Repères revendicatifs
Fiche n° 15 : Droit à l’éducation
et à la formation professionnelle
La CGT propose…
Un droit à l’éducation permanente pour une formation émancipatrice
tout au long de la vie.
Ce droit doit permettre de construire un continuum (1) de formation en s’appuyant sur une formation
initiale solide pour tous et permettant une élévation du niveau des qualifications. C’est nécessaire pour
l’individu, pour la Nation et pour le développement économique.
L’éducation et la formation initiale doivent permettre :
• de devenir un adulte libre et responsable ;
• de s’insérer dans la vie sociale, de se réaliser pleinement en tant que personne, en tant que citoyen ;
• d’élargir son horizon culturel ;
• d’atteindre le plus haut niveau d’éducation rendu possible, à chaque étape historique de la société,
par les progrès de l’économie, de la science et de la technologie ;
• de s’ouvrir à la connaissance et à la pratique des arts, des sports et à la culture scientifique ;
• d’acquérir les savoirs, les raisonnements et les méthodes permettant d’apprendre par soi-même
et de se former tout au long de sa vie.
Le système éducatif doit retrouver son sens de service public national avec toutes ses valeurs, notam-
ment celles de gratuité, d’égalité d’accès et de droits, de laïcité (2).
C’est le sens de l’implication de la CGT pour la protection, le droit à la scolarisation de tous les enfants.
La dimension nationale du service public d’Éducation, sa gratuité, sa proximité géographique par un
maillage territorial équilibré en sont des éléments essentiels.
(1) Une continuité entre formation initiale et continue d’où un continuum, incluant droits et garanties, pour répondre notamment aux ques-
tions de formation en alternance, combinant savoirs scolaires et savoirs expérimentaux, droit à la formation initiale différée et validation des
qualifications acquises par l’expérience dans une activité sociale, professionnelle ou bénévole. Dans le droit fil de notre proposition d’un
nouveau statut du travail salarié et de sécurité sociale professionnelle.
Voir repères revendicatifs, fiches 6 et 7.
(2) Voir repères revendicatifs, fiche 30
REPÈRES REVENDICATIFS — FÉVRIER 2018
1
La formation professionnelle initiale
Elle doit assurer à chacune et à chacun une formation générale, scientifique, technologique, technique
lui permettant :
• d’acquérir une qualification professionnelle et une certification reconnue nationalement et inscrite
au répertoire national des certifications professionnelles et garantissant la valeur nationale des
diplômes ;
• de s’insérer durablement dans un emploi correspondant à sa qualification et d’évoluer profession-
nellement ;
• d’appréhender la diversité des situations de travail qu’il rencontrera dans cet emploi.
La formation continue (générale et professionnelle)
La formation professionnelle continue et l’éducation permanente doivent être accessibles à toutes
et à tous, quels que soient l’âge, le sexe, le niveau d’étude, la période de la vie, l’emploi occupé et la
taille de l’entreprise, ce qui implique :
• qu’elle soit réalisée sur le temps de travail et rémunérée comme tel ;
• un droit de la, du salarié-e, en emploi ou privé d’emploi, à l’accueil, l’information et l’orientation
tout au long de sa vie, l’identification de ses besoins de formation et la définition de son projet
professionnel ou personnel ;
• un droit d’accès et d’accompagnement gratuit à la validation des acquis de l’expérience ;
• un droit individuel à la formation, à l’initiative du salarié, transférable, garanti collectivement et
financé par les employeurs ;
•
la reconnaissance professionnelle et salariale de la qualification acquise (3) ;
• une priorité d’accès à la formation aux salariés les plus exclus (femmes, travailleurs faiblement
qualifiés, salarié-e-s en temps partiel et en situation précaire, en situation de handicap, immigrés,
salarié-e-s dont la formation initiale a été interrompue) ;
• que la lutte contre les situations de l’illettrisme déclarée grande cause nationale en 2013 dispose
des moyens nécessaires partout sur le territoire ;
• une reconnaissance du droit à la formation syndicale permettant à chacun d’être pleinement citoyen
dans l’entreprise.
(3) Voir repères revendicatifs, fiches 6 et 14.
2
REPÈRES REVENDICATIFS — FÉVRIER 2018
CE QUI EXISTE AUJOURD’HUI
L’éducation et la formation initiale
« La Nation garantit l’égal accès de l’enfant et
de l’adulte à l’instruction, à la formation profes-
sionnelle et à la culture. L’organisation de l’ensei-
gnement public gratuit et laïque est un devoir
de l’État » (extrait de la constitution française de
1946).
Le fort développement quantitatif des années
80 a permis une élévation continue des niveaux
de formation et a donc contribué à une certaine
réduction des inégalités scolaires, mais cela ne
s’est pas traduit par une réelle démocratisation
du système éducatif.
Prenant mal en compte les diversités, celui-ci ne
contribue pas à résorber les inégalités sociales ;
il tend à les reproduire, voire à les exacerber.
Ainsi, en l’espace de vingt ans, l’accès aux études
supérieures a plus que triplé pour les enfants
d’ouvriers. Mais il ne concerne aujourd’hui que
30 % d’entre eux contre 80 % des enfants de
cadres qui, en outre, poursuivent plus souvent
jusqu’au diplôme.
En 2008, 11,8 % des jeunes de 18 à 24 ans sor-
taient prématurément de l’école ne dépassant pas
le 1er cycle du secondaire et ne suivant aucune
formation (source EC).
Malgré une baisse particulièrement nette, les
enfants d’ouvriers sont encore 23 % à être
dépourvus de diplôme contre 7 % pour les enfants
de cadres. Le risque de chômage des jeunes sans
diplôme reste particulièrement élevé, en 2008 il
était estimé à 48 %.
Le diplôme est un facteur déterminant d’insertion
professionnelle, il augmente les chances d’ac-
céder rapidement à un emploi et de progresser
professionnellement, notamment par la formation
professionnelle. Il marque bien le lien décisif qui
relie formation initiale et accès à la formation conti-
nue. Il reste un facteur essentiel de promotion
sociale.
des jeunes enfants, l’éveil à la curiosité et la pré-
paration à l’acquisition des connaissances.
Le droit à la scolarisation de tous les élèves en
situation de handicap n’a pas permis un véritable
droit à l’intégration scolaire et n’a pas été accom-
pagné des moyens indispensables à sa mise en
œuvre, notamment pour l’enseignement spécialisé.
La formation professionnelle
Article L.6314-1 du Code du travail : « tout travail-
leur engagé dans la vie active ou toute personne
qui s’y engage a droit à l’information, à l’orienta-
tion et à la qualification professionnelle et doit
pouvoir suivre, à son initiative, une formation lui
permettant, quel que soit son statut, de progresser
au cours de sa vie professionnelle d’au moins un
niveau en acquérant une qualification correspon-
dant aux besoins de l’économie, prévisible à court
ou moyen terme ».
Plus de la moitié des cadres bénéficient de for-
mation professionnelle contre un peu plus d’un
ouvrier sur trois. 24 % de ceux qui n’avaient aucun
diplôme ont eu accès à la formation continue en
2006 contre 64 % des bac +3.
60 % des salariés des entreprises de plus de mille
salariés y ont eu accès contre 23 % des salariés
des entreprises en comptant moins de 20.
Les femmes vont beaucoup en formation d’adap-
tation à l’outil, voire un peu plus que les hommes,
mais s’agissant des formations promotionnelles,
elles sont quasi absentes.
L’environnement légal, réglementaire et conven-
tionnel sur la formation professionnelle a fortement
évolué ces dernières années :
•
la nouvelle organisation de l’État en territoire
consacre le transfert de compétences aux
conseils régionaux du domaine de la forma-
tion professionnelle des jeunes, de la formation
continue, de l’apprentissage tout en érigeant
le préfet de région, et le recteur en « tête de
pont » sur le territoire ;
L’école maternelle est une spécificité française.
Elle joue un rôle important pour la réduction des
inégalités sociales et territoriales, la socialisation
•
la loi du 24 novembre 2009 et ses précé-
dentes ;
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•
l’accord national interprofessionnel (ANI) du
14 décembre 2013 n’a pas été signé par la
CGT, notamment parce qu’il réduit l’obligation
de financement par les entreprises de la forma-
tion professionnelle des salariés accentuant le
désengagement des employeurs. Il comporte
cependant des dispositifs nouveaux, certains
positifs (Compte Personnel de Formation,
Conseil en Évolution Professionnelle et entre-
tien professionnel) et aujourd’hui transcrits
dans la loi, que les salariés individuellement
et collectivement doivent pouvoir mobiliser.
Utilisés avec détermination, à l’initiative des per-
sonnes mais garantis collectivement, les disposi-
tifs et droits ouvrent la possibilité de :
• construire son projet d’évolution profession-
nelle et faire reconnaître ses qualifications avec
l’entretien professionnel, le conseil en évolu-
tion professionnelle (CEP), le bilan de compé-
tences, le passeport de formation orientation et
la validation des acquis de l’expérience (VAE) ;
•
réaliser un projet personnel avec le congé indi-
viduel de formation (CIF) ;
• obtenir une formation dans le cadre du plan
de formation ou d’une période de profession-
nalisation ;
•
revendiquer, négocier une formation en utili-
sant son compte personnel de formation (CPF)
pour la financer en tout ou partie.
Cet ensemble peut constituer l’embryon de la
sécurité sociale professionnelle que la CGT
revendique.
Le rôle des institutions représentatives du person-
nel dans l’information des salariés, sur l’évolution
prévisible des emplois de leur secteur d’activité et
sur l’évolution des qualifications qui en résulte ainsi
que sur les dispositifs de formation est reconnu.
L’employeur a dans les grandes entreprises l’obli-
gation de soumettre le plan de formation de l’en-
treprise pour avis au comité d’entreprise (CE) et
pour information au syndicat.
Les entreprises employant deux cents salariés et
plus doivent créer une commission de formation,
chargée de recenser les attentes et les besoins
des salariés et développer l’information sur leurs
droits en matière de formation professionnelle.
La négociation obligatoire triennale dans la
branche professionnelle, doit porter, entre autres,
sur les nouvelles clauses obligatoires dans les
conventions collectives concernant l’apprentis-
sage et la formation continue.
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REPÈRES REVENDICATIFS — FÉVRIER 2018
LES MOYENS POUR Y PARVENIR
L’éducation et la formation initiale
•
la laïcité ;
Une éducation initiale publique basée
sur le droit à la scolarisation
en maternelle dès 2 ans
lorsque les parents le souhaitent
dans le cadre d’une scolarité obligatoire
de 3 à 18 ans.
Pour répondre aux objectifs visés plus haut, des
transformations touchant aux contenus, à l’orga-
nisation et à la structuration du système scolaire
sont indispensables.
Dans cette perspective, il convient de réaffirmer la
place fondamentale d’un collège ayant pour objec-
tif de dispenser une scolarité commune, de la 6e
à la 3e (sans exclusion, ni orientation précoce), à
l’ensemble des jeunes prenant en compte leurs
diversités.
La reconnaissance de l’égalité entre les filières
générale, technologique et professionnelle doit
être affirmée.
L’enseignement privé, en tant que partie du sys-
tème éducatif national et l’apprentissage, en tant
que voie de formation professionnelle initiale,
doivent être inscrits dans une démarche de ser-
vice public et répondre pleinement à l’exigence de
responsabilité sociale qui en découle.
L’éducation populaire doit être reconnue dans
ses missions d’émancipation et de formation du
citoyen.
Un véritable service public (4) de
l’éducation
Sa dimension nationale, sa proximité locale et son
unité doivent être renforcées. Il doit garantir :
•
la gratuité de l’enseignement ;
•
l’égalité d’accès pour chaque jeune, fille et
garçon, et la prise en compte des spécificités
(origine sociale, ethnique ou territoriale), des
déficits fonctionnels (origine physique ou men-
tale), de manière à ce qu’ils ne constituent pas
des handicaps ;
(4) Voir repères revendicatifs, fiche 30.
•
la mixité sociale.
L’apprentissage doit être conçu en complémen-
tarité et non en concurrence à la voie scolaire.
Tout établissement scolaire doit être un lieu de vie
où les droits des élèves et des personnels sont
assurés par l’exercice de la démocratie.
Le service public de l’orientation scolaire et pro-
fessionnelle doit accompagner chaque jeune tout
au long de sa scolarité et lui permettre d’accéder
à la filière de son choix. Il doit faire le lien entre le
système éducatif et le monde du travail dans le
respect des aspirations de chaque jeune.
L’enseignement supérieur doit être en mesure
d’accueillir et de qualifier une majorité de chaque
génération de jeunes ainsi qu’une part croissante
de salariés. Cet objectif doit s’articuler avec ses res-
ponsabilités en matière de recherche scientifique.
Des moyens financiers et humains
conséquents doivent être dégagés
par les pouvoirs publics, notamment
dans le cadre du budget de l’État qui doit
marquer l’éducation comme une priorité.
Ils doivent permettre de :
• construire et équiper les établissements sco-
laires et d’enseignement supérieur et dévelop-
per la formation initiale et adaptée en assurant
le maillage territorial indispensable à la proxi-
mité des besoins ;
• développer la formation professionnelle initiale
et continue des personnels ;
• assurer la gratuité totale des études, ce qui
implique aussi le versement des aides finan-
cières nécessaires, notamment en relevant et
en augmentant les bourses et en assurant à
tout étudiant, en fonction de sa situation indi-
viduelle, une allocation d’autonomie ;
• élargir l’intervention pédagogique à l’environ-
nement de l’école dans tous ses aspects ;
REPÈRES REVENDICATIFS — FÉVRIER 2018
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• mettre en place des dispositifs de dépistages
et de remédiation de la difficulté scolaire
permettant de la prévenir et de la traiter en
coopération avec les éventuelles institutions
concernées (services sociaux et de santé, pro-
tection judiciaire et de la jeunesse…).
La formation professionnelle
Notre démarche revendicative doit s’appuyer sur
la reconnaissance du caractère pluridimensionnel
de la qualification d’un salarié qui est la résultante
de son parcours en termes de formation initiale,
formation continue, expérience professionnelle et
expérience sociale.
Dans l’entreprise, 10 % des heures collectivement
travaillées doivent être consacrés à la formation
sur le temps de travail, cela doit correspondre à
un mois de formation chaque année ou une année
de formation tous les dix ans pour chaque salarié.
Les taux de contribution des entreprises au finan-
cement de la formation professionnelle, doivent
être augmentés et harmonisés par le haut.
La part consacrée au congé individuel de forma-
tion (CIF) doit être accrue et passer de 0,2 % de
la masse salariale à 0,3 % afin de rendre ce droit
accessible à tous les salariés.
Les fonds ainsi collectés relevant du salaire socia-
lisé, leur utilisation doit répondre en priorité aux
besoins des salariés. Ils doivent être gérés prin-
cipalement par leurs représentants.
La formation professionnelle doit être l’objet d’un
dialogue social renforcé dans l’entreprise, dans
les branches et dans les régions.
Le plan de formation de l’entreprise doit être
décidé par la négociation et sa mise en œuvre
contrôlée par le CE (5).
Afin d’assurer, à tous les salariés, l’accès gratuit
à des actions de formation professionnelle libé-
rées des logiques patronales, le service public
de l’éducation et de la formation doit être articulé
avec le service public de l’emploi (6).
Toutes les certifications de qualification profes-
sionnelle doivent avoir une valeur nationale et être
transférables entre les différentes conventions
collectives et statuts.
L’alternance, une des voies de la formation pro-
fessionnelle initiale, doit être conçue comme une
démarche pédagogique, ce qui implique que les
droits des stagiaires et la qualité de la formation
soient garantis pendant les périodes de formation
en entreprise.
(5) Voir repères revendicatifs, fiches 17 et 20.
(6) Voir repères revendicatifs, fiche 7.
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