FORMATION ET IDENTIFICATION DU DROIT INTERNATIONAL COUTUMIER
Chapitre VII
A. Introduction
63. La Commission, à sa soixante-quatrième session
(2012), a décidé d’inscrire le sujet « Formation et identifi-
cation du droit international coutumier » à son programme
de travail, et a nommé Sir Michael Wood Rapporteur
spécial pour le sujet380. Au cours de la même session,
la Commission a été saisie d’une note du Rapporteur
spécial381. À la même session également, elle a prié le
Secrétariat d’établir une étude recensant les éléments des
travaux antérieurs de la Commission qui pourraient être
particulièrement utiles pour ce sujet382.
B. Examen du sujet à la présente session
64. À la présente session, la Commission était saisie du
premier rapport du Rapporteur spécial (A/CN.4/663), ainsi
que d’une étude du Secrétariat sur le sujet (A/CN.4/659).
Elle a examiné le rapport de sa 3181e à sa 3186e séance,
du 17 au 25 juillet 2013.
65. À sa 3186e séance, le 25 juillet 2013, la Commission
a décidé de renommer le sujet comme suit : « Détermina-
tion du droit international coutumier ».
1. PrésentatIOn Par le raPPOrteur sPéCIal
de sOn PremIer raPPOrt
66. Le premier rapport, qui avait essentiellement valeur
d’introduction, se voulait le point de départ des travaux et
débats futurs sur le sujet, et définissait de façon générale
l’approche du sujet préconisée par le Rapporteur spécial. Il
donnait notamment un bref aperçu des travaux antérieurs
de la Commission utiles pour le sujet, et mettait en évi-
dence certains points de vue exprimés par les délégations
dans le cadre de la Sixième Commission durant la soixante-
septième session de l’Assemblée générale. Le Rapporteur
spécial y examinait aussi la délimitation du sujet et la forme
que pourrait revêtir le résultat des travaux, ainsi que, sous
certains aspects, la question du droit international coutu-
mier comme source de droit. Il décrivait ensuite l’ensemble
des sources à consulter, ainsi que le programme de travail
proposé pour les futurs travaux sur le sujet.
380 À sa 3132e séance, le 22 mai 2012 [voir Annuaire… 2012, vol. II
(2e partie), par. 157]. L’Assemblée générale, au paragraphe 7 de sa
résolution 67/92 du 14 décembre 2012, a pris note avec satisfaction
de la décision de la Commission d’inscrire le sujet à son programme
de travail. La Commission avait inscrit le sujet à son programme de
travail à long terme à sa soixante-troisième session (2011), sur la base
de la proposition reproduite à l’annexe I de son rapport sur les travaux
de cette session [Annuaire… 2011, vol. II (2e partie), par. 365 à 367, et
annexe I, p. 189 à 194].
381 Annuaire… 2012, vol. II (1re partie), document A/CN.4/653. Voir
aussi ibid., vol. II (2e partie), par. 157 à 202.
382 Ibid., par. 159.
67. En présentant son rapport, le Rapporteur spécial a
souligné l’importance, pour l’examen du sujet, de l’ana-
lyse de la pratique des États dans tous les systèmes juri-
diques et dans toutes les régions du monde, ainsi que
l’utilité des échanges de vues entre la Commission et
d’autres organes et la communauté juridique dans son
ensemble. Le Rapporteur spécial a également estimé que
l’étude préparée par le Secrétariat, qui présentait ceux des
travaux antérieurs de la Commission qui pourraient être
particulièrement utiles pour le sujet, serait un outil pré-
cieux. Les observations et les notes explicatives contenues
dans ce mémorandum constitueraient d’importants points
de référence pour les travaux futurs de la Commission.
68. Le Rapporteur spécial s’est dit pleinement conscient
de la complexité du sujet et de la nécessité de le traiter
avec prudence afin, notamment, de préserver la souplesse
du processus coutumier. Il a rappelé que l’objectif des tra-
vaux de la Commission ne devait pas être d’examiner le
fond du droit international coutumier ni de résoudre des
différends purement théoriques quant à la base de ce droit.
Il a au contraire proposé que la Commission s’attache à
l’élaboration de conclusions assorties de commentaires
sur l’identification des règles du droit international cou-
tumier. Un tel résultat permettrait de fournir des orienta-
tions pratiques aux juges et aux juristes, en particulier à
des non-spécialistes du droit international public.
69. Compte tenu de l’accent mis sur la méthode d’iden-
tification des règles coutumières, et vu la confusion susci-
tée quant au champ d’application du sujet par la référence
à la « formation » dans l’intitulé, le Rapporteur spécial a
suggéré de modifier celui-ci comme suit : « Détermination
du droit international coutumier ». Même si l’intitulé était
ainsi modifié, les travaux de la Commission porteraient
néanmoins sur l’examen des conditions de formation
des règles du droit international coutumier, ainsi que des
preuves matérielles de ces règles, ces deux éléments étant
nécessaires à la détermination de l’existence d’une règle
de droit international coutumier. Le Rapporteur spécial a
en outre réaffirmé qu’il préférait exclure le jus cogens du
champ d’application du sujet.
70. S’agissant de la question du droit international
coutumier comme source du droit international, le Rap-
porteur spécial s’est d’abord référé au paragraphe 1 de
l’article 38 du Statut de la Cour internationale de Jus-
tice, considéré comme une énumération des sources du
droit international faisant autorité. Le Rapporteur spécial
a ensuite abordé la question des relations entre la cou-
tume et les autres sources du droit international. Tout en
faisant observer que les rapports entre droit international
coutumier et droit conventionnel revêtaient une grande
importance pratique, il a aussi noté que cette question
était relativement bien comprise. À son avis, les rapports
69
70
Rapport de la Commission du droit international sur les travaux de sa soixante-cinquième session
entre droit international coutumier et principes généraux
de droit n’étaient pas toujours aussi nets et devaient faire
l’objet d’un examen attentif de la Commission. Après
avoir appelé l’attention de la Commission sur la néces-
sité d’adopter une terminologie cohérente, le Rapporteur
spécial a proposé de consacrer une conclusion aux termes
employés.
71. Le rapport comprenait aussi une liste indicative
et non limitative de matériaux utiles pour l’examen
du sujet, censés rendre compte de l’approche générale
envers le processus de formation et d’identification du
droit international coutumier. Après un premier examen
de certains matériaux relatifs à la pratique des États,
ainsi que de la jurisprudence de la Cour internationale de
Justice et d’autres cours et tribunaux, le Rapporteur spé-
cial a constaté, à titre préliminaire, qu’à quelques excep-
tions près il ressortait de la quasi-totalité du matériau
examiné que les deux éléments de la pratique des États
et de l’opinio juris étaient considérés comme néces-
saires à la formation d’une règle de droit international
coutumier. Le Rapporteur spécial a en outre fait observer
qu’il serait intéressant d’analyser les travaux menés par
d’autres organismes sur le sujet, comme ceux de l’Asso-
ciation de droit international, de l’Institut de droit inter-
national et du CICR, ainsi que les débats et articles de
doctrine ultérieurs.
72. Tout en indiquant que les deux projets de conclusion
figurant dans le rapport confirmaient son intention de don-
ner cette forme au résultat des travaux de la Commission,
le Rapporteur spécial a estimé qu’il était prématuré de les
renvoyer au Comité de rédaction. Il jugeait préférable de
procéder à des consultations informelles en vue de parve-
nir à un accord sur l’intitulé du sujet et sur l’opportunité
de traiter ou non la question du jus cogens.
2. résumé du débat
a) Observations générales
73.
Il a été généralement convenu que les travaux de
la Commission pourraient éclairer utilement le proces-
sus d’identification des règles du droit international cou-
tumier. Les membres de la Commission ont largement
appuyé l’idée d’élaborer un ensemble de conclusions
assorties de commentaires, résultat pratique qui servi-
rait de référence aux juristes et aux juges n’ayant pas
une grande expérience du droit international public.
Il a été souligné que le droit international coutumier
conservait toute sa pertinence malgré la prolifération de
traités et la codification de plusieurs domaines du droit
international. Par ailleurs, les membres de la Commis-
sion étaient généralement d’avis que les travaux sur
ce sujet ne devaient pas être exagérément prescriptifs,
la souplesse du processus coutumier restant un aspect
fondamental de celui-ci. L’accent a aussi été mis sur le
caractère continuellement évolutif du droit international
coutumier, l’apparition d’une règle ne mettant pas fin au
processus de formation.
74. Certains membres ont fait valoir la nécessité de
déterminer la valeur ajoutée susceptible d’être apportée
au sujet par la Commission, et de distinguer les travaux
sur ce sujet de ses travaux antérieurs et de ceux d’autres
entités. On a dit à cet égard qu’il importait de distinguer
les travaux de la Commission de travaux comparables
entrepris par l’Association de droit international, et de
préciser quelles lacunes la Commission pourrait combler.
75. Plusieurs membres ont relevé la complexité et la
difficulté inhérentes au sujet. Il a été dit que les ambi-
guïtés entourant l’identification du droit international
coutumier avaient été source d’insécurité et d’instabilité
juridiques, et avaient suscité des arguments opportunistes
ou de mauvaise foi quant à l’existence d’une règle de droit
international coutumier. D’une manière générale, il était
donc jugé utile de tenter de préciser le processus d’identi-
fication d’une règle de droit international coutumier.
b) Portée du sujet
76. L’intitulé du sujet soulevait une question prélimi-
naire relative à sa délimitation. Plusieurs membres ont
souscrit à la proposition du Rapporteur spécial de chan-
ger l’intitulé « Formation et identification du droit inter-
national coutumier » pour qu’il devienne, en anglais,
Identification of customary international law, bien que
plusieurs autres membres se soient dits également favo-
rables au maintien de l’intitulé initial. D’autres titres ont
également été proposés, dont The evidence of customary
international law ou The determination of customary
international law. On a dit aussi que la Commission ne
devrait pas aborder les aspects théoriques de la « forma-
tion » et que ce terme devrait donc être supprimé de l’inti-
tulé. En définitive, il était généralement admis que, même
en cas de modification de l’intitulé, il restait important
d’inclure les deux éléments de la formation et de l’iden-
tification du droit international coutumier dans le champ
d’application du sujet.
77.
Il a été généralement convenu que, dans ses travaux,
la Commission devrait principalement s’attacher à préci-
ser l’approche commune retenue pour déterminer la for-
mation et l’identification du droit international coutumier.
Le poids relatif à accorder à l’examen de la « formation »
et à celui de l’« identification » faisait cependant débat.
Certains membres doutaient de la nécessité ou de la per-
tinence, pour les travaux de la Commission sur le sujet,
d’examiner les questions en grande partie abstraites ou
théoriques relatives à la formation du droit international
coutumier. Il a été dit que les notions de « formation » et
d’« identification » étaient diamétralement opposées, la
première renvoyant à des processus dynamiques se dérou-
lant dans le temps et la seconde visant l’état du droit à un
moment déterminé. Plusieurs autres membres estimaient
qu’il était impossible de dissocier le processus de for-
mation des preuves requises pour déterminer l’existence
d’une règle.
78. Un certain nombre de membres ont exprimé leur
accord sur la proposition de ne pas entreprendre une étude
du jus cogens dans le cadre du sujet. Plusieurs membres ont
fait observer que le jus cogens présentait des particularités
quant à sa formation et son identification. La question de
la détermination de l’existence d’une règle de droit inter-
national coutumier se distinguait de celle de savoir si une
telle règle présentait aussi la caractéristique supplémentaire
de ne pas être susceptible de dérogation par voie conven-
tionnelle. On a aussi indiqué qu’il avait été proposé de
Formation et identification du droit international coutumier
71
consacrer éventuellement un nouveau sujet au jus cogens.
Selon d’autres membres, il fallait inclure l’examen du jus
cogens dans le sujet, en raison du lien substantiel entre les
deux concepts, qu’il convenait d’étudier. Certains membres
ont dit qu’il serait utile de se pencher sur la question de la
hiérarchie des sources du droit international, y compris le
droit conventionnel et le jus cogens.
79. Plusieurs membres ont souscrit à la proposition
du Rapporteur spécial d’étudier les rapports entre droit
international coutumier et principes généraux du droit
international et principes généraux de droit. Il a été pro-
posé que la Commission s’efforce de clarifier les rap-
ports complexes et flous entre ces concepts. À cet égard,
certains membres ont fait observer que la distinction
entre les principes généraux du droit international et le
droit international coutumier n’est pas toujours possible.
Une observation analogue a été faite à propos des prin-
cipes généraux de droit et du droit international coutu-
mier. En revanche, certains membres ont estimé qu’il
convenait d’exclure les questions générales relatives aux
principes généraux et aux principes généraux du droit
international sans lien avec la coutume internationale,
vu que toute étude de ces questions reviendrait à élargir
excessivement le sujet.
80. L’idée d’examiner les rapports entre droit inter-
national coutumier et droit conventionnel a été généra-
lement appuyée. Il a été rappelé dans ce contexte qu’il
est généralement admis que les traités peuvent codifier,
cristalliser ou produire des règles de droit international
coutumier. On a aussi observé qu’une règle de droit inter-
national coutumier pouvait jouer parallèlement à une
disposition conventionnelle identique. Un soutien a été
exprimé en faveur de l’idée d’étudier les effets sur le droit
international coutumier de traités multilatéraux réunissant
très peu d’États parties. Il a été proposé que tout examen
des relations avec le droit conventionnel soit reporté à un
stade ultérieur des travaux sur le sujet, la priorité devant
aller à une analyse approfondie des éléments constitutifs
de la coutume internationale.
81. L’examen des relations entre la coutume et les autres
sources du droit international, y compris les déclarations
unilatérales, a par ailleurs été recommandé. Certains
membres ont proposé qu’il soit procédé à une analyse des
interactions entre les instruments ou normes de caractère
non contraignant et la formation et l’identification du
droit international coutumier.
82. Certains membres ont appuyé l’idée d’étudier le
droit international coutumier régional, en mettant particu-
lièrement l’accent sur les rapports entre celui-ci et le droit
international coutumier général. Il a été proposé que, dans
le cadre d’une telle étude, la Commission s’intéresse à la
pratique régionale, y compris les décisions judiciaires,
les accords et les dispositions pertinentes. On a noté à
cet égard qu’il pouvait être difficile de distinguer entre
la pratique d’organisations régionales et celle d’États
individuels.
c) Méthodologie
83. La proposition du Rapporteur spécial tendant à ce
que la Commission examine tant les éléments constitutifs
du droit international coutumier, c’est-à-dire les éléments
qui donnent naissance à l’existence d’une règle de droit
international coutumier, que les critères requis pour
démontrer l’existence de ces éléments a recueilli un large
appui. L’idée de mettre l’accent sur le processus pratique
d’identification des règles du droit international coutumier
plutôt que sur le contenu de ces règles a aussi été géné-
ralement appuyé. Il a cependant été estimé qu’il serait
impossible de distinguer totalement le fond des règles
primaires de l’analyse des règles secondaires applicables.
Selon un autre point de vue, l’approche de l’identification
des règles devait s’appuyer sur des exemples illustratifs
de règles primaires.
84. La proposition du Rapporteur spécial tendant à
examiner soigneusement la pratique des États et l’opinio
juris sive necessitates, communément reconnus comme
étant les deux éléments constitutifs de la coutume inter-
nationale, a également recueilli un large appui. Plusieurs
membres ont fait observer que la détermination des règles
du droit coutumier devait être fondée sur un examen de la
pratique des États, et qu’il convenait de prendre dûment
en considération le caractère général, continu et représen-
tatif de cette pratique. Il a été convenu que les actes inter-
nationaux ne produisaient pas tous des effets juridiques à
cet égard, s’agissant en particulier des actes de bienveil-
lance et de courtoisie. Quelques membres ont, de même,
été d’avis que certaines prises de position des États pou-
vaient ne pas refléter l’opinio juris, en particulier lorsque
l’État l’indiquait. Plusieurs membres ont estimé qu’il était
difficile de déterminer l’existence de la pratique des États
et/ou de l’opinio juris requises. Il a aussi été signalé que
l’opinio juris pouvait se manifester tant par des actes que
par des omissions.
85. L’attention a été appelée sur la nécessité d’étudier
soigneusement les aspects temporels de l’approche fon-
dée sur les « deux éléments », s’agissant en particulier
de la question de savoir si l’opinio juris peut précéder la
pratique des États, et si une règle de droit international
coutumier peut apparaître en un bref laps de temps. L’uti-
lité de déterminer le poids relatif à accorder à la pratique
des États et à l’opinio juris a aussi été évoquée. À cet
égard, il a été estimé que les travaux de la Commission
sur le sujet pourraient être déterminants pour combler
l’écart entre les conceptions « classique » et « moderne »
du droit international coutumier. Selon d’autres membres,
s’il était important d’analyser les différentes approches du
droit international coutumier, les qualifier au moyen de
termes comme « classique » ou « moderne » était inutile
ou trompeur.
86. Plusieurs membres ont convenu que la Commission
devrait tenter d’élaborer une approche commune et unifiée
de la détermination des règles du droit international cou-
tumier, dès lors que ces règles se forment dans un système
juridique international unique, où tout se tient. Selon le
point de vue de plusieurs autres membres, il ne fallait pas
partir de l’idée d’une approche systémique ou unitaire de
l’identification des règles dès lors que cette approche pou-
vait varier selon la branche du droit international consi-
dérée. L’avis selon lequel le poids relatif à accorder aux
preuves d’une pratique étatique ou d’une opinio juris pou-
vait varier en fonction du domaine a été exprimé. Notam-
ment, une valeur différente serait accordée à certaines
72
Rapport de la Commission du droit international sur les travaux de sa soixante-cinquième session
sources dans divers domaines du droit international. En
particulier, le « droit souple » (soft law) peut jouer un plus
grand rôle dans la formation de la coutume internationale
dans certains domaines.
Il a été en outre suggéré que la Commission examine,
lorsqu’elles existent, les analyses de conseillers juridiques
des gouvernements, ainsi que la pertinence d’échanges de
vues confidentiels entre États.
87. Selon un avis, l’approche proposée par le Rappor-
teur spécial ne rendait pas dûment compte de la distinc-
tion entre sources formelles et sources matérielles du
droit international coutumier. Par ailleurs, sa proposition
de reprendre la définition de la coutume internationale
figurant dans le Statut de la Cour internationale de Jus-
tice était peut-être inopportune. Certains membres esti-
maient qu’une définition du droit international coutumier
devrait prendre en considération le paragraphe 1 b de
l’article 38 du Statut de la Cour, notamment parce que les
éléments constitutifs qui y sont énoncés sont largement
cités et acceptés, mais que toute définition élaborée par la
Commission devrait être surtout axée sur les principaux
éléments qui confèrent à la coutume internationale son
caractère obligatoire.
88. Certains membres ont aussi souligné l’importance
que revêtirait l’examen du processus d’obsolescence
d’une règle de droit international coutumier.
89. Plusieurs membres ont recommandé à la Commis-
sion d’examiner le rôle d’autres acteurs dans la formation
de la coutume internationale et, plus particulièrement,
la valeur juridique potentielle de décisions de sujets sui
generis de droit international comme le CICR. Selon un
avis, de tels acteurs et groupes d’intérêts jouent un rôle
non négligeable dans le développement, et le rythme de
développement, de la coutume internationale dans cer-
tains domaines. Selon un autre point de vue, il fallait
accorder une moindre valeur aux décisions de certaines
organisations non gouvernementales qu’à la pratique ou
aux déclarations des États.
d) Ensemble de matériaux à consulter
90. L’ensemble de matériaux que le Rapporteur spécial
proposait de consulter a été généralement approuvé. Il a
néanmoins été suggéré de ne pas accorder la même valeur
probante aux différents matériaux.
91. La proposition tendant à analyser soigneusement la
pratique des États a été largement appuyée. Selon un avis,
les matériaux concernant cette pratique devraient prove-
nir de toutes les régions du monde, bien qu’il soit regret-
table que tous les États ne publient pas d’étude de leur
pratique. Il a été dit que la pratique étatique dans certains
domaines pouvait être limitée, étant donné que les États ne
participent pas tous à la formation de certaines règles du
droit international coutumier. Plusieurs membres ont pro-
posé que la Commission fasse porter ses recherches sur
les décisions de juridictions nationales et les déclarations
de représentants des États, ainsi que sur la conduite des
États. L’idée selon laquelle la Commission devrait exa-
miner soigneusement le comportement effectif des États
a été exprimée, en particulier lorsque celui-ci ne corres-
pond pas aux déclarations nationales. L’attention a aussi
été appelée sur les arguments avancés par les États devant
les cours et tribunaux internationaux, car ceux-ci peuvent
fournir des indications utiles sur leur position quant à la
formation et l’identification de la coutume internationale.
92. S’agissant de la jurisprudence des juridictions natio-
nales, plusieurs membres ont convenu qu’il faudrait la
considérer avec la prudence et la réserve nécessaires, en
recherchant la cohérence. La manière dont les juridictions
nationales appliquent le droit international coutumier
dépend du droit interne, et les juges internes n’ont pas
nécessairement beaucoup d’expérience en droit inter-
national public.
93. La proposition visant à examiner la jurisprudence
des juridictions internationales, régionales et infrarégio-
nales a été généralement appuyée. Plusieurs membres se
sont notamment exprimés en faveur d’une analyse de la
jurisprudence de la Cour internationale de Justice, cer-
tains membres estimant qu’elle pouvait être considérée
comme la principale source de matériaux sur la formation
et l’identification des règles du droit international coutu-
mier dès lors que la Cour est l’organe judiciaire principal
de l’Organisation des Nations Unies dont l’autorité sur
ces questions est largement reconnue. Il a été dit que les
avis consultatifs, bien que dépourvus de force obligatoire,
méritaient peut-être aussi d’être pris en considération.
Plusieurs membres ont également souligné l’intérêt d’une
analyse de la jurisprudence d’autres cours et tribunaux
internationaux, compte tenu en particulier du fait que cer-
tains d’entre eux divergent dans leur appréciation de la
coutume internationale.
94. L’avis selon lequel la Commission devrait veiller à
ne pas trop se fonder sur la jurisprudence a été exprimé,
les cours et tribunaux étant chargés de régler des diffé-
rends particuliers, et non de développer des procédures
ou des critères juridiques internationaux uniformes. Selon
certains membres, la différence d’approche apparente
entre les juridictions ne correspondait peut-être en réalité
qu’à des variations de nature rédactionnelle.
95. De l’avis général, le rôle de la pratique des
organisations internationales et régionales méritait d’être
pris en considération. L’attention a été appelée sur la
valeur des résolutions, déclarations, recommandations
et décisions de ces organisations comme preuves éven-
tuelles de la pratique des États et de l’opinio juris. Il
convenait cependant d’accorder une plus grande valeur
probante à la pratique des organes intergouvernementaux
des organisations internationales.
96. Certains membres ont estimé que la Commission
ne devrait pas avoir une conception trop restrictive du
« droit » dans le cadre de ses travaux sur le sujet. Il fal-
lait notamment garder à l’esprit que les normes de « droit
souple » (soft law) contribuent aussi à la formation des
règles du droit international coutumier.
Il a aussi été observé que la doctrine éclairerait uti-
97.
lement le sujet. L’attention a été appelée sur le fait que les
auteurs appuyaient largement une approche de la coutume
internationale fondée sur les « deux éléments », mais que
certains prônaient d’autres approches.
Formation et identification du droit international coutumier
73
e) Travaux futurs sur le sujet
98. L’idée générale était que la Commission devrait pro-
duire un résultat pratique qui serait utile aux praticiens et
aux juges. Il a été cependant rappelé que, quel que soit le
résultat des travaux de la Commission, celui-ci ne devrait
pas altérer la souplesse du processus coutumier ni com-
promettre les développements futurs concernant la forma-
tion et l’identification du droit international coutumier.
99. Le plan de travail proposé par le Rapporteur spé-
cial pour le quinquennat a aussi été généralement appuyé.
Plusieurs membres ont cependant estimé que le calendrier
envisagé était trop ambitieux et n’était peut-être pas réa-
lisable en raison des difficultés inhérentes au sujet, même
s’il a été par ailleurs noté que la proposition de mettre
l’accent sur les questions pratiques pourrait en faciliter la
réalisation. En outre, l’idée que la Commission demande
aux États de lui communiquer des informations sur leur
pratique relative au sujet au plus tard le 31 janvier 2014
a été généralement bien accueillie. Selon un avis, il était
regrettable que les États n’aient encore fourni aucune
information à cet égard.
100. Plusieurs membres se sont dits favorables à l’idée
d’élaborer un glossaire de termes dans toutes les langues
afin d’uniformiser le sens et l’usage de la terminologie.
L’utilité pratique que pourrait présenter un tel exercice a
été soulignée. Selon d’autres membres, un lexique rigide
de termes n’était pas souhaitable car une expression géné-
rale telle que « règles de droit international » ne reflétait
peut-être pas exactement tout l’éventail du droit inter-
national coutumier, qui comprend des principes et des
normes tout autant que des règles. Selon un autre point de
vue, un lexique ou glossaire de termes risquait de ne pas
apporter la clarification souhaitée, vu la difficulté de sou-
tenir que certains termes sont systématiquement employés
tandis que d’autres ne le sont pas. L’attention a aussi été
appelée sur l’usage variable de termes et de normes par la
Commission elle-même dans l’identification des règles du
droit international coutumier.
3. COnClusIOns du raPPOrteur sPéCIal
101. Le Rapporteur spécial a constaté que les membres
de la Commission s’accordaient généralement à consi-
dérer que le résultat des travaux sur le sujet devrait
avoir un caractère essentiellement pratique. À cet égard,
l’idée d’élaborer une série de « conclusions » assorties
de commentaires a été largement appuyée. Le Rappor-
teur spécial a aussi noté que les membres appuyaient de
manière générale l’approche fondée sur les « deux élé-
ments », c’est-à-dire celle qui considère que l’identifica-
tion du droit international coutumier requiert une analyse
tant de la pratique des États que de l’opinio juris, étant
entendu que les deux éléments pouvaient parfois être
« étroitement imbriqués » et que le poids relatif à accorder
à chacun d’eux pouvait varier selon le contexte.
102. Les membres de la Commission semblaient favo-
rables à une approche unifiée ou commune de l’identifica-
tion du droit international coutumier.
103. S’agissant de la délimitation du sujet, les membres
semblaient être largement favorables à l’idée d’examiner
les rapports entre la coutume internationale et les autres
sources du droit international, y compris le droit conven-
tionnel et les principes généraux du droit. Nombre d’entre
eux ont aussi manifesté un intérêt pour l’examen du droit
international coutumier au niveau régional. S’agissant
du jus cogens, le Rapporteur spécial a constaté que les
membres étaient généralement d’accord pour ne pas le
traiter en détail dans le cadre du sujet à l’examen.
104. À propos de son intention de clarifier la termino-
logie et des inquiétudes qu’elle a suscitées, le Rapporteur
spécial a indiqué que son objectif était essentiellement
de favoriser la clarté du raisonnement, ajoutant que la
Commission était parvenue, au fil des années, à clarifier
et uniformiser jusqu’à un certain point la terminologie
dans de nombreux domaines du droit international. Il y a
néanmoins un équilibre à trouver entre clarté et souplesse.
105. Le Rapporteur spécial s’est dit conscient que sa
proposition d’achever les travaux sur le sujet d’ici à 2016
n’était peut-être pas réalisable, en raison de la nécessité
d’allouer suffisamment de temps à la recherche, à l’étude
et à la réflexion au sein de la Commission, de la Sixième
Commission et de la communauté internationale plus
généralement. La date proposée ne constituait qu’une date
cible, et n’impliquait aucune précipitation injustifiée.
106. S’agissant de la proposition de modifier l’intitulé
du sujet, le Rapporteur spécial a noté que cette ques-
tion avait fait l’objet de consultations informelles. Un
consensus avait pu être dégagé sur l’intitulé dans toutes
les langues officielles, notamment Identification of cus-
tomary international law en anglais et « Détermination
du droit international coutumier » en français. Le Rappor-
teur spécial a recommandé que l’intitulé soit modifié en
conséquence.
107. Le Rapporteur spécial s’est réjoui de l’important
débat relatif à la publication de la pratique des États, et
a indiqué qu’une première étape utile serait l’élaboration
d’une liste exhaustive des publications et répertoires exis-
tants. L’idée de réitérer l’appel adressé aux États pour
qu’ils communiquent des informations sur leur approche
de la déte