Enjeux et défi s
de la formation
à l’enseignement professionnel
C o l l e c t i o n
É D U C A T I O N -R E C H E R C H E
Sous la direction de
CLAUDIA GAGNON
SANDRA COULOMBE
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Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales
du Québec et Bibliothèque et Archives Canada
Vedette principale au titre :
Enjeux et défis de la formation à l’enseignement professionnel
(Collection Éducation-recherche ; 38)
Comprend des références bibliographiques.
ISBN 978-2-7605-4610-3
1. Enseignement professionnel. 2. Professeurs (Enseignement professionnel) –
Formation. I. Gagnon, Claudia. II. Coulombe, Sandra, 1974-
III. Collection : Collection Éducation-recherche ; 38.
.
LC1060.E54 2016
378’.013
C2016-941311-X
Révision et correction d’épreuves
Mélissa Guay
Conception graphique
Julie Rivard
Image de couverture
iStock
Mise en page
Info 1000 Mots
Dépôt légal : 4e trimestre 2016
› Bibliothèque et Archives nationales du Québec
› Bibliothèque et Archives Canada
© 2016 – Presses de l’Université du Québec
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés
Imprimé au Canada
D4610-1
[01]
CHAPITRE 10
Une enquête sur la formation
à l’enseignement professionnel
Faits saillants et enjeux
Frédéric Deschenaux
Marc Tardif
RÉSUMÉ
Depuis septembre 2003, un baccalauréat à l’enseignement professionnel de 120 crédits
est implanté dans 6 universités québécoises. La Table MELS-universités, souhaitant
faire le bilan de l’implantation de ce programme, a formé le Groupe de réflexion qui
a mené une vaste enquête au printemps 2011 auprès de 5 groupes de répondants que
nous nommons les actifs, les diplômés, les abandons, les directions et les interve-
nants. En tout, plus de 1350 personnes ont participé à cette enquête. Ce chapitre
aborde donc le contexte, la démarche et les principaux résultats de cette enquête.
Ces données inédites permettent de dégager un portrait d’ensemble de la satisfaction
et de l’évaluation des composantes des programmes d’études de même que des
conditions d’étude des enseignants de la formation professionnelle (FP). Ces faits
saillants permettront de soulever des questions et des enjeux qui concernent tous les
acteurs impliqués dans la formation des enseignants de la FP.
L e baccalauréat de 120 crédits de formation à l’enseignement professionnel
est implanté dans 6 universités québécoises depuis septembre 2003.
La Table MELS-universités souhaitait faire le bilan de l’implantation de ce
programme. À cet effet, elle a formé un groupe de réflexion sur la formation à
l’enseignement professionnel (appelé le Groupe de réflexion ci-après), qui a mené
une vaste enquête au printemps 2011 auprès de 5 groupes de répondants que nous
nommons les actifs, les diplômés, les abandons, les directions et les intervenants.
En tout, plus de 1350 personnes ont participé à cette enquête.
En lien direct avec le thème du présent collectif, ce chapitre se veut
un condensé fortement inspiré du rapport remis à la Table MELS-universités
en janvier 2012 par le Groupe de réflexion. En ce sens, il ne saurait être aussi
complet. Ce chapitre aborde donc le contexte, la démarche de collecte de données
et les principaux résultats de cette enquête. Ces données inédites permettent de
dégager un portrait d’ensemble de la satisfaction et de l’évaluation des compo-
santes des programmes d’études de même que des conditions d’études des
enseignants de la FP. Ces faits saillants permettront de soulever des questions
et des enjeux qui concernent tous les acteurs impliqués dans la formation des
enseignants de la FP.
Le contexte général
1.
Cette section vise à décrire brièvement le domaine de la formation profession-
nelle au secondaire en présentant tour à tour la diversité de l’offre de formation,
le profil des élèves, mais surtout le profil singulier des enseignants de cette filière,
pour terminer par les différentes composantes des programmes de formation à
l’enseignement professionnel.
1.1. La description du domaine de la formation professionnelle
La formation professionnelle au secondaire a une longue histoire au Québec,
marquée, notamment, par un lien plus ou moins étroit avec le marché de l’em-
ploi, selon les périodes (Landry et Mazalon, 1995 ; Roussel et Deschenaux, 2010).
L’image de cette filière d’études n’a pas toujours été très reluisante dans l’es-
prit des élèves, du personnel enseignant et de la population en général. C’est
236
pourquoi les différents ministères responsables de l’éducation tentent depuis
plusieurs années de faire connaître la qualité de la formation offerte dans les
centres de FP. Les efforts de valorisation se concentrent sur la rentabilité de ces
programmes sur le marché de l’emploi afin d’y attirer entre autres les jeunes,
promettant une formation courte avec emploi à la clé.
La FP au Québec est dotée d’une architecture complexe, sise au cœur de
nombreuses relations entre économie, politique, contexte socioculturel et système
éducatif. Cette courte section expose, dans un premier temps, l’offre de forma-
tion très diversifiée, pour ensuite traiter de l’évolution des effectifs étudiants.
Après avoir brossé le portrait de leur parcours atypique et des caractéristiques
des enseignants de la FP, cette section se termine par une brève présentation des
universités offrant le baccalauréat en enseignement professionnel (BEP).
1.1.1. Une offre de formation très diversifiée
À la FP de niveau secondaire, plusieurs types de programmes se côtoient. Le
diplôme d’études professionnelles (DEP) est celui qui exige le plus grand nombre
d’heures, variant entre 600 et 1 800 heures (Proulx, 2009). Ensuite, en complé-
ment à un certain nombre de ces programmes de DEP, il est possible de pour-
suivre vers une attestation de spécialisation professionnelle (ASP) qui, comme
son appellation l’indique, est une formation plus spécialisée liée à un métier
donné. Il existe une grande variété de programmes offerts à l’ordre d’enseigne-
ment secondaire, c’est-à-dire 165 programmes conduisant à un DEP ou une ASP
(MELS, 2010). Tous ces programmes sont regroupés sous 20 secteurs, exposant
la grande diversité des domaines couverts. Cette grande variété de secteurs et
de programmes prend vie dans l’un des 170 centres de formation professionnelle
(CFP) gérés par 70 commissions scolaires. De ce nombre, 9 sont dites anglo-
phones et 2 sont considérées à statut particulier. À cela s’ajoutent 3 établis-
sements gouvernementaux et une trentaine d’établissements privés de FP. Le
nombre d’élèves inscrits aux différents programmes de FP s’élevait à 97 544, en
2008-2009, et plus de 40 000 diplômes sont délivrés chaque année (DEP, ASP et
AFP) (MELS, 2010).
1.1.2. L’effectif étudiant en formation professionnelle
Les données du ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport (MELS, 2010)
indiquent que les effectifs en FP suivent une tendance à la hausse depuis
plusieurs années, enregistrant une augmentation de 14 % depuis 1999-2000. Bien
que l’effectif jeune (moins de 20 ans) soit en augmentation, passant de 24 462 en
1999-2000 à 27 476 en 2008-2009, il faut noter une tendance qui caractérise la
composition de l’effectif étudiant en FP. En effet, depuis la fin du siècle dernier,
c’est l’effectif adulte (20 ans et plus) qui constitue près des deux tiers des élèves
en FP. Ainsi, ils étaient 61 207 en 1999-2000 par rapport à 70 068 en 2008-2009
(MELS, 2010). Concernant le genre, les femmes sont concentrées dans un nombre
ENJEUX ET DÉFIS DE LA FORMATION À L’ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL restreint de secteurs de formation. Ainsi, plus de 4 femmes sur 5 (84 %) étudient
dans les secteurs Administration, commerce et informatique (35 %), Santé (31 %),
Soins esthétiques (11 %) ou Alimentation et tourisme (7 %).
237
1.2. Le parcours atypique conduisant
à l’enseignement professionnel
L’entrée dans la carrière enseignante en FP au secondaire impose d’importantes
exigences. D’une part, une expérience de métier est nécessaire, ce qui signifie que
le personnel enseignant vit invariablement une importante période de transition
entre la pratique et l’enseignement d’un métier (Balleux, 2006 ; Deschenaux et
Roussel, 2008, 2010a ; Gagné, 2015). Contrairement aux enseignants du primaire
et du secondaire, la minorité des enseignants de la FP avait envisagé d’ensei-
gner leur métier. Cette décision les place dans une situation inusitée où ils sont
dépositaires d’un savoir de métier fort significatif (Deschenaux et Roussel, 2011),
tout en vivant une transition professionnelle comme recrue dans l’enseignement
en concomitance avec leur formation universitaire initiale en enseignement
(Gagné, 2015).
1.3. Le portrait du personnel enseignant
de la formation professionnelle
La dernière décennie montre une croissance soutenue des effectifs scolaires au
secondaire professionnel, ce qui commande l’embauche de plusieurs nouveaux
enseignants pour répondre à la demande. D’ailleurs, les dernières données dispo-
nibles permettent d’observer une augmentation considérable du nombre d’ensei-
gnants en FP. Comme le montre le tableau 10.1, leur contingent est passé de 8 124
en 2000-2001 à 10 020 en 2009-2010, ce qui représente une hausse de 18,9 %.
Toutefois, cette augmentation du nombre total d’enseignants en FP ne se répartit
pas de façon proportionnelle en fonction du statut d’emploi.
TABLEAU 10.1. Évolution du personnel enseignant en FP
Corps enseignant
Permanent (régulier)
À forfait
À taux horaire
Total
2000-2001
2009-2010
2 487 (30,6 %)
2 391 (23,9 %)
1 849 (22,8 %)
3 067 (30,6 %)
3 788 (46,6 %)
4 562 (45,5 %)
8 124 (100 %)
10 020 (100 %)
Source : Adapté de MELS, 2007, p. 184-187 ; MELS et Ministère de l’Enseignement
supérieur, de la Recherche, de la Science et de la Technologie (MESRST), 2014, p. 164-167.
Une enquête sur la formation à l’enseignement professionnel 238
Le corps enseignant se divise en 3 grandes catégories : permanent, à
forfait et à taux horaire. Pour ce qui est du corps enseignant permanent, aussi
appelé régulier, il est en diminution, le nombre d’enseignants passant de 2 487
(30,6 %) en 2000-2001 à 2 391 (23,9 %) en 2009-2010.
En corollaire à la diminution du nombre d’enseignants réguliers, c’est le
nombre des enseignants à forfait et à taux horaire qui est en augmentation. En y
regardant de près, le nombre d’enseignants à taux horaire est passé de 3 788 en
2000-2001 à 4 562 en 2009-2010, une augmentation proportionnelle (17,0 %) à
celle de l’ensemble du corps enseignant. Mais c’est la catégorie des enseignants à
forfait, dont le nombre est passé de 1 849 (22,8 %) en 2000-2001 à 3 067 (30,6 %)
en 2009-2010, qui connaît la plus forte hausse (39,7 %).
En ce qui concerne le genre, tout comme pour les élèves, on observe un
plus fort contingent d’hommes dans le corps enseignant en FP, mais cette réalité
tend à se modifier. En 2000-2001, on comptait 62,1 % d’hommes par rapport à
57,4 % en 2009-2010. La forte croissance du secteur de la santé peut expliquer
cette progression du nombre d’enseignantes puisque c’est un secteur fortement
féminin dont l’effectif a plus que doublé durant cette période. En 2000-2001, on
comptait 483,1 enseignants en équivalent temps plein par rapport à 1 195,4 en
2008-2009. Notons que dans ce secteur, 49,2 % du corps enseignant est engagé
à taux horaire.
Fait non négligeable, il faut noter que l’âge moyen des enseignants de la
FP est plus élevé que celui des enseignants du préscolaire, primaire ou secondaire
général, demeuré stable (en moyenne à 39,1 ans) depuis 2000-2001. En FP, l’âge
moyen est en hausse, passant de 43,1 ans en 2000-2001 à 45,2 ans en 2009-2010.
Pour compléter le portrait du personnel enseignant de la FP, nous trai-
tons de la qualification légale d’enseigner. Cette dernière, sous la responsabilité
ministérielle, se divise en 2 catégories : la qualification légale permanente et la
qualification légale non permanente.
La seule qualification légale permanente est le brevet en enseignement.
La mise en place des BEP de 120 crédits, à partir de l’automne 2003, comme
voie de formation menant au brevet d’enseigner, a obligé le MELS à revoir le
règlement sur les autorisations d’enseigner et, de ce fait, les exigences et les
conditions permettant l’obtention du brevet en FP. À ce jour, ce brevet s’obtient
lorsqu’une personne répond à 4 conditions : 1) Détenir un diplôme (DEP, DEC
technique ou baccalauréat disciplinaire) reconnu par le MELS en lien avec la
spécialité enseignée ; 2) Posséder au moins 3 000 heures d’expérience de travail
ou d’enseignement dans cette spécialité ; 3) Avoir complété un BEP reconnu ;
4) Avoir réussi le test de certification exigé par le MELS dans sa langue d’ensei-
gnement. Bien que le brevet soit l’autorisation permanente d’enseigner, il n’est
pas obligatoire de le détenir pour obtenir des contrats ou même un poste dit
ENJEUX ET DÉFIS DE LA FORMATION À L’ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL