Comment animer et coordonner une équipe à distance ?
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Introduction
La mondialisation, l’ouverture des marchés à la concurrence, la recherche de réduction des
coûts et de nouveaux gisements de croissance, rendent l’internationalisation des entreprises,
quelques soient leur taille et leurs secteur d’activité, inéluctable. Le manager doit désormais
être capable de comprendre l’évolution de l’environnement international et des entreprises
concernées par l’internationalisation de leurs marchés, de leurs clients, leurs concurrents et
partenaires. Face à ces nouveaux enjeux économiques les entreprises se rapprochent de leurs
clients. Ceci les amène à travailler à distance avec des équipes éloignées et éparpillées.
Aussi l’émergence des sociétés de l’information et le développement des nouvelles
technologies de l’information et de la communication (NTIC) ont créé de nouveaux modes de
fonctionnement et de développement des entreprises. Pas d’équipe virtuelle sans outils
électroniques : l’emploi des NTIC est généralement perçu comme la caractéristique essentielle
du travail à distance. En effet, le développement des NTIC est une des conditions de
l’émergence du management à distance parmi d’autres facteurs stimulant liés au contexte
économique, organisationnel et culturel. Mais l’effcacité du travail à distance ne s’improvise
pas. Il faut savoir faire vivre une organisation, nouer des relations humaines, exploiter
judicieusement les outils technologiques. Un management spécifque doit être mis en place
pour favoriser les échanges et coordonner les activités dispersées. Alors comment animer et
coordonner une équipe à distance ?
Afn d’appréhender cette problématique plus amplement nous avons organiser notre réfexion
de la façon suivante :
1. Spécifcités du management d’une équipe à distance
1.1 Management d’équipe
1.2 L’impact de la distance
1.3 Management de la diversité
2. Animer une équipe à distance
2.1 L’art délicat du leadership
2.2 Mobiliser les énergies
2.3 La gestion du confit
3. Coordonner une équipe à distance
3.1 La gestion des temps
3.2 Gestion liée au résultat
3.3 Les outils de coordination
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1 Spécifcités du management d’équipe à distance
1.1 Avant tout un management d’équipe
Que ce soit en local ou à distance, il pourrait s’agir, au premier abord, de gérer une équipe qui
n’est rien d’autre qu’une collection d’individus concourant pour la réalisation d’un objectif.
Dans ce groupe d’individus, les rôles et les métiers sont différenciés. Il faut aussi noter que
parmi les personnes qui composent ce groupe, certains sont très compétents et d’autres le sont
moins. Ce qui est une source de complexité pour le manager. C’est pourquoi Frédéric
Winslow Taylor donne une piste pour le management d’équipe par sa théorie sur
l’organisation scientifque du travail. D’après cette théorie manager une équipe revient à
segmenter les tâches, à diviser verticalement et horizontalement le travail en distinguant les
fonctions d’exécution des fonctions d’organisation. Mais l’organisation des tâches n’est pas le
management d’équipe. Pour le manager c’est la formation, la mobilisation des ressources et la
performance collective. Les performances d’une équipe varient dans des proportions
différentes selon que leurs membres sont bien formés et mobilisés. Donc l’équipe est conçue
comme le moyen de la performance et à ce titre, elle doit être bien managé. Selon Henry
Fayol le bon manager est celui qui sait combiner ces cinq missions :
o La prévoyance qui consiste à prévoir et à planifer de façon rationnelle l’avenir
o L’organisation qui consiste à allouer des ressources matérielles et fnancières aux
membres de l’équipe
o Le commandement qui consiste à tirer le meilleur parti des membres de l’équipe par
une autorité exemplaire
o La coordination qui consiste à relier, unir, harmoniser tous les efforts
o Le contrôle qui consiste à veiller à ce que tout se passe conformément aux règles
établies et aux ordres donnés.
Ces cinq piliers ont été aujourd’hui repris et sont plus connus sous la forme : P.O.D.C. :
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•
Planifer
•
Organiser
•
Diriger
•
Contrôler
Cependant dans ce management d’équipe tout change lorsque s’invite la notion de distance.
1.2 Impact de la distance
Contrairement au management local, le management à distance consiste à animer et à
coordonner une équipe dont les membres sont éparpillés dans le monde et jouissent d’une
certaine autonomie dans la réalisation de leur mission. Cette distance est due aux enjeux
économiques créés par la mondialisation et l’internationalisation. Nombreuses sont les
entreprises qui cherchent à se rapprocher de leurs clients ou à étendre leurs marchés partout
où il est possible. Cependant, les impacts de la distance dans le management des équipes sont
peu connus.
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On peut en étudier deux :
La façon de manager
Le facteur distance recommande la mise en place d’un style de management fondé sur
l’autonomie, la confance et la fexibilité. Le manager exerce peu voire aucun contrôle lorsque
ses collaborateurs travaillent à distance. La distance suppose une forte relation de confance et
un management par objectif. Le manager se doit d’être attentif à l’état psychologique de ses
collaborateurs qui risquent de s’isoler.
La cohésion
La distance limite les contacts entre les collaborateurs d’une part et entre ceux-ci et le
manager d’autre part, ce qui peut se traduire par un manque de cohésion et une absence de
culture d’entreprise. Le fait de travailler selon un mode organisationnel différent crée en soi
une culture.
Les liens juridiques
Le fou juridique persiste toujours dans le travail à distance. On ne sait pas quelle loi
appliquer en cas de litiges entre l’entreprise et un employé détaché dans un autre pays. Le plus
souvent on fait appel au droit international privé pour faire appliquer la loi du fort qui est celle
du pays où réside et travaille le collaborateur. De plus, dans le télétravail, de nombreuses
questions émergent concernant l’application des dispositions relatives aux accidents, aux
temps et aux conditions de travail.
1.3 Management de la diversité
Manager la diversité revient à diriger et à coordonner une équipe dont les membres sont
parfois d’origines différentes, par conséquent de cultures différentes. Cette spécifcité est l’un
des premiers défs à relever pour réussir le management à distance. L’inter culturalité est
considérée comme un obstacle à la réussite du management à distance. Les cultures nationales
ont des infuences qui peuvent être positives ou négatives sur les manières de travailler en
équipe. La culture est considérée comme un système de signifcations et d’orientations, propre
à un groupe, basée sur des valeurs spécifques qui se traduisent en comportements. Elle refète
les valeurs, les pensées et les comportements d’une société et joue un rôle primordial malgré
le discours universaliste de la mondialisation. Le premier trait manifeste de la diversité des
cultures est la langue. Cette dernière devient un obstacle lorsque son emploi est sujet de
malentendu. Les cultures modèlent également les façons de percevoir une situation et de se
comporter dans la vie de tous les jours. En matière de management, ce système culturel
procure aux individus des capacités cognitives et des méthodes spécifques pour résoudre des
problèmes. Des collaborateurs issus de pays différents sont susceptibles d’avoir diverses
façons de travailler et de trouver des solutions face à un problème. Par exemple, prenons le
cas de deux collaborateurs, un français et un allemand qui travaillent tous les deux à partir de
leur pays respectif sur un même projet. On notera comme le décrivent d’Iribarne et Ammon
(1989) : à « la logique de l’honneur », tournée vers la stratégie et la créativité qui prédomine
chez le Français, se substitue « la logique de rentabilité », orientée vers le proft et les coûts
pour l’Allemand. La recherche en psychologie sociale révèle que le travail dans ce genre de
situation peut mener à une baisse de productivité lorsque diffèrent les concepts de
communication et de collaboration.
La signifcation de certains concepts de management, comme la coopération, le contrôle et la
récompense peut varier sensiblement selon les cultures et les individus concernés. L’analyse
de cet incident critique révèle que ce blocage peut avoir pour origine une interprétation
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différente de la notion de coopération. Si pour un Allemand la notion de coopération implique
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un travail en équipe dans l’objectif d’atteindre un but commun, pour un Français la même
notion présuppose le concours d’apports individuels afn de résoudre une tâche commune.
Aussi si aux USA, lorsqu’un manager attribue une gratifcation personnelle, celle-ci est
favorablement perçue par le collaborateur américain. Pour un japonais par contre, cette
reconnaissance de la valeur personnelle constitue une incorrection, voir susciter un sentiment
de honte.
L’attention aux hommes, indispensable lorsqu’on travaille à distance, suppose une
connaissance et reconnaissance des cultures en présence et une adaptation du style de
management.
Pour répondre aux attentes de plus en plus globales et exigeantes du marché, les structures
organisationnelles changent afn de se doter d’une meilleure fexibilité. Les entreprises
s’étendent, se développent, deviennent internationales, et se mettent en réseaux afn de
maîtriser le saint Graal : le trio coût, qualité et délais. Des équipes projets sont, pour ce faire,
mises en place afn d’offrir une réponse rapide et si possible de qualité aux besoins des
clients. Parfois issus de pays différents et/ou faisant partie d’entreprises différentes, les
membres de ces équipes communiquent, collaborent et coordonnent leurs efforts lors de la
réalisation de leur projet commun et ce presque exclusivement grâce aux technologies de
l’information et de la communication (TIC). Le Network, le travail en réseau, n’a jamais
autant pris son sens que depuis l’avènement des « nouvelles » technologies de l’information et
de la communication, les fameuses NTIC. Mais qui dit travail en réseau dit également
organiser collectivement le travail, problématique au cœur du management.
Avec l’émergence du télétravail, l’activité professionnelle perd ses traits distinctifs contenus
dans ses trois dimensions classiques : unité de lieu, de temps et de fonction. Une triple rupture
en résulte : la perte des repères spatiaux (avec un travail en lieux partagés ou, à l’inverse sans
lieux dédiés), la perte des repères temporels (avec la désynchronisation des activités et le
décalage des rythmes de travail), et enfn, la perte des repères fonctionnels (avec la
dématérialisation du travail, des échanges et du lien de subordination). Cette triple rupture
entraîne un certain nombre de modifcation quant au management de ces équipes dispersées et
plus particulièrement en ce qui concerne l’animation de celles-ci.
2 Animer une équipe à distance
2.1 L’art délicat du leadership
Etre leader dans une équipe ne va pas de soit. Le leadership ne se décrète pas et n’est pas,
comme certains managers semblent le penser encore, un simple exercice d’autorité.
Avec le développement du modèle organisationnel bureaucratique, misant sur la
rationalisation de l’activité en tâches distinctes et la séparation de l’exécution, du contrôle et
de la conception, deux sources principales d’autorité ont progressivement émergé. Première
source : le pouvoir d’application ou non de la règle. Fondée sur cet élément, l’autorité, et donc
l’exercice du management plus globalement, se base sur un pouvoir discrétionnaire où la
liberté de décision quant à la règle et son application est un symbole d’élévation hiérarchique.
La seconde source d’autorité, très liée à la première et traditionnellement héritée du mode
d’organisation bureaucratique, repose sur la relation hiérarchique et plus globalement sur le
statut tiré de la position du manager au sein de l’organigramme de l’entreprise. Cette position
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dans l’organigramme lui confère un pouvoir de sanction et de récompense vis à vis de ses
subalternes qui va constituer la base même de son management.
Comme nous pouvons l’imaginer, dans ce mode de fonctionnement, le leadership, ou plutôt
l’exercice de l’autorité, s’exprime principalement par des comportements directs et des
attitudes perceptibles et équivoques. Or, avec le travail et les équipes à distance, les attitudes,
les voix, les regards, les gestes, et tout autres éléments de comportements ne sont que peu ou
pas perceptibles par le média électronique. Cette situation entraîne une certaine remise en
cause de ces deux sources d’autorité traditionnelles.
D’une part, les attributs physiques associés au pouvoir (bureaux spacieux, fauteuil
confortable, ordinateur de dernière génération…) ne sont plus apparents, ce qui met à mal une
partie de la légitimité statutaire.
Et d’autre part, le travail en réseau, favorisant, comme nous le verrons plus loin, autonomie et
fexibilité, rend moins effcace un management basé essentiellement sur le maniement du
« bâton » et de la « carotte » qui oscille entre sanctions et récompenses.
Il est intéressant, toutefois, de noter qu’avec le développement du télétravail, la remise en
cause des sources d’autorité traditionnelles a permis l’avènement de nouvelles sources
d’autorité. A l’autorité conférée par le statut et la règle, s’est substituée l’autorité provenant à
la fois du réseau relationnel mobilisable et de compétences managériales reconnues.
Comme nous venons de l’aborder, depuis le siècle dernier, nos modèles culturels dominants
reposent principalement sur un management direct, physiquement immédiat, et donc sur le
contrôle de la présence et de la disponibilité. Cette culture d’entreprise, baignant encore dans
l’esprit tayloriste, n’encourage pas le travail à domicile en raison des diffcultés à gérer des
employés qui ne peuvent être vus.
En conséquence, les managers doutent à la fois de leur propre capacité à gérer à distance et de
la capacité de leur personnel à travailler à distance.
Suivant la conception traditionnelle du management issue du fonctionnement bureaucratique,
les managers ont besoin, pour gérer, d’avoir leurs subordonnés à proximité. L’effcacité du
management trouve alors son origine dans un management de proximité centré sur les
relations verbales tel que le décrit Mintzberg. La distance qui s’instaure entre employés et
manager compromettrait alors les interactions nécessaires au travail du manager.
Avec le travail à distance, les critères et pratiques classiques de subordination liés
spécifquement à la surveillance de la présence physique et du temps de travail sont
automatiquement bousculés. La disparition du bureau, qui représentait un véritable vecteur
social, oblige l’employé à se prendre en charge et à gérer l’isolement car si le télétravail
signife éloignement, il signife aussi dispersion.
Qui plus est, en l’absence d’un responsable, le « télétravailleur » peut se trouver dans
l’obligation de prendre des initiatives et donc des responsabilités généralement assumées par
le niveau hiérarchique supérieur. L’autonomie dont il se prévaut lui permet, parfois,
d’instaurer, à son proft, un rapport de pouvoir avec l’entreprise qui l’emploie. Cette
autonomie, que la hiérarchie n’a pas l’impression de maîtriser, gêne profondément certains de
ses représentants.
Elle est souvent ressentie comme une perte de pouvoir, justifant le refus des managers de voir
s’inverser la balance des compétences et des prérogatives en faveur du « télétravailleur ».
En éloignant le travailleur de sa hiérarchie, la distance affaiblit les signes visibles du statut
susceptibles de conforter la position organisationnelle des responsables hiérarchiques. Le
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manager perd ses traits distinctifs en terme de reconnaissance sociale, ceux-ci étant liés à des
symboles matériels qui ne sont plus accessibles.
N’oublions pas non plus que comme le montrent Friedberg et Crozier, une équipe, quelle
soit à proximité ou à distance, est composée d’acteurs luttant pour la conservation ou le
développement de leur pouvoir. Cette analyse stratégique nous pousse à considérer une autre
diffculté quant à la pratique du leadership au sein d’une équipe à distance, à savoir,
l’existence de jeux de pouvoir. Sans rentrer dans le détail de l’analyse stratégique développée
par Friedberg et Crozier, l’individu en entreprise est un acteur car joue avec les zones
d’incertitudes (éléments qui ne sont pas formalisés) pour asseoir ou augmenter son pouvoir,
c’est à dire : sa capacité à modifer les comportements des autres individus. De cette analyse
et de la situation de travail à distance, l’importance et la diffculté que peut représenter la
rétention d’information dans un tel mode d’organisation est facilement perceptible. De même,
les comportements individualistes, corporatistes ou de compétition interne sont d’une
importance cruciale puisque l’ajustement mutuel tiré de la rencontre quotidienne avec les
autres acteurs de l’équipe au sein d’une équipe de proximité n’a pas cours dans le cadre d’une
équipe à distance. Le manager doit donc développer des connaissances plus sociologiques
voire psychosociologiques pour mener à bien une équipe dispersée.
2.2 Mobiliser les énergies
La communication par les « nouvelles » technologies propose une communication formelle à
la fois variée (par les types de média) et de masse (par la capacité de diffusion de
l’information). Celle-ci a tendance à limiter les échanges informels avec un certain nombre de
conséquences pour l’individu (insatisfaction, isolement, stress) et pour le groupe (problèmes
de relations interpersonnelles, de cohésion interne). Cette dispersion géographique des
employés limite en effet l’affectif rendu possible par la familiarité, mais elle limite aussi les
opportunités organisationnelles d’exposer les employés à des symboles, des rites communs
favorisant le développement d’une culture d’entreprise. En ce sens, l’éloignement réduit
également les possibilités de synergies et d’émulation du groupe.
Mais dans ce cas, comment est-il possible de faire coïncider des intérêts différents et de
favoriser une synergie dynamisante pour le groupe ?
Pour répondre à cette interrogation, il nous faut tenter de dégager les rôles et fonctions d’un e-
leader :
Innovateur
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Producteur
Directeur
Coordinateur
Mentor
Facilitateur
Moniteur
Rôle du
e-leader
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A travers ce schéma, il nous est possible d’appréhender les quatre principales fonctions d’un
e-manager, à savoir celle de pilote (rôle d’innovateur et de coordinateur avec pouvoir de
décision, gestion des priorités, des objectifs et des résultats), celle de soutien (rôle de moniteur
et de producteur, un rôle d’aide et de développement), celle d’autorité (avec le rôles de
directeur et de mentor, avec instauration des règles du jeu et le rôle de repère pour l’équipe) et
enfn, celle de relais (avec le rôle de facilitateur, notamment en ce qui concerne les fux
d’informations et les échanges).
Ces différentes fonctions et ces différents rôles concourent à créer une synergie dans le
groupe et à donner une dynamique créatrice de valeur. Mais pour mener à bien une équipe à
distance, il parait important de favoriser un certain nombre d’éléments :
– Quoi de plus effcace qu’un groupe soudé marchant dans la même direction ? Les amateurs
de rugby ne pourront que confrmer l’affrmation mais pour avoir un groupe suffsamment
solide il faut des engagements initiaux également solides. La première action facilitant une
synergie mobilisatrice au sein du groupe sera donc d’obtenir dès la constitution de l’équipe un
engagement fort des membres dans les tâches à accomplir ainsi que dans le groupe lui-même.
Le manager d’une équipe à distance aura dans ce cadre un effort à faire pour à la fois obtenir
cet engagement mais également pour le maintien de ces engagements jusqu’à la fn des
travaux à réaliser. Dans le même sens, la manager devra veiller à maintenir la dynamique de
départ en stimulant l’attention de ses collaborateurs (par des newsletter, messages diffusés
collectivement…) pour qu’ils gardent à l’esprit le travail à effectuer.
– Dans un contexte de travail collaboratif à distance, la perception et la compréhension des
activités de ses collègues sont primordiales pour ajuster sa propre activité. Les problèmes que
rencontrent les équipes virtuelles peuvent être liés à un manque de visibilité sur les activités et
les comportements des membres. Pour palier à ces diffcultés, un bon « dosage » de
conscience du collectif au sein de l’équipe peut être une bonne réponse. La conscience
collective joue un rôle important dans la gestion des relations interpersonnelles et alors que
les relations deviennent de plus en plus virtuelles grâce à la collaboration via les technologies,
la conscience collective réduit les efforts requis pour la coordination des tâches et des
comportements. Elle fournit également un contexte permettant d’interpréter les expressions et
d’anticiper les actions des autres, c’est un atout majeur pour manager une équipe dispersée.
Pour ce faire, les managers doivent également veiller au développement des relations
interpersonnelles entre membres de l’équipe et plus particulièrement le développement de la
confance. Cette variable, au sein d’une équipe à distance, est un facteur permettant de
résoudre les problèmes liés au contrôle et à la supervision qui deviennent diffcilement
réalisables dans le contexte des équipes virtuelles.
Alors que d’un côté, elle est considérée comme un facteur important pour la coopération, la
coordination et l’exécution du travail en l’absence des mécanismes traditionnels de contrôle,
il devient diffcile, d’un autre côté, de l’instaurer et de la développer, étant données la
dispersion géographique des membres des équipes virtuelles, leur diversité et la durée de vie
de l’équipe parfois courte. L’un des rôles clefs de « l’e-leader » est donc de favoriser
l’émergence et le développement d’une telle confance entre les membres de l’équipe pour ne
pas avoir à utiliser le contrôle et la supervision. Mais encore faut-il que celui-ci ait confance
en ses collaborateurs et en la confance elle-même en tant que moyen d’ajustement collectif.
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– L’animation des « télétravailleurs » oblige de passer d’une gestion du groupe à une gestion
beaucoup plus individualisée devant permettre à chacun de trouver sa place. Ce que le
télétravail permet de gagner en matière d’affrmation individuelle, il le perd en production
d’identités collectives stables et de culture de groupe. Cette animation individualisée et
personnalisée se traduit par des efforts supplémentaires pour le manager mais nécessaires
pour reconstituer le lien rompu.
Des efforts pour garder le contact, des efforts pour mobiliser, des efforts pour animer un
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réseau éparpillé sans se reposer uniquement sur la technique qui ne fournit pas le pont
suffsant pour la transmission de l’affectif. Alors que des employés centralisés permettent plus
facilement un style de management réactif et correctif, la dispersion implique des managers
pro-actifs.
Le management s’il est à distance doit forcément s’individualiser, passant d’une gestion de
groupe à une gestion d’individus éparses.
La donne est nouvelle : on gère des personnes dispersées, et la notion de groupe a tendance à
s’effriter. Du coup, le rôle d’interface organisationnelle du télétravailleur avec l’entreprise
devient prépondérant pour le manager.
Ce changement de rôle du management, allant vers un rôle plus de mobilisateur et de support,
se concrétise notamment à travers un glissement des tâches de contrôle et d’ordres donnés
vers des tâches d’animation individuelle plus que collective.
– Le management des équipes virtuelles présente également d’autres particularités. Chacun
étant plus autonome et l’ajustement mutuel moins fréquent, le manager doit pouvoir compter
sur la ponctualité de ses collaborateurs par rapport aux échéances et sur la précision de leur
travail par rapport au cahier des charges. Mais comment imposer une telle discipline sans la
suivre soi-même ? Le manager doit donc veiller à une autodiscipline rigoureuse.
La confance passe par le respect des règles internes et un suivi précis du planning. La
qualité de la coordination passe par une communication soignée, rigoureuse et équilibrée.
L’équilibre entre la communication sur les activités opérationnelles et sur les rapports
interpersonnels doit être observé par le manager. Créer un lien social apparaît important
pour les collaborateurs qui peuvent s’estimer parfois trop isolés. La communication doit être
soignée en raison de l’aspect multiculturel des équipes. Chaque mot ou phrase peut être
perçu différemment et conduire à des malentendus.
Rigoureuse, la communication doit être très précise sur les détails des objectifs à atteindre, les
délais, les ressources à utiliser, les méthodes à employer, etc., pour réduire les risques
d’ambiguïtés, de confusion.
2.3 La gestion des confits à distance
Comme nous l’avons observé jusqu’ici, le passage en travail distant remet en cause les modes
de coordination habituels des équipes. La supervision directe perd de son effcacité, car
l’autorité ne peut plus s’exercer à la voix et au regard. L’ajustement mutuel ne peut plus
s’appuyer sur les échanges informels qui se déroulaient « naturellement » lorsque les agents
étaient réunis dans un même lieu. Les nouvelles technologies restituent en partie une capacité
d’interaction dans le collectif de travail, mais d’une façon plus structurée. Cela impose de
construire d’autres modes de régulation, tant pour la conduite des équipes que la gestion des
personnes.
La relation de distance entre le manager et son équipe appelle des modes de collaboration plus
explicites : la nécessité est plus grande pour chaque membre de l’équipe virtuelle – encadrant,
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comme collaborateurs – de s’inscrire dans un management contractuel et de recourir à une
certaine formalisation et explicitation du travail, que ce soit dans la manière de le réaliser, que
dans la fxation des objectifs et leur évaluation .
Mais soumises à des décalages culturels, géographiques et temporels, les équipes virtuelles
sont nettement plus sensibles aux confits que les équipes de proximité. La raison principale
de cette situation est que la diversité culturelle entraîne des représentations différentes entre
les membres de l’équipe et ces représentations entraînent à leur tour des interprétations
différentes facilitant incompréhension et confit.
Autre élément expliquant cet état de fait c’est qu’il est nettement plus facile de couper toute
collaboration, toute communication lorsque l’on travail à distance. La proximité et la
familiarité née de la rencontre quotidienne diminue très fortement cette capacité.
Il est donc plus que jamais important de développer une confance et une conscience
collective entre les membres du groupe pour éviter de se retrouver rapidement en face d’un
confit diffcilement résoluble. Les dangers d’un tel confit sont, outre la baisse de
productivité induite par des retards ou travaux incomplets, un risque d’expansion du confit
aux autres membres de l’équipe, voire à l’ensemble de l’équipe, un arrêt de contribution aux
travaux de tout ou partie de l’équipe.
Afn de limiter ce genre de blocage dont il est diffcile de prévoir la sortie, un certain nombre
de préconisation peuvent être faites :
– Favoriser au sein de l’équipe éparpillée une libre expression de chaque membre tout
en gardant l’œil sur les échanges pour agir très rapidement en cas de débordement.
– Mettre en place, dès l’émergence du confit, une réunion électronique entre les
membres en désaccord pour éviter à la fois un blocage et l’expansion du confit aux
autres membres.
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– Se positionner en tant qu’animateur voire médiateur pour permettre par la discussion
de trouver rapidement une sortie de crise gagnant-gagnant.
Animer une équipe à distance semble donc être une délicate mission à assurer, c’est avant tout
une gestion d’individus isolés qu’il faut arriver à faire travailler ensemble en misant sur
l’instauration d’une confance et d’une conscience collective partagée. Elle demande
également une nouvelle appréhension de ce que manager veut dire : au delà du simple
exercice de l’autorité, le management d’une équipe à distance doit passer par de nouvelles
compétences managériales axées sur la position de support et de vecteur pour le groupe tout
en mobilisant un réseau relationnel et des compétences plus psychosociologiques.
Mais mobiliser les énergies pour dynamiser un groupe virtuel, tout en veillant à résoudre les
confits dès leur apparition, n’est possible que si l’équipe est réellement et effcacement
coordonnée et si chacun au sein de ce collectif possède une place qui lui est propre.
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3 Coordonner une équipe à distance
3.1 La gestion des temps
Dans le management d’équipe à distance, le temps représente une part importante dans la
coordination des équipes. En effet, le manager doit tenir compte de plusieurs facteurs temps
qui vont fortement affecter l’avancement du projet. Tout d’abord le temps lié aux fuseaux
horaires, le temps lié aux législations de travail des pays concernés et enfn le temps lié au
projet lui-même qui possède une date de rendu fnal.
Prenons le cas d’une entreprise internationale possédant des structures sur quatre continents :
Europe, Amérique, Asie et Australie. Le manager qui aura composé son équipe projet devra
tenir compte de cette gestion du temps différente selon les continents. En effet, le décalage
horaire, par exemple, peut avoir une infuence sur l’état de santé du collaborateur.
Si le manager décide d’organiser une réunion virtuelle à 16H00 (en France), le décalage
horaire impliquera que :
– Aux Etats-Unis il est 10H00 du matin ;
– En Australie il est 1H00 du matin ;
– Au Japon il est 00H00.
Ici on voit bien que le japonais et l’australien doivent veiller en dehors de leurs heures de
travail pour pouvoir assister à cette réunion. La situation peut très vite devenir insoutenable
surtout si les réunions deviennent hebdomadaires. La fatigue peut rendre le collaborateur
moins réceptif et plus aigri, il sera alors démotivé par le projet.
Le manager doit donc faire en sorte de planifer ses réunions en tenant compte de ce facteur et
s’assurer que ce ne sont pas toujours les mêmes qui subissent le temps. En établissant un
roulement, il rendra tout le monde égal dans le projet.
Cependant le temps ne concerne pas uniquement les fuseaux horaires, chaque pays travaille à
un rythme différent. En effet, si en France le collaborateur travaille 35H par semaine, au
Japon ce temps dépassera les 40H. Ceci veut donc dire qu’un collaborateur, en fonction du
pays où il se trouve, aura plus ou moins de temps pour terminer une mission qu’on lui aura
confée. Cette limite aura pour conséquence de générer un stress supplémentaire.
C’est pourquoi, lors de la planifcation du projet, il devra sérieusement mesurer la diffculté
de chacune des tâches à confer. En confant les tâches les plus longues à aboutir aux
collaborateurs qui possèdent un temps de travail supérieur, le manager réduira les taux de
retard pour les rendus. D’autant plus qu’il a des comptes à rendre à sa direction.
Le manager doit donc analyser l’environnement et les emplois du temps de chacun pour
planifer au mieux l’ensemble du projet (missions, réunion). Il doit maîtriser cette vision
globale du temps s’il veut parvenir à atteindre les objectifs fxés.
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3.2 Une gestion par les résultats
La gestion d’un projet implique qu’il y ait des résultats. Cependant, le manager ne peut pas
obtenir ces résultats s’il compte que sur lui-même. Pour développer des facteurs de succès, le
manager doit surtout porter attention aux hommes et à la valeur du projet qui leur est confé
pour favoriser la mobilisation des collaborateurs et stimuler l’activité de l’équipe.
Lors d’un projet, le responsable reçoit beaucoup d’informations. Son rôle est de les partager
car le partage stimule la dynamique des échanges et pousse les collaborateurs à s’investir
complètement dans l’aventure. L’échange continu d’informations stimule l’initiative et donne
plus d’autonomie aux membres de l’équipe. Ceci permet de distribuer plus largement les
responsabilités. Chaque acteur est responsable auprès de ses coéquipiers et pas uniquement
auprès du manager. Ainsi chacun est reconnu au vu de sa contribution. C’est une manière de
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valoriser le rôle de chacun.
De plus, le manager doit s’assurer que chacun se sente bien impliqué, notamment les
collaborateurs qui sont les plus éloignés. Il ne doit pas hésiter à les contacter régulièrement.
Selon Myriam Barni il existe de nombreuses actions engagées par les managers qui visent