Chapitre 98
Gypsothérapie
J.M. CLÉMENT
Points essentiels
■ Délégation ou glissement de taches entre Médecins prescripteurs et exécutants.
■ Réalisation correcte des prescriptions écrites.
■ Définir la formation du personnel exécutant au sein du service.
■ Contrôle systématique des immobilisations par les prescripteurs.
Qu’est-ce que la gypsothérapie ? sur quel décrêt s’appuie-t-elle ? quelle est la
formation à acquérir pour devenir gypso et améliorer sa pratique ? quel est le lien
avec le prescripteur ?
1.
Introduction
2. Historique
Nous savons, par les découvertes de squelettes, que les hommes préhistoriques
réduisaient les fractures et maintenaient les fragments en place par un
appareillage.
Correspondance : J.M. Clément, Orthopédiste Orthésiste Podologiste
Centre de Médecine et de Traumatologie de Sport – 61 bis, avenue de la Libération, 54520 Laxou.
Tél. : 03 83 55 52 60 – 06 23 00 84 77
E-mail : clement.orthopedie@orange.fr
GYPSOTHÉRAPIE
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« On a en effet trouvé assez de consolidations osseuses satisfaisantes pour que
nous puissions douter de leur expérience chirurgicale » (Lucien Diamant-Berger,
les Annales, février 1959) (1).
Dans les écrits d’Hippocrate, on trouve la description d’appareils immobilisateurs,
fait avec de la colle de farine pour les fractures du nez, ou pour des appareils de
jambes faits avec de la cire et des bandelettes imbibées de résine.
Au Moyen Âge, on utilise des bandes enduites de blanc d’œuf, on utilise
également la terre glaise, les résines, la farine. Ambroise Paré utilisait des bandes
avec de la cire et aussi des attelles en bois (2).
Dominique Larrey ramena, de la guerre d’Espagne, une technique ou l’on utilisait
le blanc d’œuf et de l’acétate de plomb. Il employait des attelles faites de bois ou
de fer, et également la paille. On devine que ces appareils longs à confectionner,
longs à sécher, pourrissaient souvent et ne donnaient qu’une immobilisation
relative.
Des officiers anglais vers la fin du XVIIIe siècle, remarquèrent en Perse et en
Mésopotamie, l’emploi du plâtre pour traiter les fractures, le procédé consistait à
enduire le membre fracture de plâtre et à le mouler
Ce n’est pourtant qu’au XIXe siècle que se généralisa son emploi en France surtout
après les travaux d’Hergott et de Maisonneuve.
« Le plâtre permet de remplir exactement les indications du principe général de la
contention des fractures : saisir et maintenir, dans un moule inaltérable, le
membre fracture au moment ou il vient d’être rétabli dans sa forme normale »
Chavasse.
Ce décret de compétence de 2004 précise l’exercice de l’infirmier ou de
l’infirmière sur la réalisation des immobilisations, dans les services d’urgences de
consultations et de blocs opératoires, etc. Mais ont-ils ou ont-elles la formation
pour la réalisation d’un acte particulier qui immobilise un segment de membre
dans une position définie par le médecin ou le chirurgien prescripteur, puisqu’il ne
faut surtout pas oublier que nous travaillons par délégation médicale comme tous
les actes de soins que nous réalisons.
Aujourd’hui dans le cursus d’IDE aucune formation sur les immobilisations n’est
donnée, ce qui nous pose un réel problème de qualification et de compétence
dans ce domaine très particulier. Faire une immobilisation n’est pas un acte
anodin ; comment la réaliser dans la bonne position, sans trop serrer les bandes,
mettre assez de ouate, assez de jersey, etc. Il faut une pratique courante pour bien
faire et connaître également les matériaux utilisés tels que plâtre, résine, jersey,
ouate ou thermo formable.
L’intérêt de la délégation de compétence ou glissement de tâches selon les
différentes instances est avant tout un avantage très net pour les services
d’urgence et de consultations. En effet, le médecin prescrit les soins en ce qui nous
concerne : une immobilisation. Pendant que l’infirmier ou l’infirmière réalise cette
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■ TRAUMATOLOGIE : DU BÉNIN AU GRAVE
Décret n° 2004-802 du 29 juillet 2004 relatif aux parties IV et V Annexe.
JO n° 183 du 8 août 2004, page 37 087, texte n° 37086 NOR : SANPO
422530D
Livre III
Axillaires Médicaux titre I
Profession d’infirmier ou d’infirmière
Chapitre I
Section I
Exercice de la profession
Actes professionnels
Article R : 4311.5
Dans le cadre de son rôle propre, l’infirmier ou l’infirmière accomplit les actes ou
dispense les actes suivants visant à identifier les risques et à assurer le confort et
la sécurité de la personne et de son environnement et comprenant son
information et celle de son entourage.
Ligne 26 Recherche de signes de complications pouvant survenir chez un patient
porteur d’un dispositif d’immobilisation ou de contention.
Article R : 4311.7
L’infirmier ou l’infirmière est habilite à pratiquer les actes suivants soit en
application d’une prescription médicale qui sauf urgence, est écrite, qualitative
et quantitative, datée et signée, soit en application d’un protocole écrit,
qualitatif, quantitatif préalablement établi, daté et signé par un médecin.
Ligne 13 Pose de bandages de contention.
Ablation de dispositifs d’immobilisation et de contention :
Article R : 4311.9
L’infirmier ou l’infirmière est habilité à accomplir sur prescription médicale écrite,
qualitative et quantitative, datée et signée, les actes et soins suivant, à condition
qu’un médecin puisse intervenir à tout moment.
Ligne 7 Pose de dispositifs d’immobilisation.
Article R : 4311.10
L’infirmier ou l’infirmière participe à la mise en œuvre par le médecin des
techniques suivantes.
Ligne 8 Pose de systèmes d’immobilisation après réduction.
GYPSOTHÉRAPIE
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immobilisation, le médecin peut faire autre chose, voir un autre patient, terminer
ou compléter un dossier, etc., ce qui est un gain de temps précieux pour les
services concernés. Après réalisation de l’immobilisation, le médecin prescripteur
vient contrôler la mise en place et la parfaite angulation si besoin est, et donner les
consignes orales aux patients.
Dans différents services d’urgence, il existe des pools de Gypsos qui sont de
permanence toute la journée pour effectuer les immobilisations du service. On
peut prendre pour exemple le CH de Mulhouse qui a un pool de Gypsos en
permanence au service de consultations externes qui font les urgences, la
consultation et le bloc opératoire. Ces personnels de consultation ont eu une
formation de plusieurs semaines avec leurs anciens collègues et leurs professeurs
de chirurgie du service pour pouvoir réaliser les immobilisations courantes du
service de Traumatologie ou du service de Rhumatologie.
Nous reconnaissons qu’aujourd’hui dans les services d’urgence de métropole, il
existe un problème « technique », dirons-nous, pour la bonne réalisation de ces
immobilisations. En effet, on demande à notre IDE de service d’urgence d’être
polyvalent. La polyvalence est une bonne chose mais elle peut aussi amener un
certain « désordre » dans le fonctionnement d’un service. À savoir, lorsque la
personne est affectée en traumatologie, elle va commencer une immobilisation
sur un patient et elle ne va pas pouvoir à un moment donné mettre en suspens ce
qu’elle était en train de réaliser pour venir en aide à une autre personne
polytraumatisée qui vient d’arriver dans le service. Il est vrai que quelquefois tout
cela peut perturber le service d’urgence, mais il existe des organisations bien
rôdées aujourd’hui pour pouvoir réaliser ce type de pratique quotidienne.
3. Formation spécifique idéale en gypsothérapie
dans les services d’urgence
Avant toute chose, c’est d’avoir du personnel IDE motivé.
Ensuite, il serait judicieux d’établir une sorte de compagnonnage, c’est-à-dire
d’avoir des Gypsos dans le service de consultation ou de rééducation par exemple,
et que le personnel des urgences puissent suivre ces « compagnons » ou ces
tuteurs dans leur journée de travail pour voir la réalisation et la confection des
différentes immobilisations qu’il serait amené à réaliser au sein des urgences. Ce
système de compagnonnage, à notre sens, doit durer plusieurs jours, voire
plusieurs semaines si l’établissement s’en donne les moyens. Il est vrai que réaliser
une immobilisation n’est pas toujours simple, nous l’avons déjà décrit
précédemment. Il faut connaître les limites, il faut vérifier la bonne position,
connaître l’anatomie, les matériaux mais aussi et surtout faire très attention au
patient, car nous n’avons jamais la même personne en face de nous. Il est vrai que
ce sont souvent les mêmes immobilisations qui se répètent dans la journée :
manchettes, bottes, BABP, etc. mais il s’agit d’un être humain à part entière, à
chaque fois avec ses faiblesses, ses douleurs et ses inquiétudes.
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■ TRAUMATOLOGIE : DU BÉNIN AU GRAVE
Il faut savoir que le patient gardera toujours en mémoire la dernière personne qu’il
aura vue et qui aura réalisé les soins, en l’occurrence l’infirmier Gypsos qui s’est
occupé de lui et c’est ce personnel soignant qui aura le mauvais rôle en cas de
doléances du patient.
Seconde possibilité de formation, c’est de faire appel à des organismes de
formation continue agréés, telle que la AHGTF (Association Hospitalière des
Gypsos Thérapeutes de France) qui regroupent tous les Gypsos de France qui sont
rompus à ces techniques d’immobilisation depuis longtemps et où l’on trouve des
formateurs compétents, qui exercent depuis de nombreuses années dans les
services de consultations de traumatologie. Ils ont vraiment cette expérience
acquise depuis de nombreuses années pour pouvoir transmettre leur savoir. Il faut
noter que les formations dispensées par ces organismes se font sur plusieurs jours,
voire pour certaines sur plusieurs semaines. On ne peut pas s’improviser Gypsos
du jour au lendemain, c’est avec une longue pratique que l’on gagnera ses galons.
Il s’agit d’un acte médical et ça nous ne devons pas l’oublier !
La Gypsothérapie telle qu’elle est définie dans notre présentation est un art. Je
crois que c’est l’art de l’immobilisation : savoir comment faire, bien le faire, bien
se positionner et surtout toujours se conformer à la prescription médicale, c’est la
condition sine qua non.
4. Conclusion
Références
1. Maissonnet J. Petite chirurgie, 3e édition, Pratique Médico Chirurgicale Journalière,
2.
3.
1938, pages 623-26-7.
Les appareils plâtrés en chirurgie et en orthopédie, Laboratoires FISCH et Cie Éditeurs.
Première édition, 1961,page 9.
Décret Infirmier N° 2004-802 du 29 juillet 2004 relatif aux parties IV et V, annexe JO,
n° 183 du 8 août 2004, page 37 087, texte n° 37086 NOR : SANPO 422530 D
livre III.
GYPSOTHÉRAPIE
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