Le dispositif de formation
à l’ostéopathie
Inspection générale
des affaires sociales
RM2010-030P
RAPPORT
Établi par
Michel DURAFFOURG
Michel VERNEREY
Membres de l’Inspection générale des affaires sociales
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– Avril 2010 –
IGAS, RAPPORT N°RM2010-030P
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Synthèse
Le développement de l’ostéopathie en France est le produit d’un long cheminement. Entre
2002 et 2007 les pouvoirs publics ont défini un cadre réglementant l’exercice et la formation des
ostéopathes dans des conditions difficiles du fait de l’absence de définition précise de l’ostéopathie
et de l’importance des pressions exercées par les organisations représentant les professionnels de
cette discipline, quels que soient leur statut et leur position.
Deux décrets (les décrets n° 2007-435 du 25 mars 2007 relatif aux actes et aux conditions
d’exercice de l’ostéopathie et n° 2007-437 du 25 mars 2007 relatif à la formation des ostéopathes et
à l’agrément des établissements de formation) réglementent respectivement les actes pratiqués et les
conditions d’agrément des écoles de formation. Mais ces textes ne définissent ni la nature des actes
pratiqués ni le contenu précis de la formation aux concepts et à la pratique de l’ostéopathie.
La pratique de l’ostéopathie est encadrée1 : certaines manipulations sont interdites (les
manipulations gynéco-obstétricales et les touchers pelviens) suite aux positions exprimées par le
Collège national des gynécologues et obstétriciens français et par l’OMS ; d’autres manipulations
(les manipulations chez le nourrisson de moins de 6 mois et les manipulations du rachis cervical)
ne sont réalisables qu’après un diagnostic médical attestant de l’absence de contre-indication
médicale à l’ostéopathie. Mais la Haute Autorité de santé n’a pu définir, selon ses règles de
validation, les bonnes pratiques applicables.
Quant à la formation, elle se fait par la voie des diplômes interuniversitaires de « médecine
manuelle – ostéopathie » pour les médecins, ou par la voie des écoles privées agréées, pour les
professionnels de santé et pour les simples bacheliers.
Les conditions d’agrément de ces écoles, fixées par les textes, se sont par ailleurs révélées fragiles
face aux contentieux, dans le cadre d’une procédure d’agrément de faible qualité juridique.
A la date de rédaction du présent rapport 45 écoles sont agréées (24 écoles dispensant une
formation ouverte à tous et 21 écoles étant réservées aux professionnels de santé). Mais près d’un
tiers des écoles ont obtenu cet agrément sur recours gracieux à la suite, le plus souvent, d’un avis
défavorable de la commission nationale d’agrément.
Le nombre d’écoles a ainsi augmenté considérablement du fait de l’importance des recours
de la part des promoteurs. L’afflux des contentieux et le volume extrêmement élevé de jugements
contraires à l’administration, ont ainsi conduit à des agréments ministériels alors que la commission
avait émis des avis défavorables, situation conduisant à une véritable dé-crédibilisation de la
procédure.
Au vu des données issues du recensement des écoles agréées à la fin de l’année 2009, la
mission estime, qu’à partir de 2011, entre 1 500 et 2 000 nouveaux ostéopathes sortiront diplômés
de ces écoles chaque année ; plus de la moitié d’entre eux étant des ostéopathes non professionnels
de santé. Si on ajoute
titulaires annuellement du diplôme
interuniversitaire de « médecine manuelle – ostéopathie », on obtient un flux de plus de 2 000
nouveaux ostéopathes chaque année, soit un doublement du nombre total d’ostéopathes en cinq
ans.
les quelque 250 médecins
1 Mais l’encadrement de l’exercice ne s’applique pas aux professionnels de santé ostéopathes, dès lors qu’ils sont
habilités à réaliser ces actes dans le cadre de l’exercice de leur profession de santé et dans le respect des dispositions
relatives à leur exercice professionnel.
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La synthèse des contrôles montre la grande hétérogénéité des formations.
La mission a engagé cinq contrôles d’écoles agréées qui ont donné lieu à quatre rapports
contradictoires ; la cinquième école, la plus contestable, ne pouvant pas être contrôlée faute de
locaux permanents, puis du fait d’une procédure de cession accélérée par le contrôle en cours.
Les programmes de formation multiplient les cursus : année préparatoire, année
complémentaire d’approfondissement ou de recherche, formation continue. Les frais d’étude sont
élevés, de l’ordre de 7 000 à 8 000 € par année de formation, avec des frais annexes sans que l’on
puisse s’assurer d’une bonne information du public. Les cliniques ostéopathiques destinées, au sein
des écoles, à recevoir des patients le font dans des conditions plus ou moins satisfaisantes avec des
recrutements qui n’assurent pas un volume de patients suffisant pour former valablement les
étudiants. Les stages auprès des ostéopathes installés en ville sont peu utilisés et insuffisamment
encadrés.
Face à ces constats, et alors même que la loi oblige à réformer les textes de 2007 du fait de
l’augmentation des heures de formation désormais portées à 3 520 heures, la mission recommande
une profonde révision des textes applicables.
Il s’agit tout d’abord de mettre un terme à la dérive de la procédure d’agrément. Celle-ci
doit être très vite réformée avec de nouvelles règles destinées à asseoir son autorité. La composition
de la commission doit être revue avec un président n’appartenant pas à l’administration
gestionnaire ; des rapporteurs et des moyens de secrétariat adaptés doivent pouvoir être mobilisés.
Des critères substantiels d’agrément doivent être définis en s’inspirant des dispositions en
vigueur pour les écoles d’auxiliaires médicaux, telles qu’elles figurent à l’article R. 4383-2 du code
de la santé publique et dans l’arrêté ministériel du 31 juillet 2009.
Dans cette perspective, la qualification et la recevabilité des titres des enseignants et
tuteurs doivent être revues à la hausse. La qualité de la formation à la pratique ostéopathique doit
être plus exigeante, tant en qualité qu’en quantité.
Ensuite, dès lors que la loi n° 2009-879 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients,
à la santé et aux territoires (HPST) de juillet 2009 a porté la durée minimale des études de
formation à l’ostéopathie (et à la chiropraxie) à 3 520 heures, soit 860 heures de plus que le
minimum requis actuel, cette modification du volume horaire global doit être l’occasion de revoir
la formation des jeunes ostéopathes.
Sur cette question importante, la mise en place par la loi d’un objectif de formation à
hauteur de 3 520 heures perturbe considérablement l’équilibre précaire qui s’était instauré entre les
différentes parties prenantes. L’illusion, selon laquelle cette « manœuvre » conduirait à interdire
désormais aux professionnels de santé d’acquérir le titre d’ostéopathe, en augmentant de manière
dissuasive la durée de formation qu’ils devraient suivre, doit être dissipée. Une telle ambition ne
serait légitime que si les pouvoirs publics avaient la capacité de définir un corpus délimitant, avec
des critères admis par la communauté scientifique, un contenu de l’ostéopathie entièrement
différent des techniques de thérapie manuelle enseignées dans les UFR de médecine et d’assumer
clairement l’avènement d’une véritable médecine parallèle ou alternative.
En l’absence de choix de ce type, la voie conforme aux intérêts des malades conduit à
retenir des principes simples qui visent à consolider les connaissances de base plutôt qu’à renforcer
la formation à l’ostéopathie dont on a précédemment souligné les limites, en particulier sur le plan
de la formation pratique.
Dans ces conditions et après avoir entendu l’ensemble des parties prenantes, la mission
propose, pour la sécurité des usagers et pour la qualité de la formation des jeunes futurs
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ostéopathes, d’augmenter à due concurrence les heures de formation consacrées aux sciences
fondamentales et à la biologie qui passeraient alors de 1 435 heures à 2 295 heures.
Enfin, la mise à l’étude d’un véritable référentiel de formation viendrait couronner une
réforme destinée à maintenir l’avenir même de l’ostéopathie qui, en tant que technique, on pourrait
dire de marque, jouit d’un réel engouement du public mais dont tout concourt à gâcher l’image.
Mais il ne faut pas sous-estimer la difficulté de la tâche en raison des incertitudes et des
divergences sur la nature même de l’ostéopathie et de sa pratique.
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Sommaire
SYNTHESE ……………………………………………………………………………………………………………………….. 3
LE DISPOSITIF DE FORMATION A L’OSTEOPATHIE ………………………………………………….. 9
INTRODUCTION ………………………………………………………………………………………………………………….. 9
1. UN CONTEXTE AMBIGU SOURCE DE PROCESSUS ALEATOIRES…………………………………………….. 12
1.1. Un contexte incertain…………………………………………………………………………………………….. 12
1.1.1. Le statut ambigu et conflictuel de l’ostéopathie………………………………………………….. 12
1.1.1.1. La spécificité de l’ordre juridique français applicable aux professionnels de santé ……… 12
1.1.1.2. Des difficultés et des conflits difficilement surmontables ………………………………………… 13
1.1.2. L’absence de consensus sur la pratique ostéopathique a des conséquences négatives 14
1.1.2.1. Les vicissitudes de la réglementation relative aux actes…………………………………………… 14
1.1.2.2. Un corpus de formation insuffisant ………………………………………………………………………. 16
1.2. Une procédure d’agrément contestable et aujourd’hui décrédibilisée …………………………. 17
1.2.1. Un dispositif poreux face à des ambitions multiples et d’inégale qualité ……………….. 17
1.2.1.1. Une offre de formation qui explose ………………………………………………………………………. 17
1.2.1.2. Un cadre réglementaire imprécis et insuffisamment contraignant……………………………… 17
1.2.2. Une procédure d’agrément mal organisée, insuffisamment précise et de faible qualité
juridique ………………………………………………………………………………………………………………… 20
1.2.2.1. Une procédure faussement contraignante ………………………………………………………………. 20
1.2.2.2. L’absence de doctrine sur les formalités substantielles ……………………………………………. 21
1.2.3. Une commission nationale ne disposant ni des moyens ni des compétences
nécessaires ……………………………………………………………………………………………………………… 21
1.2.3.1. Des moyens limités en regard des missions……………………………………………………………. 21
1.2.3.2. Des compétences mal mobilisées …………………………………………………………………………. 22
1.2.3.3. Un travail fragilisé par l’abondance des contentieux……………………………………………….. 23
2. LA SYNTHESE DES CONTROLES EFFECTUES SOULIGNE LA DISPARITE DE QUALITE DES
FORMATIONS……………………………………………………………………………………………………………………. 24
2.1. Des disparités facilitées par l’imprécision des textes…………………………………………………. 25
2.1.1. L’imprécision dans la fixation de la capacité des écoles ……………………………………… 25
2.1.2. La nécessaire transparence des conditions financières ………………………………………… 26
2.1.3. Beaucoup d’enseignants sont d’anciens élèves des écoles où ils enseignent, mais
l’adossement à la recherche est encore inexistant ………………………………………………………… 28
2.1.4. La démarche qualité en quête de pertinence ………………………………………………………. 29
2.2. Les points de contrôle pédagogique mettent en relief l’absence de référentiel précis …….. 30
2.2.1. Des textes aux ambitions limitées …………………………………………………………………….. 30
2.2.2. Des enseignements fondamentaux globalement cohérents mais non harmonisés entre
les écoles ……………………………………………………………………………………………………………….. 30
2.2.3. En matière d’enseignements proprement ostéopathiques, la quantité ne saurait
suppléer à la qualité…………………………………………………………………………………………………. 32
2.2.4. La difficulté d’organiser des pratiques cliniques suffisantes et de qualité………………. 34
3. LA REVISION GLOBALE DU DISPOSITIF DE FORMATION EST INDISPENSABLE…………………………. 37
3.1. La réforme rapide de la procédure d’agrément est une exigence ………………………………… 37
3.1.1. Aménager la composition et améliorer le fonctionnement de la commission nationale
d’agrément ……………………………………………………………………………………………………………… 37
3.1.2. Définir des critères substantiels d’agrément……………………………………………………….. 38
3.1.3. La régulation des flux de formation ne peut venir que de la profession …………………. 39
3.2. Développer les exigences pédagogiques…………………………………………………………………… 39
3.2.1. En élaborant le référentiel de formation…………………………………………………………….. 39
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3.2.2. En renforçant l’enseignement en biologie et en physiopathologie…………………………. 40
3.3. Poursuivre les contrôles des écoles grâce aux services déconcentrés ………………………….. 41
3.4. Des recommandations connexes non superflues………………………………………………………… 41
CONCLUSION……………………………………………………………………………………………………………………. 44
PRINCIPALES RECOMMANDATIONS DE LA MISSION ……………………………………………… 45
LETTRE DE MISSION…………………………………………………………………………………………………….. 47
LISTE DES PERSONNES AUDITIONNEES…………………………………………………………………….. 49
ANNEXE 1 : EXTRAITS DU CODE DE PROCEDURE PENALE …………………………………….. 55
ANNEXE 2 : AUTRES TEXTES……………………………………………………………………………………….. 57
ANNEXE 3 : PRESENTATION DU DIU DE MEDECINE MANUELLE – OSTEOPATHIE
DE STRASBOURG…………………………………………………………………………………………………………… 59
SIGLES UTILISES …………………………………………………………………………………………………………… 61
PIECES JOINTES ……………………………………………………………………………………………………………. 63
PIECE JOINTE N°1 : TABLE DE CONTROLE D’UN ETABLISSEMENT AGREE DE
FORMATION A L’OSTEOPATHIE…………………………………………………………………………………. 65
PIECE JOINTE N°2 : TABLEAU DE SUIVI PEDAGOGIQUE…………………………………………. 75
PIECE JOINTE N°3 : BILAN DE SCOLARITE ……………………………………………………………….. 85
PIECE JOINTE N°4 : TABLEAU DE MESURE ET DE SUIVI DE LA PRATIQUE
CLINIQUE……………………………………………………………………………………………………………………….. 89
PIECE JOINTE N°5 : TABLEAU D’ANALYSE BUDGETAIRE SOMMAIRE………………….. 93
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