INTRODUCTION :
DU TOURISME AU SYSTEME TOURISTIQUE 
1
INTRODUCTION
Générant  plusieurs  centaines  de  millions  de  déplacements  annuels,  le  tourisme  constitue  aujourd’hui  à
l’échelle  mondiale  l’une  des  activités  économiques  majeures  tant  en  termes  de  valeur  ajoutée,  de  capitaux
investis que d’emplois. Il est hasardeux d’en chiffrer l’importance car la définition opérationnelle du secteur
reste floue (confusion entre les déplacements pour motifs d’affaires et de loisirs, prise en compte de la valeur
produite par l’ensemble du secteur du voyage, … ) et que les statistiques sont entachées de nombreux biais.
Toutefois,  selon  les  estimations  de  l’Organisation  Mondiale  du  Tourisme  (OMT),  il  représenterait  près  de
12%  du  produit  intérieur  brut  mondial,  7%  de  l’investissement  et  11%  de  la  main-d’œuvre.  Le  poids
économique  du  tourisme  varie  fortement  selon  le  volume  des  flux  reçus  et  le  degré  diversification  des
structures économiques des Etats. Si sa contribution à la richesse nationale atteint rarement 5% dans les Etats
développés,  notamment  en  Belgique,  elle  peut  nettement  dépasser  ces  valeurs  dans  certains  Etats  du  Tiers
Monde,  en  particulier  dans  les  îles  touristiques.  Aux  Bahamas,  par  exemple  les  recettes  du  tourisme
international représentent 75% de la valeur des exportations de biens et services et près de 40% du produit
intérieur brut. 
Du fait de nos expériences personnelles et de nos rencontres, nous possédons tous une image intuitive de ce
qu’est ou de ce que pourrait recouvrir la notion de tourisme. Pourtant, comme le souligne Boyer (1972 : 7),
pour qui veut écrire sur le tourisme, le plus difficile est de le définir. En effet, le fait touristique, derrière son
apparente  simplicité,  se  révèle  rapidement  d’une  complexité  extrême  car  il  repose  sur  une  forme  de
déplacement  dont  les  contours  sont  particulièrement  flous  :  combien  de  kilomètres  doit-on  franchir  depuis
son  domicile  pour  être  considéré  comme  touriste,  quelles  motivations  sous-tendent  ce  déplacement,  quels
biens ou services doit-on consommer, … .  
LE TOURISME : UN CONCEPT A GEOMETRIE VARIABLE
Au  total,  le  tourisme  se  conçoit  comme  une  forme  de  mobilité  temporaire,  motivée  par  la  recherche
d’agrément, qui s’effectue en-dehors du domicile habituel, pour une durée supérieure à au moins 24 heures et
comprend  donc  au  minimum  une  nuitée.  Il  peut  s’exprimer  par  diverses  formules  de  voyages  qui  vont  du
séjour  dans  un  lieu  touristique  (pratique  sédentaire)  au  circuit  à  travers  un  territoire  plus  ou  moins  étendu
(pratique  itinérante)  (Urbain,  1993).  Ces  pratiques  peuvent  être  auto-produites  par  le  consommateur  lui-
même (sélection des destinations, réservation en individuel des prestations touristiques, voire, comme dans le
cas du camping-caraving, auto-organisation de l’hébergement) ou, au contraire, produites par des entreprises
spécialisées dans l’assemblage des prestations touristique (Cazes, 1992a).  
Le tourisme est aussi l’ensemble des activités économiques qui sont liées aux pratiques touristiques, à savoir
des prestations variées dans le domaine des services, qui portent tant sur l’accueil des visiteurs dans les zones
réceptrices (hébergement, restauration, animation, …) que sur le transport et l’encadrement de ces visiteurs
depuis  les  zones  émettrices,  ou  la  confection  et  la  distribution  de  produits  touristiques,  sans  oublier  leur
promotion par les structures d’encadrement du tourisme. 
ACTEURS, ACTIVITES ET ESPACES TOURISTIQUES
Pratiques et activités touristiques définissent un système complexe qui met en relation des espaces variés, des
acteurs  diversifiés  et  les  facteurs  socio-économiques  et  politiques  qui  infléchissent  les  uns  et  les  autres
(figure 1). Au cœur de ce système se trouve les flux (de personnes et d’argent) qui s’expriment dans le cadre
des déplacements touristiques depuis un espace émetteur vers un espace récepteur. En première lecture, ces
flux, qui résultent de la formation d’une demande touristique dans les espaces émetteurs, sont fonctions des
distances et des obstacles entre les lieux mis en relation ainsi que de l’attractivité des destinations.  
TOUR-F-408 – ECONOMIE DU TOURISME
2
”
,
:
;
<
=
;
<))
>
,
”
?
,
!
<
"
,
!
@
,
A
C
A
,
D
B
A
"
,
:
;
<
=
;
<))
>
,
”
?
,
!
<
"
,
!
@
,
A
A
,
"
B
A
!"#$%&'0&%%+0)%+,-&'.,44)(+5&'G -H&4";'%5(&"0&E%1
!)(+505 -)(,-&
!"#$%&'9&4')%6,/+4*&4'
4E"%,7/,0+)/,EK
I/0%&"%+4&4'
"%+:5&4
! A)E%+40+FE&4
! J)/7A)E%;
!0%E(0E%&4
&/(,9%&*&/0
7 A)E%;
7 J)/7A)E%
I0,0
! !;I;'A)E%;
! !;I;'J)/7A;
?%6,/4+*&4'
%56+)/,EK
! LI
! <;
?%6,/4+*&4'
*)/9+,EK
! ?MA
! <;
=1>/)(+'”,
2/0*’?'(+'”,
8:/’;$#$,+
<",&+'",,$#$,+-
.%"#"+'",
+"/%'*+':/$
=1>/)(+'”,–
2+’#/)(+'”,
=1>/)(+'”,-
!”#$%&
!”#$%&
?
I
@
B
”
;
>
<*#
(4('E21
@/'-&2#&$1)
*05'0-15
F8
7
8
9
71((#0-*1()
'#0-&('&G01(
,HH-1)
1HH1*'&61
?$H-/('-8
'#0-&('&G01(
-
.
/
0
1
2
3
!
4
5637'8!'093.140!4
5637':9;!0/1.!4
N#$*'&#$))O
! %1()%&('/$*1()J'123(P)*#Q'M
! %1()%&HH+-1$'&15()J+*#$8P)
3#5&'&G01(P 3(4*R#!*05'0-1551M)
! %1()-&(G01(
D/--&E-1()JK
5L1$'-+1M
D/--&E-1()JK
5/)(#-'&1M
"#$%&'&#$()
(#*&#!+*#
"4*51)%1)6&1
)&**&+,
!"#$%&'(()&**&+,
!"#$%&'
,-./$&(/'&#$)
%0)'123(
713-+(1$'8)
&$%&6 9
*#551*'8
%&#*&+,
..((%&#*&+,
8:/';$#$,+
<",&+'",,$#$,+-
21)$&+'",3-
4,5$*+'**$#$,+
!",+%6)$
!"#$%&'()**&%(+,-&'.+/0&%/,0+)/,-&1
2#,3/&4'
+/056%5&4
7 #80&-+$%&4
7 9& 9+:&%0;
!<;;''
2)*",6/+&4
9&'0%,/4")%0
7 =5%+&//&4
7 >&%%):+,+%&4
7 <
?%6,/+4*&4
9&':)@,6&
7 A;?;
7 =;B;;
7 <
C%&40,0,+%&4
9&'4&%:+(&4
7 DE%;'50E9&4
7 D,/FE&4
7 ;;;
!"##$%&'()'*(+'",-
./0)'&'+1
 
Figure 1 :  Le système touristique. 
Légende :  Les termes en gras minuscule représentent les espaces mis en relation par le tourisme, ceux en 
GRAS  MAJUSCULE  les  flux  générés  par  le  tourisme,  ceux  en  italiques  les  acteurs  qui  infléchissent  les 
échanges touristiques et en italiques leurs modalités d'intervention, ceux soulignés les principaux facteurs de 
flux touristiques. MET signifie "Mise en tourisme", qu comprend  l'invention des ressources touristiques, leur 
équipement et la médiation entre ces ressources et le public.  
Dans les espaces émetteurs, la demande touristique dépend à la fois des rythmes sociaux, en particulier de la 
durée et la répartition du temps de travail, du revenu disponible et des représentations collectives en vigueur 
à propos des usages du temps libre. Elle varie fortement, dans son intensité et sa nature, selon le statut socio-
économique des ménages et les étapes de leur cycle de vie : les taux de départ en vacances sont plus élevés 
pour les adultes murs (35-45 ans), disposant d'un revenu élevé et d'un capital culturel important.    
Les  distances  (exprimées  en  temps,  coût  de  déplacement  ou  en  termes  d'altérité  socio-culturelle)  pèsent 
lourdement  sur  le  volume  des  flux  touristiques.  Il  en  résulte  une  structuration  des  espaces  touristiques  en 
grands bassins disposés de manière grossièrement concentrique autour des principaux foyers émetteurs que 
sont l'Europe occidentale, l'Amérique du Nord et, dans une moindre mesure, le Japon et l'Australie. Comme 
le rappelle l'actualité récente, les flux sont également fonction des risques perçus ou effectifs qui pèsent sur le 
déplacement vers / ou le séjour dans un espace récepteur. Ces risques de déclinent classiquement en risques 
sanitaires  et  politiques,  les  seconds  occupant  une  place  grandissante  dans  le  choix  des  destinations  de 
vacances.  Enfin,  les  flux  dépendent  également  des  règles  édictées  par  les  Etats  émetteurs  pour 
éventuellement endiguer l'émission touristique intra et ou internationale et des mesures mises en œuvre par 
les Etats récepteurs pour limiter l'accueil des visiteurs. 
Enfin,  l'orientation  des  flux  touristiques  dépend  de  l'attractivité  différentielles  des  espaces  récepteurs. 
Souvent  mesurée  à  l'aune  de  la  seule  présence  de  ressources  rares  (plages  ensoleillées,  mers  chaudes, 
patrimoine culturel de qualité, …), l'attractivité des espaces touristiques est en fait une construction sociale, 
TOUR-F-408 – ECONOMIE DU TOURISME 
 3 
qui  résulte  de  l'interprétation  de  la  qualité  des  lieux  par  les  touristes  eux-mêmes,  les  populations  qui  les 
accueillent et les acteurs du secteur touristique (Equipe MIT., 2002). 
Ces  derniers  se  divisent  classiquement  en  deux  sphères  :  la  sphère  commerciale  et  la  sphère  territoriale 
(Cazes, 1992a). La première regroupe les différents acteurs qui suscitent, organisent, encadrent, acheminent 
et accueillent les consommateurs touristiques. Y figurent notamment les compagnies de transport, les chaînes 
intégrées dans le secteur de l'hébergement, de la restauration ou de l'animation, les entreprises et réseaux de 
production  et  de  vente  de  voyages,  ainsi  que  les  sociétés  qui  leur  fournissent  des  services  (études  de 
faisabilité, publicité, …) ou des capitaux. Les acteurs de la sphère commerciale exercent une influence forte 
sur  les  espaces  récepteurs  :  ils  en  assurent  la  sélection,  sur  base  essentiellement  de  critères  économico-
techniques  (bonne  accessibilité,  infrastructures  performantes  d'hébergements,  main-d'œuvre  qualifiée, 
stabilité  économique  ou  politique,  …),  y  réalisent  des  investissements  parfois  substantiels  et  y  imposent 
diverses formes de contrôle (définition de normes de qualité, pression à la baisse sur les prix, sélection stricte 
de  la  main-d'œuvre,  …).  Ils  jouent  également  un  rôle  important  dans  les  espaces  émetteurs,  tant  par  la 
publicité qu'ils font de leur produits – et donc, indirectement des destinations qui en sont le support – que par 
la commercialisation de ces mêmes produits.    
  
La  sphère  territoriale  quant  à  elle  regroupe  les  acteurs  locaux  du  tourisme  dans  les  espaces  récepteurs,  à 
savoir,  d'une  part,  les  entrepreneurs  privés  ou  les  associations  qui,  sans  être  intégrés  dans  la  sphère 
commerciale,  offrent  des  prestations 
touristiques  ou  para-touristiques  (hébergement,  restauration, 
commerces,  organisation  de  visites,  …)  et,  d'autre  part,  les  structures  d'encadrement,  publiques  ou 
parapubliques, du secteur touristique (collectivités locales et régionales, Etat) qui sont amenées à définir les 
règles économiques, sociales et urbanistiques en vigueur dans le champ du tourisme, à financer et organiser 
l'aménagement  des  zones  touristiques  tout  en  assurant  des  fonctions  de  promotion  dans  les  espaces 
émetteurs.  
 
 
* * 
* 
TOUR-F-408 – ECONOMIE DU TOURISME 
 4 
 
CHAPITRE I : 
LA FORMATION DES FLUX 
LA  DISPONIBILITE  DE  TEMPS  LIBRE  :  UNE  CONDITION  NECESSAIRE  DU 
TOURISME 
Une condition est un état, une situation, un fait dont l'existence est indispensable pour qu'un autre état, 
au autre fait existe (Petit Robert). Une condition ne peut s'apparenter à une cause. En effet, si une condition 
fait partie de l'environnement d'un état ou d'un fait, elle n'en pas pour autant la cause. En conséquence, il faut 
admettre qu'un phénomène est produit par une cause sous certaines conditions ou que dans un ensemble de 
déterminations,  l'une  est  censée  être  la  cause  (ce  qui  est  à  l'origine)  alors  que  les  autres  ne  sont  que  les 
conditions. 
Sans temps libre, pas de tourisme. En effet, pour entreprendre un voyage d'agrément, il est nécessaire d'avoir 
du temps. Derrière ce truisme, se cache une réalité complexe, car si la durée et la répartition du temps libre 
dépendent d'abord de la législation et / ou des réglementations professionnelles en vigueur, elle est également 
fonction du statut socio-professionnel des individus. Par exemple, l'intervention croissante de l'Etat dans la 
sphère  des  relations  entre  les  travailleurs  et  les  entreprises  s'est  traduite  par  la  mise  en  oeuvre,  puis 
l'extension,  des  congés  payés  à  date  déterminée.  En  ce  sens,  elle  a  largement  élargi  le  volume  de  touristes 
potentiels.  A  l'inverse,  les  rythmes  de  travail  dans  certains  secteurs  d'activité,  par  exemple  l'agriculture, 
interdisent de consacrer de longues plages de temps au loisir ou au tourisme.  
De  manière  plus  générale,  la  durée  du  "temps  contraint"  ou  "temps  semi-libre"  (déplacements  domicile-
travail,  tâches  d'entretien,  d'auto-construction,  de  travail  clandestin,  …)  varie  sensiblement  d'une  catégorie 
sociale  à  l'autre.    En  France,  par  exemple,  plusieurs  indicateurs  soulignent  que  le  temps  contraint  diminue 
lorsque le statut social augmente. C'est ainsi que le temps pris pour faire la cuisine est plus de deux fois plus 
court chez les femmes de cadre que chez les femmes d'ouvrier. Des écarts comparables se rencontrent en ce 
qui concerne le temps de travail ménager. En effet, les appareils ménagers qui permettent de réduire le temps 
nécessaire  consacré  à  l’organisation  du  repas  comme  le  lave-vaisselle,  le  congélateur  ou  le  four  à  micro-
ondes  se  sont  diffusés  très  lentement  parmi  les  familles  populaires,  contrairement  aux  appareils  comme  la 
télévision  et  le  magnétoscope,  ou  l’on  observe  peu  d’effet  de  catégorie  sociale.  A  peine  1/4  des  familles 
populaires sont équipées d’un lave-vaiselle à la mi 1990, contre près de 2/3 des familles de cadres. Près de la 
moitié  des  familles  de  cadres  disposent  d’un  four  à  micro-ondes  contre  à  peine  20%  des  employés  et  des 
ouvriers et 8% du personnel de service.  
De plus, la part du temps libre sensu stricto consacré à la pratique réelle du loisir est également contrôlée par 
l'appartenance sociale. En effet, le temps consacré à des activités choisies en dehors des normes, des rites et 
des  tâches  imposées  ou  contrôlées  par  des  institutions  religieuses  ou  politiques  varie  selon  les  catégories 
sociales. 
Temps de vie et temps libre en France (en heures) – Selon J. Viard (2006) – Pour le travail, est pris en 
compte une carrière complète, qui dans les conditions contemporaines donne droit à une pension pleine.  
 
1900 
1950 
2002 
Espérance de vie 
500.000 
600.000 
700.000  
Etudes 
Travail 
5.000 (1%) 
15.000 (2%) 
30.000 (4%) 
195.000 (39%) 
125.000 (21%) 
65.000 (9%) 
Sommeil 
200.000 (40%) 
210.000 (35%) 
225.000 (32%) 
Temps libre 
100.000 (20%) 
250.000 (42%) 
380.000 (54%) 
TOUR-F-408 – ECONOMIE DU TOURISME 
 5 
 
LES FACTEURS DU DEPLACEMENT TOURISTIQUE 
Le non-départ peut résulter d’un choix personnel : la série consacrée l'été 1998 “aux vacances à domicile” 
par  le  quotidien  Libération  présentaient  des  amoureux  de  leur  domicile  ou  de  leur  ville,  qui  souhaitaient  à 
tout prix éviter les autoroutes surchargées et les plages bondées. En France, selon l'enquête permanente sur 
les  conditions  de  vie  réalisée  en  1999,  en  moyenne  1  personne  sur  5  qui  ne  sont  pas  parties  en  vacances 
mentionne qu'il s'agit d'un choix délibéré. La part des non-départs par choix varie en fonction de l'âge : elle 
est inférieure à la moyenne chez les 20 – 39 ans (minimum = 10 % pour les personnes âgées de 25 à 29 ans) 
et supérieure aux âges plus élevés (maximum = 31 % pour les personnes âgées de 60 à 64 ans).  
Le non-départ est donc avant tout le fruit d’une contrainte, d’un handicap. En Europe, les personnes qui ne 
sont pas parties invoquent le plus souvent des raisons financières. L'enquête française sur les conditions de 
vie montre ainsi que le facteur financier est mentionné en moyenne par 37% des non-partants, avec de fortes 
variations selon l'âge : la proportion dépasse 45% en-deçà de 60 ans et reste inférieure à 30% aux âges plus 
élevés. Les autres raisons invoquées en cas de non-départ sont respectivement les contraintes familiales (18% 
en France), médicales (10%) et professionnelles (8%), avec à nouveau de fortes variations selon l'âge.  
FACTEURS ECONOMIQUES 
Faire  du  tourisme  exige  de  disposer  de  ressources  financières.  En  effet,  les  dépenses  de  vacances  ne  pas 
négligeables. En 1999, en France, 35 % des ménages partis déclaraient avoir dépensé entre 150 et 750 € pour 
leurs vacances d'été, et autant entre 750 et 2.250 €. Pour les vacances d'hiver, 45% des ménages déclaraient 
avoir dépensé entre 150 et 750 € et 28 % entre 750 et 2.250 €.  
En  dépit  de  sa  démocratisation,  le  tourisme  n'est  pas  encore  accessible  à  tous,  loin  s'en  faut.  Trop  souvent 
encore, les dépenses consacrées à la satisfaction des besoins élémentaires (nourriture, logement, habillement) 
engloutissent  la  majeur  partie  du  revenu.  De  ce  point  de  vue,  il  faut  rappeler  la  "loi"  d’Engel,  du  nom  du 
statisticien  allemand  qui  l’a  formulée  le  premier  dès  les  années  1950.  Selon  Engel,  la  part  des  dépenses 
nécessaires  et  incompressibles  (i.e.  sans  arbitrages  possibles  a  sein  du  ménage,  voir  par  exemple  la 
distinction  entre  dépenses  pour  le  déplacement  domicile-travail  et  celles  pour  une  sortie  le  week-end)  est 
inversement  proportionnelle  au  montant  du  budget  disponible  :  elle  tend  à  croître  lorsque  le  total  des 
dépenses décroît et, inversement, à diminuer lorsque le montant du budget augmente. Les données récentes 
témoignent de l’actualité de cette observation : la proportion des dépenses incompressibles est de l’ordre de 
50% pour les ménages d’ouvriers et d’agriculteurs (dépenses totales comprises entre 110 et 125.000 FF) et 
seulement  de  l’ordre  de  30-35%  pour  les  ménages  de  gros  indépendants  et  de  cadres  supérieurs  (dépenses 
totales  comprises  entre  230  et  265.000  FF).  Cela  s’explique  notamment  par  les  dépenses  alimentaires.  Ce 
sont  les  plus  incompressibles  de  toutes,  celles  que  tout  ménage  doit  nécessairement  et  quotidiennement 
assumer, quel que soit son budget global. Comme le souligne A. Bihr et R. Pfefferkorn, on peut sans doute 
rogner  sur  elles,  mais  pas  au-delà  d’un  certain  seuil,  à  moins  de  compromettre  la  santé  et  l’avenir  des 
membres  du  ménage.  Inversement,  quand  le  revenu  disponible  croît  et  que  les  dépenses  de  consommation 
courantes peuvent elles-même augmenter en conséquence, un ménage peut certes "améliorer l’ordinaire" … 
mais chacun de ses membres n’en a pas moins un seul estomac. En conséquence, les dépenses d’alimentation 
croissent moins vite que l’ensemble des dépenses : leur part est donc d’autant plus réduite que le budget du 
ménage  est  élevé  (entre  21  et  26%  pour  les  ouvriers  et  les  agriculteurs;  entre  11  et  13%  pour  les  gros 
indépendants et les cadres supérieurs).  
Cet aspect de la structure des budgets des ménages est fondamental. En effet, lorsque la part des dépenses 
incompressibles est élevée, le montant des dépenses "élastiques" est faible. Du même coup, les possibilités 
d’opérer des arbitrages, des choix, entre les différents postes budgétaires se restreignent. Car économiser sur 
un  tel  poste  au  profit  de  tel  autre  n’est  possible  (objectivement)  et  n’a  de  sens  (subjectivement)  qu'à  la 
condition  que  cette  économie  ne  réduise  pas  le  poste  amputé  à  la  portion  congrue  et  permette  un  gain 
substantiel par ailleurs. Un exemple permet de comprendre ces mécanismes. En 1989, un ménage de cadre 
supérieur  a  dépensé  en  moyenne  22.100  FF  sur  le  poste  "habillement".  S’il  avait  choisi  de  restreindre  ses 
dépenses  sur  ce  poste  de  50%,  celles-ci  n’en  seraient  pas  moins  restées  supérieures  à  celles  d’un  ménage 
d’ouvrier au cours de cette même année (11.800 contre 9.000 FF) Avec les économies réalisées, il aurait pu 
TOUR-F-408 – ECONOMIE DU TOURISME 
 6 
augmenter  de  55%  ses  dépenses  en  faveur  des  “sorties  et  vacances”.  Pour  atteindre  de  pareils  résultats,  un 
ménage  d’ouvrier  aurait  dû  réduire  ses  dépenses  d’habillement  à  450  FF  par  mois,  autant  dire  à  sacrifier 
presque entièrement ses dépenses pour ce poste. Bref un véritable ascèse.  
En un mot, pour les uns, économiser sur un poste au profit d’un autre est possible. Pour les autres, cela n’est 
possible qu’au prix de rudes sacrifices, voire tout simplement impossible. On est le plus souvent contraint de 
vivre au jour le jour, bon an mal an, sans grande capacité à anticiper sur l’avenir. Il ne faut chercher plus loin 
l’explication de l’imprévoyance paradoxale des pauvres, souvent dénoncées par les travailleurs sociaux. 
Il importe que l'état de santé du touriste potentiel soit satisfaisant . Autrement dit, la maladie et l'incapacité 
physique peuvent constituer des obstacles insurmontables.  
FACTEURS MEDICAUX 
FACTEURS DEMOGRAPHIQUES 
L'âge ou, de manière plus générale, la position dans la cycle de vie joue également un rôle important. Avoir 
des  enfants  en  bas  âge  par  exemple  peut  constituer  un  sérieux  handicap  lorsqu'il  s'agit  d'entreprendre  un 
voyage.  A  l'inverse,  l'accès  à  la  retraite  permet,  dans  certaines  catégories  sociales,  de  réaliser  enfin  un 
voyage. 
FACTEURS SOCIAUX 
Les  recherches  sur  la  consommation  privée  montrent  que  lorsque  deux  catégories  sociales  différentes 
peuvent  consacrer  à  la  consommation  des  sommes  voisines,  elles  ne  les  affectent  pas  au  même  bien.  Une 
comparaison des budgets moyens de ménages français des différentes catégories sociales, à montant global 
de consommation a peu près égal, donc à des dates différentes, est très révélatrice à cet égard. Elle indique 
notamment qu'à niveau de vie égal, un ménage de cadre supérieur consacrait trois fois plus à ses dépenses 
culturelles  en  1951  qu'un  ménage  d'ouvrier  qualifié  en  1971.  La  différence  est  d'autant  plus  nette,  qu'entre 
ces deux dates, le marché des biens et services culturels ou touristiques a connu une formidable extension. Il 
s'agit là d'une preuve que les dépenses de culture et loisirs font partie des priorités des catégories aisées, mais 
pas des groupes moins favorisés (qui consentent des dépenses plus importantes d'apparence sociale [soins et 
hygyène, habillement, … et équipement du logement]).  
SYNTHESE 
Au total, la capacité à voyager dépend pour l'essentiel du statut social et professionel  de  chaque individu : 
elle traduit l'appartenance sociale. Il en résulte que les taux de départ en vacances varient très fortement selon 
les  catégories  socio-professionelles.  En  France,  par  exemple,  les  membres  des  catégories  populaires  se 
situent en-dessous de la moyenne : plus des deux tiers des agriculteurs ne sont pas partis en 1992, de même 
que près de la moitié des ouvriers et des personnels de service. Les catégories moyenne se situent plutôt à un 
niveau intermédiaire : un peu plus du tiers des employés et des patrons de l’industrie et du commerce ne sont 
pas partis en 1992. Au contraire, les cadres moyens partent presque aussi souvent que les cadres supérieurs et 
les professions libérales : 20% des premiers et 10% des seconds seulement ne sont pas partis en vacances en 
1992. L’analyse de données rétrospectives montre cependant que les écarts ont eu tendance à se réduire : en 
1964,  les  cadres  supérieurs  et  les  professions  libérale  partaient  en  vacances  presque  aussi  souvent 
qu’aujourd’hui, en revanche, les agriculteurs, les petits patrons et les ouvriers partaient nettement moins. 
 
 
* * 
* 
TOUR-F-408 – ECONOMIE DU TOURISME 
 7 
CHAPITRE II :  
L'ATTRACTIVITE TOURISTIQUE 
 
INTRODUCTION 
Comme nous le verrons au chapitre X, les flux touristiques se répartissent de manière très inégale à la surface 
de la terre. De toute évidence, il existe des régions attractives, d'autres qui le sont moins et d'autres enfin qui 
ne le sont pas du tout. 
Lorsqu'il s'agit de comprendre pourquoi certains lieux sont devenus touristiques et pourquoi parmi ces lieux 
certains sont davantage fréquentés que d'autres, la littérature scientifique évoque généralement la présence de 
ressources rares et exceptionnelles. L'hypothèse sous-jacente est que chaque lieu a des qualités intrinsèques, 
objectivables, qui conditionneraient sa touristicité (potentialité d'attrait touristique d'un territoire) et agiraient 
de façon déterminée sur les flux. 
LES RESSOURCES TOURISTIQUES 
Les  recherches  consacrées  à  l'attractivité  touristique  distinguent  en  général  trois  types  de  ressources  :  les 
ressources primaires, secondaires et complémentaires. Les premières comprennent l'ensemble des lieux (site 
naturel,  église,  musée,  aquarium,  …),  activités  (brocante,  festival,  …)  ou  caractéristiques  (ensoleillement, 
paysage,  gastronomie,  …)  d'un  territoire  qui  sont  objets  de  tourisme,  autrement  dit  qui  motivent  le 
déplacement depuis le lieu de résidence habituel à des fins de loisir et jouent donc un rôle déclencheur pour 
les pratiques touristiques. Les ressources secondaires rassemblent pour leur part les éléments (lieux, activités, 
caractéristiques) d'un territoire au service d'un tourisme déclenché par les ressources primaires et qui ne sont 
pas  au  service  des  résidents.  Elles  comprennent  pour  l'essentiel  des  éléments  ayant  trait  à  l'accessibilité 
(information, fléchage, stationnement, …), à la restauration et à l'hébergement. Les ressources ou éléments 
complémentaires, enfin, étoffent la gamme des services offerts aux touristes. Elles consistent notamment en 
commerces, espaces verts ou rues piétonnes.  
A mon sens, il convient de limiter la notion de ressources touristiques aux seules ressources primaires, qui 
motivent le déplacement. En effet, les ressources dites secondaires et complémentaires relèvent d'une toute 
autre  logique,  celle  de  rendre  possible  et/ou  faciliter  le  déplacement  vers  et  le  séjour  dans  une  destination 
donné.  En  ce  sens,  elles  constituent  des  conditions  de  réalisation  du  tourisme,  conditions  qui  seront 
présentées  plus  loin.  Dans  certaines  circonstances,  ces  éléments  peuvent  toutefois  devenir  des  ressources 
touristiques  à  part  entière.  C'est  le  cas  de  certains  hôtels  de  luxe  à  l'architecture  soignée,  de  certains 
restaurants prestigieux ou encore d'espaces commerciaux hors normes.     
1.1.  LES MOBILES DU DEPLACEMENT  
Les recherches sur les ressources touristiques primaires sont peu nombreuses et souvent fastidieuses. Elles se 
présentent  le  plus  souvent  sous  forme  d'énumérations  ou  de  listes,  sans  plus.  Aucune  tentative  de  synthèse 
n'existe en la matière, sauf dans le cas des ressources climatiques.  
L'analyse  des  ressources  touristiques  primaires  s'appuie  fréquemment  sur  une  distinction  entre  ressources 
naturelles et artificielles. Les premières comprennent des éléments topographiques, des éléments aquatiques 
(mer,  cours  d'eau  et  plans  d'eau,  pluie,  …),  des  éléments  solides  (neige,  glace),  des  éléments  aériens 
(température,  vent,  lumière,  couleurs,  ciels,  luminosité,  …)],  la  flore  et  la  faune  ainsi  que  les  paysages 
résultant de la combinaison des éléments précédents. Les secondes rassemblent tous les éléments créés par 
les sociétés humaines et qui sont devenus objets de tourisme.  
La distinction entre ressources naturelles et artificielles n'est plus pertinente à l'heure actuelle. En effet, elle 
repose sur une vision dichotomique et caricaturale de la Nature et de la Société : l'une et l'autre sont conçues 
comme des entités disjointes, relevant de processus autonomes. Aujourd'hui émerge enfin l'idée qu'il ne peut 
y  avoir  de  Nature  en  dehors  du  regard  de  l'Homme  ou  plus  exactement  des  sociétés  :  aucune  nature  n'est 
TOUR-F-408 – ECONOMIE DU TOURISME 
 8 
jamais vierge, puisque notre regard n'est jamais vide  (Roger, 1978). La Nature est donc, au même titre que 
la Culture, une production sociale : elle procède de la construction du regard sur elle, de sa mise en désir, …  
Dans  leur  manuel  de  géographie  du  tourisme,  J.-M.  Dewailly  et  E.  Flament  proposent  d'établir  une   
distinction  entre  éléments  non  créés  à  des  fins  touristiques  et  éléments  créés  à  des  fins  touristiques.  Les 
premiers sont des lieux, activités ou caractéristiques d'un territoire qui, avant de devenir objets de tourisme, 
étaient  investis  ou  utilisés  pour  d'autres  usages.  Dans  ce  cas,  lorsque  les  fonctions  initiales  se  perpétuent, 
plusieurs  usages  différents,  voire  antagonistes,  peuvent  coexister,  ce  qui  se  traduit  fréquemment  par  des 
conflits  entre  utilisateurs.  Les  éléments  non  créés  à  des  fins  de  tourisme  recouvre  largement  la  notion  de 
patrimoine, qu'il soit naturel (voir liste ci-dessus)ou culturel, ce dernier pouvant être matériel (espaces bâtis 
et  aménagés,  mobilier,  costumes,  gastronomie,  …)  ou  immatériel  (langue,  folklore  et  fêtes  diverses,  …). 
Pour la plupart, il s'agit de biens ou de pratiques héritées du passé auxquels les contemporains accordent une 
valeur suffisante pour qu'elle donne lieu tant à des mesures de protection / conservation qu'à une ouverture au 
public.  
Les  ressources  créées  à  des  fins  de  tourisme  rassemblent  des  éléments  du  territoire  conçus  à  l'origine  en 
fonction d'un usage touristique et qui, bien qu'éventuellement accessibles aux locaux, ne prennent leur sens 
complet  qu'avec  cet  usage.  Peuvent  être  mentionnés,  les  équipements  culturels  et  récréatifs  aménagés  dans 
les  stations  thermales  ou  balnéaires  (casinos,  night-clubs,  théâtres,  salles  de  concert,  …),  les  équipements 
sportifs  les  parcs  d'attractions  et  autres  complexes  de  loisirs  aquatiques,  voire  les  opérations  de  rénovation 
urbaine incorporant une volonté de développement touristique (fronts d'eau, quartiers sauvegardés, …).  
Les éléments d'un territoire qui sont objet de tourisme peuvent à la fois constituer une ressource et influencer 
la vie touristique en lui offrant des conditions plus ou moins favorables, voire dans certains cas en s'imposant 
comme  contrainte  ou  contre-ressource.  En  Thaïlande,  par  exemple,  la  prostitution  constitue  à  la  fois  une 
ressource  touristique,  car  elle  est  susceptible  de  déclencher  une  pratique  touristique,  et  une  contrainte,  car 
elle favorise la diffusion du SIDA et amoindrit en ce sens le potentiel touristique. 
1.2.  LA MISE EN TOURISME : LA CONSTRUCTION SOCIALE DES RESSOURCES TOURISTIQUES  
La  littérature  consacrée  aux  ressources  touristiques  tend  à  masquer  un  fait  essentiel  :  la  présence  en  un 
endroit d'éléments supposés être attractif ne suffit pas à donner naissance à un lieu touristique. On pourrait 
facilement montrer en effet qu'il existe parmi les espaces bénéficiant des fameuses ressources ou "matières" 
plus de lieux vides de touristes que de lieux fréquentés. A l'inverse, il est aisé de mettre en évidence que des 
lieux mal pourvus en lesdites ressources furent investis plus précocement par le tourisme que des lieux mieux 
pourvus.  C'est  ce  que  constate  Charles  Mignon  (1981)  à  propos  de  l'Andalousie  :  la  côte  de  Malaga  est  la 
moins  ensoleillée  du  sud  de  l'Espagne,  c'est  pourtant  là  qu'apparurent  les  premiers  hôtels.  De  la  même 
manière,  comme  le  montre  l'exemple  du  développement  touristique  de  la  Thaïlande,  la  croissance  de  la 
fréquentation  dans  une  destination  n'est  pas  subordonnée,  loin  s'en  faut,  aux  qualités  intrinsèques  des 
ressources qu'elle offre.  
Pour traiter de l'attractivité touristique il ne suffit donc pas de se placer du point de vue des lieux – et de leurs 
soi-disant  qualités  intrinsèques -,  il  convient  aussi  d'adopter  le  point  de  vue  des  acteurs  et  de  leurs  projets. 
Dans cette optique, l'attractivité touristique est le résultat d'une (ré)interprétation, par les touristes eux-mêmes 
et les acteurs des sphères commerciale et territoriale du tourisme des qualités des lieux. 
 
 
* * 
* 
TOUR-F-408 – ECONOMIE DU TOURISME