelles dispensent des formations (une dizaine d’heures par semaine) aux jeunes
qui sont engagés par un contrat d’apprentissage auprès d’un chef d’entreprise : 3.788
jeunes en âge d’obligation scolaire à la rentrée 2007-2008.4
Il faut toutefois signaler que le nombre de jeunes en alternance en CEFA a augmenté de
manière appréciable depuis une dizaine d’années : il est passé de 5.028 en 1997-98 à
8.721 en 2006-2007 (soit + 58 %)5.
Si on considère que le nombre de jeunes qui sont inscrits dans les CEFA est déjà limité, il
faut aussi relever qu’un quart d’entre eux ne vivent pas une alternance complète dans la
mesure où ils n’ont pas trouvé la possibilité de s’intégrer dans une entreprise.6
Au 15 janvier 2005, 76,2 % des jeunes inscrits dans un CEFA étaient effectivement insérés
dans une entreprise soit sous la forme d’une convention d’insertion professionnelle (pour les
15 à 18 ans), d’un contrat d’apprentissage industriel (pour les 15-18 ans et plus) ou d’une
convention de premier emploi (pour les 18 à 25 ans). Les places dans les entreprises sont
manifestement insuffisantes.7
2.2. La formation en alternance : la filière de la dernière chance
Si le CEFA est plutôt considéré comme un lieu de socialisation, c’est notamment du fait
qu’il est né en 1983 dans le cadre de la loi sur la prolongation de l’obligation scolaire de 14
ans à 18 ans. L’objectif des CEFA (appelés à l’époque CEHR, Centre de Formation à
Horaire réduit) consistait à accueillir les jeunes qui « décrochaient » de l’école et qui avaient
ainsi la possibilité d’assurer l’obligation scolaire à mi-temps : 8 15 périodes pendant 40
semaines.
Il apparaît également que les élèves qui se retrouvent dans les CEFA sont plus nombreux
que les autres élèves à provenir des quartiers défavorisés. Plus le quartier dont on est
originaire est défavorisé, plus la probabilité de se retrouver dans un CEFA est importante.
Dans les quartiers les plus défavorisés, 4,5 % des élèves de l’enseignement secondaire sont
3 ETNIC, Les indicateurs de l’enseignement, n° 3, édition 2008.
4 ETNIC, Les indicateurs de l’enseignement,op.cit.
5 ETNIC, Les indicateurs de l’enseignement, ibidem.
6 Alter Educ, Dossier 20 ans des CEFA, mai 2005
7 Alter Educ, Dossier 20 ans des CEFA, op.cit.
8 Bernard FUSULIER, Articuler l’école et l’entreprise, L’Harmattan, Coll. Logiques Sociales, Louvain-
la-Neuve, 2001
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inscrits dans un CEFA alors qu’ils ne sont que 0,6 % des élèves issus des quartiers les plus
favorisés (chiffres de 2006-2007).9 Il s’agit d’une des raisons pour lesquelles la formation en
alternance est considérée comme celle de la « dernière chance ».
« Comment devenait-on étudiant en alternance ? Il y avait les rejetés de l’école et ceux qui
rejetaient l’école ; ceux qui subissaient la culture scolaire si dominante ; ceux qui aimaient le
travail professionnel ; ceux qui voulaient brûler les étapes ; ceux qui avaient besoin d’autres
relations d’éducation »10
« Les CEFA ont (…) longtemps été vus par le plein exercice comme une filière de relégation
des élèves dont on ne voulait plus nulle part : on y envoyait socialiser le public le plus
éloigné de la norme scolaire, un public qui ne trouvait pas nécessairement sa place en
entreprise ». 11
2.3. Du tout à l’entreprise vers le tout à l’école
Pourtant, notre pays a connu un système où les entreprises étaient pratiquement les seules
institutions qui offraient une formation technique.
En matière de formation professionnelle, on est passé du tout à l’entreprise vers le tout à
l’école. Ce passage s’est réalisé en vue d’une meilleure démocratisation de l’enseignement.
Avant la dernière guerre, l’enseignement à but professionnel ne dépendait pas du Ministère
de l’Instruction Publique (qui ne reprenait que l’enseignement primaire, moyen et normal)
mais de celui de l’Industrie, devenu, en 1934, Ministère des Affaires économiques.
L’enseignement agricole dépendait du Ministère de l’Agriculture. 12
Après la dernière guerre, l’enseignement à visée professionnelle s’est rapproché des autres
catégories d’enseignement en vue d’être mieux valorisé et démocratisé : « Les ministres
socialistes qui se succèdent au poste de l’Instruction publique après 1945 défendent une
nouvelle conception de la démocratisation de l’enseignement technique : ils prônent la
démocratisation et la revalorisation de l’enseignement technique grâce à son rapprochement
par rapport à l’enseignement moyen. C’est ce qu’ils appellent la ‘normalisation’ de
l’enseignement technique. La ‘normalisation’ en s’appliquant aux structures, aux horaires,
aux niveaux et, finalement, aux programmes de l’enseignement technique doit aboutir ainsi à
créer le ‘parallélisme’ et ‘l’équivalence’ entre l’enseignement technique et l’enseignement
moyen. Voilà la solution préconisée par les socialistes de l’époque pour dépasser ce qu’ils
appellent le ‘particularisme’ de l’enseignement technique, hérité du passé. »13
Cette « centralisation » de l’enseignement technique soulève des résistances auprès
d’organisateurs de cette forme d’enseignement qui continueront à plaider pour la souplesse
et l’autonomie qui doivent caractériser ce secteur de la formation.
La séparation historique de l’école et de l’entreprise et la scolarisation de la formation
professionnelle sont le résultat, d’une part, du salariat et, d’autre part de l’industrialisation et
du développement des sciences et des techniques.14
Le salariat
9 ETNIC, Les indicateurs de l’enseignement, n° 3, édition 2008.
10 Michel VAN ZEEBROECK, Quand travail et formation scolaire se croisent : la formation en
alternance, Vivre Ensemble Education, Bruxelles, décembre 2006.
11 Alter Educ – Dossier 20 ans des CEFA, entre socialisation et qualification, mai 2005.
12 Dominique GROOTAERS, Histoire de l’Enseignement en Belgique, CRISP, Bruxelles, 1998.
13 Dominique GROOTAERS, op.cit., p 446
14 Christian MAROY, Pierre DORAY, La construction des relations écoles/entreprises, Cahier de
Recherche du GIRSEF, mai 2001.
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« L’apprentissage sur le lieu du travail est (…) typique d’un mode de production où
prédomine l’artisanat, les corporations de métier, où la relation de travail n’est pas
exclusivement définie en termes marchands mais s’inscrit dans une réelle communauté
technique et sociale ». 15
« A partir du moment où la main-d’œuvre devient mobile, la formation en entreprise
représente un investissement risqué pour le patron. Pourquoi dépenser du temps et de
l’énergie à assurer l’apprentissage d’un ouvrier qui risque ensuite d’aller valoriser ses
compétences chez un concurrent ? Ainsi, n’est-il pas étonnant de voir la formation scolaire
se développer parallèlement au salariat ».16
L’industrialisation et le développement des sciences et des techniques
« L’école technique s’est substituée à l’apprentissage essentiellement en raison des
nécessités des savoirs et savoir-faire requis par un univers productif de plus en plus marqué
par la mécanisation, puis par l’automatisation. »17
Si dans les années soixante, en période de croissance et de pénurie de main d’œuvre
qualifiée, il était nécessaire de développer la scolarisation pour répondre aux besoins de
l’économie. Dans les années septante, face à la crise économique naissante, apparaissent
les difficultés d’insertion des jeunes dans la vie professionnelle. Dans les années quatre-
vingts et nonante, la crise perdure et les questions se posent au sujet du contenu de
l’enseignement et ses liens avec le monde du travail productif (qui se transforme grâce aux
nouvelles technologies et à la mondialisation).18
(16 ans),
l’adolescent peut s’engager dans
3. Modèles de formation en alternance à l’étranger
L’Allemagne est le pays où la formation en alternance constitue un véritable système.
D’autres pays l’ont appliqué selon d’autres modèles.
3.1. Le « système dual » de formation professionnelle en Allemagne
En Allemagne, le « système dual » fonctionne depuis la dernière guerre. A partir de la fin de
la scolarité obligatoire
formation
professionnelle en alternance. La proportion de jeunes scolarisés dans des programmes
emploi-études s’élevait, en 2006, à 17 % des jeunes âgés de 15 à 19 ans et 13,5 % entre 20
et 24 ans. Il existe d’autres pays dans lesquels ces proportions sont assez élevées : la
Suisse (35,2 % et 11,4 %), l’Autriche (25,1 % et 2,2 %), la République tchèque (21,2 % et
0,9 %).19
Une des différences qui peut influencer le degré de motivation du jeune est le fait que, dans
notre pays, l’élève est soumis à l’obligation scolaire jusqu’à 18 ans contre 16 ans en
Allemagne. Alors qu’en Belgique, le jeune est pratiquement obligé de s’orienter vers
l’enseignement considéré comme celui de la « dernière chance », en Allemagne,
l’engagement d’un collégien vers la formation en alternance est plus spontanée.
Le système allemand est basé sur trois principes :
la
15 Christian MAROY, Pierre DORAY, op.cit.
16 STROOBANTS M. , Savoir-faire et compétences au travail. Une sociologie de la fabrication des
aptitudes, Bruxelles, Editions de l’ULB, 1993.
17 Christian MAROY, Pierre DORAY, op.cit.
18 DORAY P, RICARD D., « Les relations éducation-travail : quelques balises dans un océan
conceptuel », Revue des sciences de l’éducation , vol. XXI, n° 4, 1995, pp 661-688, cité par
FUSULIER Bernard dans « Articuler l’école et l’entreprise ».
19 Regards sur l’éducation 2008, Les indicateurs de l’OCDE.
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Dualité : deux journées de formation et trois jours en entreprise.
Primauté du métier : les compétences développées sont celles nécessaires à l’exercice d’un
métier et pas celles qui correspondent aux besoins spécifiques de l’entreprise « formatrice ».
Consensus : il se base sur le partenariat étroit entre le système scolaire et les entreprises.20
Ce système permet aux jeunes de s’insérer dans un lieu où le savoir acquis est reconnu et
valorisé. En Communauté française, la valorisation de la filière en alternance nécessiterait
d’augmenter le nombre de places en entreprises pour les jeunes inscrits dans les CEFA.
Le modèle allemand présente le grand avantage de valoriser la formation professionnelle.
3.2. Trois grands modèles à l’étranger
Myriam Campinos et Jean-Marc Grando comparent trois modèles 21 : le « modèle éducatif
professionnel » en Allemagne, le « modèle éducatif scolaire » en France et le « modèle
professionnel concurrentiel » en Grande Bretagne.
Le modèle professionnel concurrentiel
repose
essentiellement sur l’apprentissage et l’offre de formation est strictement liée à l’évolution
des effectifs de la profession. Le modèle est donc régulé par les fluctuations à court terme du
marché de l’emploi.
Le modèle éducatif scolaire (F) : une forte institutionnalisation se concrétise dans l’important
réseau d’établissements scolaires publics à côté de l’apprentissage.
Le modèle éducatif professionnel (RFA) : le rôle des entreprises et des interlocuteurs
sociaux est central, ce qui permet de garantir aux apprentis un accès rapide à un emploi
d’ouvrier qualifié.
Dans ce dernier modèle, l’intervention des entreprises valorise fortement l’autonomie et
débouche sur des emplois effectifs.
formation des ouvriers
(GB) :
la
4. Quelles sont
les difficultés de collaboration entre
l’école et
l’entreprise en Communauté française ?
4.1. Trois modes d’entrée
En Communauté française de Belgique, les rapprochements entre l’école et l’entreprise sont
bien difficiles compte tenu des missions différentes de ces deux institutions : la première vise
prioritairement le développement d’un individu autonome, informé et critique, tandis la
seconde a une visée utilitaire et instrumentale.
Les relations entre l’école et l’entreprise ont été analysées par Bernard Fusulier en se basant
sur trois entrées : la confiance, le sens de la justice, l’intérêt.22
20 Diane-Gabrielle TREMBLAY, Irène LEBOT, Le système dual allemand : analyse de son évolution et
de ses défis actuels, note de recherche n° 2003-4 de la Chaire de recherche du Canada sur les
enjeux socio-organisationnels de l’économie du savoir, Québec, 1999-2000.
21 Myriam CAMPINOS, Jean-Marc GRANDO, Formation professionnelle ouvrière : trois modèles
européens, in Formation emploi, n° 22, pp 5-29k 1987.
22 FUSULIER Bernard, « Articuler l’école et l’entreprise », L’Harmatan, Coll. Logiques Sociales,
Louvain-la-Neuve, Belgique, 2001.
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la bienveillance,
Entrée par la confiance :
« Les rapports entre école et entreprise ont longtemps été marqués par le soupçon (…).
Chacun avance prudemment à la rencontre de l’autre. (…) Notre hypothèse est que la
confiance institutionnelle au sein du système éducatif reste faible (peut-être est-elle en train
de se construire). La méfiance doit être levée en particulier du point de vue des acteurs
scolaires qui sont actuellement dans une position de relative insécurité par rapport aux
évolutions du système d’enseignement et qui entrevoient le risque d’une OPA (offre publique
d’acquisition) sur celui-ci par les détenteurs des moyens de production. (…) Il semble qu’une
large frange des acteurs scolaires lit en effet avec prudence et une relative méfiance les
poussées en faveur d’un rapprochement entre éducation et économie, ne fut-ce que parce
qu’ils anticipent une contradiction entre la logique civique de l’école et la logique marchande
de l’entreprise ».
Entrée par le sens de la justice :
« La relation école-entreprise met en présence des acteurs aux ‘métiers différents’ (…)
appartenant à des mondes symboliques différents. Ainsi, les métiers de la production
associent de façon privilégiée des éléments d’un monde de type ‘marchand’ et d’un monde
de type ‘industriel’ où priment le progrès, la rentabilité, l’efficacité, l’intérêt (…). Le métier de
l’éducation, de son côté, bien que de plus en plus en proie à ces valeurs, exige le
dévouement,
le sens du devoir, le désintérêt, l’équité, l’efficacité
pédagogique… »23
Entrée par intérêt :
« Au plan des intérêts, on comprend aisément qu’une entreprise trouve dans les formations
alternées un avantage particulier lorsqu’elle est en phase de recrutement, que d’autres y
voient une main-d’œuvre d’appoint ou, même, que certaines y perçoivent un moyen de
promouvoir une image positive ».
4.2. Trois modes de coordination de la coopération entre l’école et l’entreprise
Bernard Fusulier décrit aussi trois grandes formes de coordination qui structurent la
coopération entre l’école et l’entreprise : la coordination civique, industrielle et domestique.24
La coordination civique : légalité et équité lorsque l’école et l’entreprise collaborent pour
apporter aux jeunes, à la fois une formation technique mais également humaine et
citoyenne.
La coordination industrielle : division du travail et efficacité par laquelle l’école et l’entreprise
s’accordent pour « maximiser » les apprentissages.
La coordination domestique : l’apprentissage est particulièrement personnalisé.
« Voici différents indicateurs d’une coordination domestique : la complicité évidente entre les
moniteurs et les élèves, les apartés entre enseignants et techniciens, l’usage des notions de
‘gars’ ou ‘d’enfants’, les poignées de mains chaleureuses, les tutoiements, etc. » 25
La réussite d’une formation en alternance nécessite donc un certain nombre de conditions
qui devront faire l’objet des conventions entre le secteur de l’enseignement et celui de
l’entreprise comme celle qui a été signée le 25 août 2008 entre EDUCAM26, la Communauté
française et les réseaux d’enseignement :
23 FUSULIER Bernard, op. cit.
24 FUSULIER Bernard, ibidem.
25 FUSULIER Bernard, ibidem.
26 EDUCAM est le centre de formation et de connaissance créé par et pour le secteur automobile et
les secteurs connexes, qui veille au maintien à niveau des compétences et du professionnalisme.
Tél 02 778 63 30 fax 02 779 11 32 – Avenue Jules Bordet 164 – 1140 Evere
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« Les partenaires s’engagent à mettre en place un groupe de travail dont les objectifs sont :
réfléchir à des modalités visant à augmenter le nombre de places en entreprise pour les
jeunes en formation dans les CEFA ;
définir le bon seuil d’entrée en entreprise (compétences – maturité – comportements ?…) ;
réfléchir à un accueil adéquat du jeune en entreprise ;
promouvoir le système de ‘structure d’accueil’ pour les jeunes pas suffisamment prêts à
entrer en entreprise ;
réfléchir à propos du statut unique ;
bien distinguer et préciser les modalités des différents stages et périodes de formation en
entreprise (contenu – objectifs – …).
Promouvoir l’alternance auprès des différents publics cibles (entreprises – jeunes – parents
–centres d’orientation – …) et présenter les avantages de ce système ;
réfléchir à l’accès à la certification pour les différentes filières de l’alternance ;
réfléchir à des moyens pour faciliter les passerelles entre l’enseignement de plein exercice et
l’alternance. »27
Cette convention met bien en évidence la nécessité de rechercher des solutions aux grands
problèmes de la formation en alternance à savoir : le manque d’entreprises candidates,
l’accueil des jeunes et leur préparation, la promotion de l’alternance auprès des différents
publics, les passerelles entre l’enseignement de plein exercice et l’alternance.
CONCLUSIONS
Bien au-delà d’un stage, la formation en alternance constitue une filière qui offre au jeune,
deux temps et deux lieux distincts, l’un pour l’étude à l’école et l’autre pour le travail en
entreprise.
En Communauté française de Belgique, la formation en alternance est peu développée et
est encore trop souvent considérée comme la voie de la « dernière chance ». Dans la
mesure où l’obligation scolaire est imposée jusqu’à 18 ans, cette orientation est souvent
choisie (ou « subie ») par les jeunes à partir de 15 ans qui sont rejetés de l’école ou qui
rejettent celle-ci. La mauvaise réputation de cette filière provient, notamment, du fait que les
élèves qui s’y retrouvent sont plus souvent originaires des quartiers défavorisés.
Ces éléments ne favorisent pas les meilleures dispositions des jeunes à l’égard de cette
filière d’enseignement qui n’est déjà pas facile à organiser compte tenu du fait qu’elle
nécessite, par définition, une collaboration entre deux mondes bien différents : les métiers de
l’éducation (qui sont guidés par des objectifs d’efficacité pédagogique) et ceux de la
production (qui sont plutôt liés à la rentabilité). Pour surmonter ces différences, Bernard
Fusuliers propose 3 grandes coordinations entre l’école et l’entreprise : civique (pour
associer la formation technique à l’éducation humaine et citoyenne), industrielle (pour
« maximiser » les apprentissages) et domestique (pour bien accueillir le jeune).
Le « système dual » en Allemagne offre, à la fin de l’obligation scolaire à 16 ans, un
« modèle éducatif professionnel » qui assure une forte articulation de l’enseignement
au monde productif et une régulation dans le cadre de négociations entre les partenaires
sociaux.
27 Convention de collaboration entre la communauté française, les réseaux d’enseignement et
EDUCAM, le 25 août 2008 et prenant cours le 1er septembre 2009 pour 3 années scolaires.
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