Bibliothécaire : une profession en pleine évolution
De nouvelles compétences pour faire face à la transformation
des technologies, des publics et des besoins
Conférence de Laurence Rey – 23 novembre 2010 – Université de Genève – Sciences II
Responsable de formation professionnelle au Département de l’Information bibliographique et
numérique de la Bibliothèque nationale de France, conservateur des bibliothèques de l’Etat, ancienne
élève de l’ENSSIB (Ecole nationale supérieure des sciences de l’information et des bibliothèques),
Laurence Rey est également ancien professeur d’histoire-géographie. Au-delà de ses nombreux
travaux, Mme Rey a soutenu son travail de diplôme de conservateur sur Les nouvelles compétences
en bibliothèque : profils de poste et plans de formation des personnels au regard de l’évolution des
services.
Introduction. Qu’est-ce qu’une compétence ?
Une compétence est la « mise en œuvre, en situation professionnelle, de capacités qui permettent
d’exercer convenablement une fonction ou une activité » (définition AFNOR-1996). Il faut donc retenir
que cette capacité :
• est propre à chaque agent
• qu’elle se met en œuvre dans un contexte professionnel précis : on est compétent par rapport
à son environnement de travail immédiat.
I. L’évolution des métiers de la bibliothèque et l’essor de la notion de compétence
« A de rares exceptions près, les bibliothèques ne sont pas des organismes autonomes, mais en
quelque sorte des sous-systèmes dépendants d’un environnement plus vaste qu’il faut analyser pour
comprendre leurs transformations ou leurs retards » (D. Renoult. Enseignement supérieur et
recherche : quels métiers pour quelles bibliothèques ? In Bertrand Calenge, Bibliothécaire, quel
métier ? Paris : édition du cercle de la librairie, 2004, p 272).
Pour comprendre l’évolution des métiers de la bibliothèque, il faut d’abord s’intéresser à ce qui fait
évoluer les services des bibliothèques. En effet, les services rendus par les bibliothèques se
transforment en fonction des bouleversements de leur environnement immédiat :
• un nouveau contexte politique
• un nouvel environnement technologique
• de nouveaux besoins des usagers.
A/ Le contexte politique, technologique et social fait évoluer les services, les missions et les
publics des bibliothèques
• Contexte politique : le nouveau management public.
En France, 3 mesures visent à rendre la gestion du personnel des universités plus souple :
La RGPP Révision générale des politiques publiques (assouplir le système
des corps, permettre la polyvalence et la mobilité des fonctionnaires)
la GPEEC (Gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des
compétences)
la loi LRU (liberté et responsabilité des universités).
1
Le nouveau management public exige d’être efficace dans un poste alors même qu’on n’a pas
les diplômes requis : la notion de compétence répond à ce besoin de modularité dans les
capacités à s’adapter à un poste.
• Contexte technologique : le développement de la bibliothèque hybride
:
Définition de la bibliothèque hybride : bibliothèque qui allie des services traditionnels (accueil du
public et documentation imprimée) et des services qui utilisent les possibilités des nouvelles
technologies de l’information et de la communication :
• nouveau type de documentation :
o développement de la documentation électronique
o programmes de numérisation
o archivage de cours en ligne (BU)
• aide à la recherche à distance :
insertion de la bibliothèque sur Internet et dans les nouveaux réseaux sociaux.
• Contexte social : de nouvelles pratiques, de nouveaux publics et de nouveaux besoins
La concurrence d’Internet oblige les bibliothèques à réfléchir à leurs missions
o
o
Avec l’irruption d’Internet, les bibliothèques, autrefois dans une situation de
quasi-monopole, se trouvent mises en concurrence avec d’autres sources
d’information qui ont l’avantage d’être disponibles 24h sur 24, 7 jours sur 7.
La logique du « tout, tout de suite » conduit l’usager à être habitué à avoir
accès directement à la ressource qu’il souhaite en plein texte/image/son,
sans passer par l’intermédiaire d’un catalogue et par une lecture différée sur
un support physique.
Mais les bibliothèques ont un rôle à jouer dans l’organisation de l’accès aux
ressources et dans la validation des sources.
o Les bibliothèques universitaires ont de nouveaux publics qui ont des besoins en
formation
:
allongement
à
et
des
accès
supérieur
l’enseignement
études
élargi (massification de l’enseignement supérieur) ;
En effet, en ce qui concerne la population des étudiants, nous sommes sortis
de l’ère des héritiers, chère à Bourdieu. La massification de l’enseignement
secondaire a conduit à l’université des étudiants qui ne sont pas tous dotés
d’un capital social, économique et culturel. A titre d’exemple, en France 46 %
des étudiants exercent une activité pendant l’année universitaire 1
. Ces
étudiants d’un genre nouveau ont besoin d’aide pour trouver et évaluer les
ressources documentaires (taux d’échec important : sur 3 étudiants inscrits en
L1, un seul parviendra en L3).
nécessité de se former tout au long de la vie : les bibliothèques sont un lieu où
peut s’opérer cette formation, parfois en dehors des cadres scolaires
(learning center –Sheffield – JOUGUELET, Suzanne, Les Learning Centres :
un modèle international de bibliothèque intégrée à l’enseignement et à la
recherche,
ligne]
IGB, Rapport n° 2009-022, décembre 2009
<
http://media.enseignementsuprecherche.gouv.fr/file/2009/33/6/Rapport_Lear
ning_Centers_7-12_RV_131336.pdf)
[en
1
OVE, Enquête conditions de vie des étudiants 2006.
2
B/ Pour mettre en place de nouveaux services, les métiers de la bibliothèque se servent de la
notion de compétence
Dans la gestion des ressources humaines de la fonction publique, au milieu des années 80, on
(dans
assiste à un glissement : la notion de qualification s’efface au profit de la notion de compétence
le monde des bibliothèques en France, au milieu des années 90).
Pourquoi ce glissement ? La notion de compétence, plus souple, permet de composer
rapidement des profils de poste qui s’adaptent aux nouveaux services
La qualification
= capacité validée par un diplôme, forme de reconnaissance officielle, codifiée par la
collectivité. Les industries avaient forgé le système des qualifications que remet en question la
tertiarisation des activités économiques qui conduit à préférer la notion de compétence.
Définition du terme de compétence : « mise en œuvre, en situation, professionnelle de capacités qui
permettent d’exercer convenablement une fonction ou une activité » (définition AFNOR).
La compétence :
• Est une notion plus floue, plus large, qui permet de sortir du champ des validations et des
diplômes. L’intérêt de la notion de compétences est de pouvoir exiger ce qui n’est pas l’objet
d’un diplôme ou d’un concours, essentiellement garants des savoirs.
• Liste de compétences permet de composer des profils de poste à la carte = une notion
beaucoup plus adaptable que la notion de qualification.
• Dans les fiches de postes, à côté des savoirs, qui pourraient correspondre aux qualifications,
on trouve les savoir-faire et les savoir-être qui touchent à des qualités plus personnelles.
• La définition même d’une compétence est beaucoup plus subjective que celle d’une
qualification. Cette définition est l’objet d’un accord entre l’employeur et l’employé. En effet, la
compétence est fonction du milieu professionnel dans lequel elle est exercée et il y a autant
de manières d’exprimer une compétence que de lieux d’exercice.
Conséquence : comment parler des compétences face à cette pluralités des manières d’exprimer les
compétences ? Il vaut mieux parler de domaines de compétences plutôt que des compétences
elles-mêmes car leur formulation varie d’une personne à l’autre.
II. Du foisonnement des nouvelles compétences à l’éclatement des métiers de la bibliothèque
Face aux évolutions politiques, technologiques et sociales, les bibliothèques seraient en train de
changer de stratégie. Comme le note Daniel Renoult, inspecteur général des bibliothèques, « les
bibliothèques sont passées d’une stratégie de l’offre à une stratégie de réponse à la demande »
(rapport «La filière bibliothèques dans la fonction publique d’Etat, situation et perspectives » 2008).
Passage de métiers centrés sur le document à des métiers centrés sur le public, présent ou à
distance
Le métier de bibliothécaire est sensible à des effets de mode.
D’après Sylviane Tribollet (Médiat’Rhône-Alpes), on serait passé de l’obsession de la collection, à
l’obsession informatique puis à l’obsession du service public, devenu cœur de métier. Le centre de la
bibliothèque devient l’usager dont il s’agit de connaître les besoins (Evans, Quel modèle de
bibliothèque ? Presses de l’ENSSIB).
.
3
En outre, en vertu des évolutions sociales et techniques évoquées plus tôt, on note un rapprochement
avec les métiers de la documentation (cf. journées d’études interprofessionnelles les 28 et 29
janvier 2005 à la BnF sur le rapprochement des métiers de la doc et de la bibliothèque «Un métier,
des métiers. Convergences et spécificités des métiers des archives, des bibliothèques, de la
documentation » - abaissement du temps consacré à l’analyse du doc grâce à la mutualisation pour
se consacrer à diffusion et mise à dispo de l’information, services à forte valeur ajoutée- qui supposent
maîtrise des règles juridiques concernant la diffusion de l’information, formation d’usagers, médiation,
expertise pour la conception de système d’information, garantie de qualité du stockage et de l’accès).
Que donnent ces évolutions du point de vue des compétences ?
En vertu des trois grandes évolutions politiques, sociales et technologiques que nous avons vues
précédemment, trois grands domaines de nouvelles compétences sont apparus au sein des métiers
des bibliothèques :
les compétences liées aux nouvelles technologies de l’information et de la communication ;
les compétences liées à l’accueil, à la formation et à la médiation ;
les compétences liées au management
•
•
•
• peut-être un quatrième champ de compétence (mais qui est transversal aux trois premiers),
les compétences en matière de communication interne et externe
:
A/ Les compétences liées aux nouvelles technologies de l’information et de la communication
1/ Pour le travail bibliothéconomique
Depuis les années 90, l’informatisation a déjà transformé les métiers des bibliothèques et la gestion
des documents. Désormais les prêts, les catalogues, les acquisitions sont administrées grâce à des
systèmes intégrés de gestion des bibliothèques (SIGB).
A la fin des années 90, Internet a profondément modifié le travail interne des bibliothécaires par
l’inclusion du travail du bibliothécaire dans un réseau : désormais, les informations bibliographiques et
de notices catalographiques peuvent être récupérées à distance, par dérivation.
Du coup, la nécessité de maîtriser les normes catalographiques n’est plus une compétence
absolument requise. En revanche, les catalogueurs d’autrefois sont remplacés progressivement par
des gestionnaires de systèmes et de catalogues informatiques.
Nouvelles compétences
:
•
•
•
la maîtrise de l’outil informatique ;
capacité à discuter avec des partenaires fournisseurs de données ;
capacité à discuter avec un prestataire de services informatiques.
2/ La dématérialisation de l’information a conduit au développement de bibliothèques hybrides
Nouvelles compétences liées :
• à la recherche, à la conservation, au signalement et à la diffusion de la documentation
électronique ou numérisée ou même de cours en ligne ou de tutoriels pour l’enseignement
supérieur.
• à la création de documentation numérisée (compétences techniques vis-à-vis de documents
textuels mais aussi sonores, iconographiques, etc ; suivi de la chaîne de numérisation et des
contrats de numérisation);
• à la communication et à la valorisation sur Internet (ex : animer le portail d’une bibliothèque ;
fournir et organiser des signets ; présenter les réponses du service de questions-réponse
d’une bibliothèque) (Compétence ancienne mais renouvelée, le bibliothécaire se trouve
confronté à des problèmes d’organisation des savoirs : il met en ordre, il hiérarchise les
ressources, il les signale. En ce sens, il construit un sens au savoir qu’il propose cf B.
4
Calenge. « Le Guichet du savoir : répondre aux demandes de contenus » dans BBF, 2005,
n°4). Cela suppose connaître les paysages mouvants d’Internet et les pratiques des usagers
(blogs, podcasts, réseaux sociaux) ;
Conclusion : à côté de compétences techniques, on voit apparaître des compétences liées à ces
nouveaux types de services :
•
•
compétences juridiques (connaître le droit d’auteur, le droit des contrats) ;
qualités de négociation (ex : négocier un droit d’accès avec un fournisseur de ressources
électroniques) ;
• marketing (ex : benchmarking),
•
infographie, communication ;
• nécessité de parler anglais (ressources et contrats internationaux).
L’exemple du bibliothécaire-système.
Dans le cadre du projet du schéma numérique des bibliothèques, la Direction du livre a organisé
des réunions sur les besoins en formation des professionnels des bibliothèques dans le domaine du
numérique Le but du schéma numérique d'améliorer les conditions de conservation et de diffusion des
ressources numérisées ou nées numériques des bibliothèques auprès de tous les publics, tout en
optimisant les dépenses. Ce rapport présente les travaux du groupe de travail sur la numérisation et le
recensement des documents numérisés existants.
Un des groupes de travail a dessiné le profil-type du professionnel capable de répondre aux besoins
de conservation et de diffusion des ressources numérisées ou nées numériques. Ce professionnel est
appelé bibliothécaire-système ou e-bibliothécaire mais on pourrait le désigner comme un super-
bibliothécaire tant ses compétences sont diverses.
Le niveau requis de ses savoirs est élevé : « les futurs professionnels auront eux aussi un niveau de
connaissances suffisant voir supérieur au niveau exigé par les concours ».
Les savoir-faire très étendus : tant en informatique que sur les techniques de production et
d’indexation des contenus en ligne. En outre, il devra être capable de faire de la veille sur Internet, de
négocier avec les fournisseurs et les éditeurs, d’établir un cahier des charges, de connaitre les
contraintes juridiques liées à la diffusion de documents numériques (droit d’auteur), de discuter avec
des experts, tout en maîtrisant l’anglais.
Les savoir-être ne sont pas oubliés puisque ce travail est rarement solitaire : il lui faudra être capable
de gérer des projets, tout en animant une équipe. Il sera à même de comprendre les besoins des
usagers et de faire montre de pédagogie.
En résumé, les compétences nécessaires étonnent par leur diversité, à tel point que l’on peut se
demander si une seule personne est à même de cumuler toutes ces aptitudes ! Néanmoins, le
groupe de travail conclut qu’il ne s’agit pas d’un nouveau métier mais d’une nouvelle
spécialisation car ce bibliothécaire-système est capable d’insérer ces nouveaux services dans
ceux qui existent déjà. Il fait preuve d’encyclopédisme et de polyvalence et est capable de faire
évoluer ses compétences au fil du temps.
En effet, non seulement toutes les compétences que nous avons évoquées sont nouvelles, mais elles
supposent d’être régulièrement mises à jour que ce soit d’un point de vue technique ou juridique.
Daniel Renoult souligne de ce fait « une élévation globale du niveau de qualification dans la
pyramide des emplois,
l’information étant
exceptionnellement rapide »2
De ce point de vue, les bibliothécaires semblent être lancés dans une course à l’acquisition de
compétences pour suivre le courant de la modernité et adhérer aux nouveaux besoins des
taux d’innovation dans
le domaine de
le
.
2 FRANCE. Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et Ministère de la culture et de la communication.
Inspection générale des bibliothèques. [Daniel Renoult]. La filière bibliothèques de la fonction publique d’Etat, situation et
perspectives. n°2007-029, juin 2008, p. 17
5
usagers. En même temps, il leur faut avoir le recul nécessaire pour comprendre, parmi tous ces
nouveaux outils, ceux qui présentent une vraie pertinence en matière de nouveaux services.
B/ Les compétences liées à l’accueil, à la médiation et à la formation
1/La concurrence d’Internet oblige les bibliothèques à repenser leurs services pour donner à
l’usager
la bibliothèque en offrant un cadre agréable.
l’envie de continuer à
Se développent des compétences :
fréquenter
• dans l’aménagement des espaces.
•
•
•
l’accueil y compris la création de matériel d’accueil pour la communication avec les
usagers (dépliants)
l’action culturelle qui suppose de nouvelles compétences (exemple : expositions
virtuelles et on rejoint
la
communication).
les compétences liées à la prise en compte des besoins des usagers se
développent : enquêtes public, politique documentaire, charte d’accueil, contrôle
qualité (ex : Libqual +)
l’information et de
technologies de
les nouvelles
2/ Parallèlement, dans les pays occidentaux, on note une hausse de nombre d’étudiants et un besoin
croissant de formation tout au long de la vie qui suppose d’avoir accès à des lieux d’information et
de formation que sont les bibliothèques, en particulier en dehors des heures de travail.
Ainsi, émergent les compétences liées à la médiation et à la formation des usagers (information
literacy) qui vont de pair avec un besoin de personnalisation des services.
Cette aide conduit les bibliothèques universitaires à multiplier les formations peut se faire sous forme
de cours obligatoires pour les étudiants des premiers cycles (plan «Réussir en licence). Cependant,
les formations peuvent intéresser également des étudiants plus avancés, voire des chercheurs, qui
ont besoin d’une aide adaptée à leur domaine de recherche spécifique (aide sur mesure). On voit
donc se développer les compétences pédagogiques et organisationnelles pour monter ces formations
(ex : stages à la formation de formateurs).
L’exemple de l’infomobile.
Le service commun de la documentation de Paris VIII est parti du constat que les étudiants avaient du
mal à exprimer leur besoin d’aide pour trouver des ressources documentaires. Un service d’infomobile
a été mis en place. Le principe est simple. Un agent de la bibliothèque circule dans l’ensemble des
espaces publics et il propose son aide à ceux qui semblent en avoir besoin pour s’approprier les outils
de la bibliothèque, collections ou ressources informatiques. D’après les responsables de ce service,
les compétences mobilisées sont principalement de l’ordre du savoir-être : tact ; psychologie ;
capacité à repérer les usagers en difficulté ; capacité à reformuler une question ; pédagogie. Les
compétences documentaires ne sont évoquées qu’en dernier.
Le bibliothécaire ou le moniteur-étudiant est volontaire pour assurer ce service (indiqué dans sa fiche
de poste). L’emploi de personnel non-titulaire comme les moniteurs-étudiants peut être un avantage
dans ce domaine : proximité avec le public ciblé ; aide vis-à-vis le professionnel des bibliothèques
pour comprendre les besoins des usagers.
C/ Les compétences liées au management
Ces compétences sont relativement peu évoquées dans la littérature professionnelle. Le
bibliothécaire aime avoir un métier spécifique et, à cet égard, le management n’appartient pas
spécifiquement aux métiers de la bibliothèque. (Cf Laurence Tarin, directrice de Médiaquitaine, qui
met en garde contre l’effacement du cœur de métier « En survalorisant les tâches de gestion, qui ne
sont pas propres au bibliothécaire, c’est l’identité du métier que l’on participe à diluer. Quel est l’intérêt
6
d’ailleurs de continuer de recruter sur des postes de directeurs de bibliothèques des conservateurs si
ceux-ci se définissent avant tout par leurs compétences managériales » dans n° hors série du BBF,
2006, cinquantenaire du BBF).
Néanmoins, le rôle des compétences liées au management est croissant à cause du contexte
politique dans lequel évoluent les bibliothèques : autonomie de plus en plus grande des
établissements (gestion globale des budgets et des personnels) ; développement du travail
transversal (ex : gestion de projet) + souhait politique dans le cadre de la RGPP de faire évoluer
l’encadrement vers davantage de management.
Tous ces points nécessitent de développer les compétences
liées à
•
l’encadrement ; développement du nouveau management public (notation, formation,
évolution des carrières supposent des connaissances en droit administratif et droit du travail)
• au recrutement ; réductions d’effectifs ; emploi de personnel non-titulaire (ex : moniteurs-
étudiants) qu’il faut recruter et encadrer
• à la conduite de projet ;
• à la communication interne et externe ;
• à la coopération territoriale ; etc.
Or, si ces compétences liées au management apparaissent peu dans la littérature professionnelle,
elles font une entrée notable dans :
•
•
les fiches de poste. Par exemple, le référentiel des compétences Bibliofil’(2005) « identifie
déjà quatre activités principales pour le directeur de bibliothèque dont trois concernent
directement le management : pilotage et encadrement de la bibliothèque ; évaluation et
conduite du changement ; communication externe et valorisation ». Cela vaut pour tous les
niveaux (toutes les catégories sont encouragées à encadrer)
les plans de formation. Sur les plans de formations prévus pour l’année 2010 de 24
bibliothèques universitaires françaises, l’acquisition de compétences liées au management est
citée 80 fois.
Encadrement et connaissance de l’environnement administratif : encadrement (cité dans 14 plans
de formation) ; gestion des ressources humaines (13) ; plans et suivis de formation (11) ; gestion
de projet (10). En revanche, les stages concernant la gestion financière, les indicateurs, la
démarche qualité, la coopération territoriale sont peu cités, alors que les besoins existent.
Attention : certaines compétences émergeantes échappent à cette grille (ex : construction ou
développement durable).
Conclusion : quelle identité pour un métier qui semble éclater entre des domaines de
compétences très diverses ? Distorsion entre plusieurs métiers au sein d’un seul : comment
évoluer d’une compétence à l’autre ?
L’utilisation d’une liste de compétences permet, pour partie, de contourner le problème de la
définition du cœur de métier. Le problème des compétences est que l’on n’a aucune assurance : on
ressent très vite les limites de ses compétences (puisqu’elles ne s’expriment que dans un temps et
dans un contexte donné). Le propre de la compétence est d’évoluer.
Pour faire face à l’évolution des services qui nécessitent de nouvelles compétences, il existe
des outils pour transformer ses compétences.
III. Quels outils pour faire évoluer les compétences ?
7
III. Quels outils pour faire évoluer les compétences ?
Avec la démultiplication des compétences attachées aux métiers de la bibliothèque, comment faire
évoluer les services dans la limite des moyens humains impartis ?
A/ La gestion de projet
Puisque les compétences que l’on trouve en bibliothèque sont éparses, l’idée de la gestion de projet
est d’associer les compétences pour faire aboutir une réalisation. Cf p31 rapport Bruno Van Dooren
(Bibliothèques universitaires et nouvelles technologies, juin 99, p. 18) concernant le numérique,
remarque les limites aux compétences de chacun. Il propose donc : « Les « équipes-projet »
associant les compétences complémentaires (…) organisées autour de projets successifs dont les
objectifs, les coûts et la durée doivent être nécessairement programmés après une étude de
faisabilité ».
On peut donc imaginer, ponctuellement, faire appel à des compétences extérieures ou moduler les
équipes en interne, selon les projets.
B/ Les fiches de poste et la rédaction de référentiels
Pour rédiger les profils de postes qui détaillent les compétences en savoir, savoir-faire et savoir-être,
les référentiels métiers se sont adaptés aux besoins des bibliothèques. En effet, ces référentiels se
basent davantage sur les compétences que sur les corps ou les statuts. C’est le cas du référentiel
Bibliofil’ (2005) ou du référentiel métier de la BnF (2006).
Exemple : dans Bibliofil’, une personne de catégorie A peut être amenée à 6 des 8 emplois-types du
référentiel.
C/ L’entretien d’évaluation et le bilan de compétences
Depuis 2007, dans la fonction publique, un entretien d’évaluation annuel est obligatoire entre l’agent
et son supérieur hiérarchique : il dure environ une heure. Cet entretien, qui s’appuie sur la fiche de
poste, ritualise la réflexion qu’ils mènent sur les compétences et sur la carrière de l’agent. Il s’agit
également de favoriser la mobilité fonctionnelle.
Cet entretien est suivi le plus souvent par un entretien de formation qui permet d’évaluer les besoins
en formation de l’agent : ces besoins recueillis serviront à élaborer les plans de formation. L’agent
peut être également amené à réclamer un bilan de compétences.
Cet entretien doit rendre l’agent acteur de son acquisition de compétences. Le recours à la
formation continue est présenté comme un levier pour l’évolution des services.
D/ La formation continue
Un certain nombre de lois encouragent les personnels à développer leurs compétences par la
formation continue : droit individuel à la formation (DIF) en 2007 (=capital constitué par l’agent en 6
ans, allant jusqu’à 120h). La validation des acquis de l’expérience devrait également mieux être prise
en compte dans l’évolution des emplois (=sortir du système des concours ou intégrer la VAE au
système des concours).
Quel est le rôle de la formation continue par rapport à l’évolution des compétences ?
Le rôle de la formation continue est de sécuriser le changement, accompagner la montée en
compétence (cf Olivier Tacheau –Université d’Angers).
La formation continue peut se faire dans le cadre d’organismes de formation mais elle se répand en
interne. Former ses collègues est une compétence qui se développe.
Exemples
:
• A l’université d’Angers, les cadres animent des sessions de formation continue en interne
pour aider les agents à monter en compétence.
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