CONVENTION FIF PL
Mercredi 20 juin 2018
Palais de la Porte Dorée
293, avenue Daumesnil
Paris 12e
« LE FIF PL FACE AUX DÉFIS DE LA RÉFORME
DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE »
ANTICIPER, S’ADAPTER ET SE FAIRE ENTENDRE
Le FIF PL se devait d’analyser la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, alors
en discussion au Parlement. 25 ans d’expérience lui donnaient l’expertise pour le faire.
Le FIF PL fêtait ses 25 ans. La convention qui s’est tenue
avant l’été a été l’occasion de mesurer le chemin par-
couru depuis que l’initiative de l’Union nationale des pro-
fessions libérales a été « adoubée » par l’arrêté
ministériel du 17 mars 1993, publié au Journal officiel
du 25 mars 1993. Il s’agissait non seulement d’offrir une
formation continue de qualité aux professionnels libé-
raux, mais également d’instituer une forme de mutuali-
sation entre les différentes professions libérales, quelle
que soit leur importance numérique. Cette mutualisation
a permis à tous d’accéder à des actions de formation
que certains n’auraient pu s’offrir. En 2013, les instances
dirigeantes du FIF PL décidaient de l’amplifier et de
mettre en place des fonds spécifiques mutualisés. Ces
fonds permettent d’accompagner et de soutenir les
parcours professionnels ; ils financent des bilans de
compétence, des formations de longue durée, des
démarches de validation des acquis de l’expérience,
voire des actions de reconversion. Dans l’intérêt du
secteur libéral tout entier, ces fonds financent des aides
à l’installation, à la création ou à la reprise d’entreprise
en partenariat avec les offices régionaux, d’information,
de formations et de formalités des entreprises libérales
(ORIFF-PL).
En 25 ans, le nombre de dossiers traités est passé de
31 000 à 119 000 et le nombre de stagiaires est passé
de 39 000 à 159 000.
Adaptation ou bouleversement du
paysage de la formation continue ?
C’est donc à la fois quantitativement et qualitativement
(voir aussi article ci-contre) que le FIF PL a évolué en 25
ans. Il est en perpétuel mouvement. Comme l’a dit en
ouverture de la Convention son président, Philippe
Denry, « Nous nous adaptons et nous migrons vers des pra-
tiques correspondant aux besoins de nos clients. Quant à la
digitalisation des pratiques et à l’exigence d’efficience, elles
nous poussent aujourd’hui à une migration technologique ».
Le FIF PL doit également tenir compte de son environ-
nement législatif et réglementaire. Il se trouve que
sa dernière Convention se tenait au moment où le
Parlement débattait de la loi relative à la formation
professionnelle. Le FIF PL se devait d’en faire l’analyse
pour ses membres et d’anticiper sa concrétisation pour
défendre les intérêts du secteur libéral. D’où l’intitulé de
cette journée, ponctuée d’une intervention d’un journa-
liste au fait des dossiers, Christophe Barbier, conseiller
éditorial et éditorialiste au journal L’Express, et d’une
table-ronde.
Ouvrant les débats, Christophe Barbier a mis en avant
les principales caractéristiques de la loi pour la liberté de
choisir son avenir professionnel qui, pour le journaliste,
comporte trois lois en une et concerne la formation pro-
fessionnelle, l’apprentissage et l’assurance chômage.
« Cette loi mélange à la fois une logique de moindre coût
pour la collectivité et une logique de performance accrue »,
estime-t-il. Elle signe, selon lui, l’irruption de la logique
de l’entreprise privée dans le domaine public. « Il ne s’agit
plus d’aider le système à fonctionner, poursuit-il, mais de
changer le système lui-même ». De le révolutionner.
Le texte s’inscrit à la suite de la réforme du Code du
travail qui veut « donner au système économique plus de
souplesse, en espérant en tirer un gain ». Christophe
Barbier plante le décor : « Désormais, chaque minute de
formation doit être consacrée à la raison d’être de l’individu
dans son entreprise ou dans son métier, quitte à ce que cette
formation lui permette d’en changer. Il s’agit de se concentrer
sur la performance de l’individu plutôt que sur son épanouis-
sement personnel, en lui permettant de s’adapter en per-
manence dans un contexte de changements constants. »
Cette optique a de nombreuses conséquences. La
formation n’est plus conçue comme un catalogue
d’activités, « mais comme une banque d’épreuves », ce qui
modifiera le travail des formateurs. Quant au passage
d’un compte personnel de formation en heures à un
compte personnel de formation en euros, il peut
conduire le consommateur de formation à modifier sa
pratique. L’éditorialiste de L’Express parle de « responsa-
bilisation » à laquelle participe la numérisation qui
permet au consommateur de s’inscrire à une formation
sans intermédiaire.
Le circuit même de la formation est changé. « La volonté
sous-jacente du Gouvernement est de faire en sorte que
l’argent de la formation n’aille plus vers des organismes
« amis », adhérents ou permanents de tel ou tel syndicat »,
affirme le journaliste. La cotisation professionnelle est
collectée par les URSAFF ; les organismes paritaires
collecteurs agréés (OPCA) sont écartés de cette collecte.
Les fonds sont envoyés à la Caisse des dépôts et consi-
gnations.
Une seule agence nationale, France Compétences,
réunissant les représentants de l’État, des régions et
des partenaires sociaux, aura en charge la régulation de
la qualité et le coût des formations et la certification des
organismes formateurs.
Une nouvelle architecture financière,
une nouvelle gouvernance
« Nous sommes impactés par cette loi, en ce que nous
sommes invités par les tutelles à entrer dans une démarche
de qualité, via DataDock, puis par la mise en place de la
certification », estime Philippe Denry, le président du
FIF PL, lors du débat qui suivit cette présentation. De
même, comme le relève Jean-Philippe Cépède, directeur
juridique de France Info, la réforme met en place une
nouvelle architecture financière et une nouvelle gouver-
nance. « La réforme propose de réunir les cotisations des
entreprises à la formation professionnelle et à l’apprentis-
sage en une contribution unique… L’ambition est de trans-
former les organismes collecteurs en opérateurs au service
de la compétence au sein des entreprises… » S’agissant des
professions libérales, la loi prévoit que la Caisse des
dépôts se charge du CPF. France compétences recevra
également une partie de la contribution des profession-
nels. Une application mobile permettra aux salariés de
choisir, d’évaluer et de payer la formation.
Pour sa part, le président de l’Union nationale des
professions libérales, Michel Chassang, se montre assez
circonspect. « Nous sommes face à une reconfiguration du
paysage de la formation professionnelle dans le cadre d’une
forme d’étatisation qui pose question en terme de dialogue
social», estimait Michel Chassang. Quant à Philippe
Gaertner, président d’Actalians, il soulignait la nécessité
de « répondre à des objectifs de proximité ».
Alain Druelles, chef de projet sur les réformes de la
formation et de l’apprentissage à la Délégation générale
à l’emploi et à la formation professionnelle, s’est em-
ployé à « déminer » le terrain et à répondre aux craintes.
« Notre objectif, dit-il, est de gagner en souplesse, en sim-
plicité et en efficacité. L’objectif est de partir de l’entreprise,
les structures ayant une vocation d’accompagnement. Nous
souhaitons apporter davantage de lisibilité, ce qui explique
la volonté de monétiser le CPF. » La nouvelle gouvernance
permettra, selon lui, de disposer d’une vision globale,
notamment en matière de financement. En réponse à
ceux qui s’inquiètent des transferts de fonds qui pour-
raient se faire au détriment de la formation sur le cœur
de métier des indépendants, Alain Druelles répond que
le fait de miser sur un outil unique, tourné vers l’individu,
implique « une forme de mutualisation ». Ce à quoi Michel
Chassang rétorque que la formation peut répondre à des
besoins collectifs au niveau de la branche ou de l’entre-
prise. Quant à la monétisation du CPF, elle risque, ob-
serve-t-il, « de pénaliser les formations les plus coûteuses ».
Une forme d’étatisation
Jean-Philippe Cépède se demande, quant à lui, quel est
l’intérêt de l’employeur dans les projets individuels
choisis par les salariés.
La réforme impacte, on l’a vu, les OPCA. « L’apprentissage
et le plan de développement des compétences des entre-
prises de moins de 50 salariés sont les deux éléments que
France compétences déléguera aux opérateurs de compé-
tences. Ce périmètre représente 40 % des apprentis et une
grande majorité des très petites entreprises, explique
Philippe Gaertner. Les opérateurs de compétences doivent
être au service de ces entreprises… Le rôle de l’opérateur
de compétences sera également de proposer à France
compétences des coûts moyens de formation par métier,
ce qui suppose de connaître tant les métiers que les inter-
venants. »
« France compétences est une agence pilotée par l’État »,
constate Michel Chassang, d’où les craintes de voir
réduire l’autonomie des professions libérales. « Je
rappelle que nous sommes des indépendants : nous voulons
conserver la possibilité de faire des choix… Les circuits de
financement nous inquiètent, notamment après l’expérience
du DPC. Rappelons que les entreprises financent également
les cotisations des salariés. Nous devons donc avoir notre
mot à dire sur les cotisations qui nous sont imposées. Nous
devons avoir le choix en termes d’évolution professionnelle.
Nous sommes inquiets à l’idée de céder tout le pouvoir à
l’État, en étant réduits au rôle de figurants. » Les profes-
sions libérales devront donc faire preuve de vigilance.
Une montée en charge
très significative
Les chiffres rappelés en ouverture de la Convention du
FIF PL par son secrétaire général sont éloquents : une
augmentation de 17 % du nombre de stagiaires, des
engagements en hausse de plus de 30 %, des fonds spé-
cifiques en progression de 20 %… assurément l’année
2017 a été celle de tous les dynamismes. Dynamisme
des professionnels qui se sont inscrits aux actions de
formation, dynamisme de l’institution qui accompagne
tous les stagiaires, dynamisme du personnel du FIF PL
qui traite les dossiers, dynamisme du secteur libéral
puisque les actions d’accompagnement à l’installation,
la création ou la reprise d’entreprise ont connu un vif
succès… Seule, la contribution demandée à chaque
professionnel pour la formation professionnelle, a connu
un modeste relèvement. Car les plafonds de prise en
charge ont été eux aussi revus à la hausse et n’y sont
pas pour rien dans le succès que rencontrent les forma-
tions proposées par le FIF PL.
Le total des engagements s’élevait en 2017 à 64,84
millions d’euros dont 56 millions engagés par les
professions et 8,8 millions de fonds spécifiques.
Les spécificités de chaque section
du FIF PL
Les quatre présidents de section, Benoît Marche pour le
Cadre de vie, Laurence Acquaviva-Franceschi pour la
section Juridique, Bernard Duchaussois pour la Santé,
Audrey Yargui pour la section Technique, ont exposé les
traits saillants de 2017.
Les montants engagés par les professions du Cadre
de vie se sont établis à 8,8 millions d’euros, soit une
progression de 20 % par rapport à 2016. Les MOOC
connaissent un réel engouement.
La section Juridique a connu une augmentation de 18,12 %
des engagements, qui s’établissent à 8,1 millions d’eu-
ros. Les sept professions qui composent cette section
utilisent 98 % de sa dotation. Les fonds spécifiques sont
majoritairement consommés par les avocats.
Composée de douze professions, la section Santé four-
nit le plus gros bataillon de stagiaires (57 800, +12,2 %).
Ses engagements se sont montés à 23,5 millions d’eu-
ros, soit une progression de 31,84 %, alors que toutes
les professions n’utilisent pas la totalité de leurs fonds.
Les fonds spécifiques utilisés par les membres des
professions de cette section ont augmenté de 20 %. Il
faut également noter que les médecins ont un fond qui
leur est propre, le FAF-PM, et que plusieurs professions
de la santé ont également accès au DPC (développe-
ment professionnel continu).
La section « Technique » a également ses caractéris-
tiques. Elle est composée d’une trentaine de professions
très diverses, d’où le grand nombre de formations
proposées (750) et enregistre le plus grand contingent
d’auto-entrepreneurs. Ceci explique le recours aux fonds
spécifiques et l’intérêt pour les formations longues, les
validations des acquis de l’expérience, les bilans de com-
pétence, les formations pour créations d’entreprises. La
section a engagé plus de 18,7 millions d’euros, soit une
progression de 33,31 %. 45 592 stagiaires ont été pris
en charge (+ 38,48 %).