ressources
NUMÉRO 22 – JUIN 2020
Pour la formati on, l’École et les a p p rent issa ges scolaires
Enseignement & apprentissage
IL/ELLE VA EN INCLUSION
PARADOXE D’UNE ÉCOLE INCLUSIVE
Formation
Revue interface entre recherche et innovation
Le comité de
rédaction
CHALAK Hanaà
MCF* en didactique des sciences
CHAUVIGNÉ Céline
MCF* en sciences de l’éducation
CHLEQ Elise
Responsable du CRD**
du site d’Angers
CHOQUET Christine
MCF* en didactique
des mathématiques
DECLERCQ Christophe
MCF* en didactique informatique
FRANÇOIS Dora
MCF* en didactique des langues
GAMBOU Alfred
Docteur en sciences de l’éducation
et formateur en philosophie
LACROIX Florence
MCF* en sciences de l’éducation
LAINÉ Aurélie
MCF* en sciences de l’éducation
LEBOUVIER Bruno
MCF* en didactique de l’EPS
PHILIPPE Tanguy
MCF* en sciences du sport et de
l’éducation
PIETTE Patrick
Formateur
SCHMEHL-POSTAï Annette
MCF* en didactique du français
TOULLEC-THÉRY Marie
MCF* en sciences de l’éducation
VÉZIER Anne
MCF* en histoire et Didactique de
l’histoire
VILLERET Olivier
MCF* en physique
* Maître de conférences
** Centre de ressources documentaires
ressources
Po ur la formation, l ’Écol e et le s a p p ren t is s a ges sc ol ai re s
Pour la formation, l’École et les apprentissages scolaires
Editorial
La Revue Ressources de l’Inspé Académie de Nantes, dont la diffusion
avait cessé pendant quelques années, a été relancée en mai 2016. Pen-
dant ces quatre années, certains éléments essentiels de notre ligne édi-
toriale ont été affirmés et quelques changements ont été apportés.
Tout d’abord, les thèmes traités sont choisis car étant au cœur des pré-
occupations des enseignants et conseillers principaux d’éducation. Ain-
si, ce n°22 aborde la question de l’éducation inclusive, qui a notamment
fait l’objet d’une circulaire spécifique à la rentrée 2019 intitulée « Pour
une école inclusive ». Un des prochains numéros, dont l’appel à contri-
bution vient d’être lancé (cf. p. 144 de ce numéro), sera consacré à l’In-
terculturalité dans la formation des enseignants et dans les pratiques
enseignantes, sujet qui suscite à la fois enthousiasme et réserves. De
plus, les articles sont délibérément courts, avec une mise en page aérée
et colorée, en format PDF, en ligne et téléchargeables (par article ou par
numéro), afin d’être très accessibles. En gage de rigueur, ils font tous
l’objet d’une double expertise à l’aveugle. Enfin, la Revue Ressources
a la volonté de mettre en avant la dimension collective des activités de
recherche et de formation. Cette richesse des échanges entre les diffé-
rents acteurs de l’éducation s’illustre dans nos articles et est également
à l’image de notre comité de lecture scientifique et professionnel, ce-
lui-ci regroupant chercheurs, inspecteurs, conseillers départementaux,
enseignants spécialisés, etc. L’objectif, en confrontant ces différents
regards, étant de comprendre, d’analyser les situations, mais aussi de
proposer des pratiques novatrices, faisant ainsi de la revue Ressources
un réel outil de formation à destination d’un large public d’étudiants, de
formateurs, d’institutionnels et de chercheurs.
La structure de chaque numéro a évolué, trois types d’articles la com-
posent désormais : des articles qui traitent de pratiques sous un angle
pragmatique (présentation rigoureuses de projets de recherche, de pra-
tiques de classes innovantes, de dispositifs de formation, etc.), d’autres
qui rendent compte de travaux scientifiques relevant de différentes dis-
ciplines universitaires, et enfin des articles « varia », qui sont des hors
thématique du numéro en question (pour toute contribution d’un article
L’objectif, en confrontant ces différents regards,
étant de comprendre, d’analyser les situations,
mais aussi de proposer des pratiques novatrices,
faisant ainsi de la revue Ressources un réel outil de
formation à destination d’un large public
d’étudiants, de formateurs, d’institutionnels et de
chercheurs
« varia », envoyer à espe-ressources@univ-nantes.fr). La revue propo-
sera à l’avenir deux numéros thématiques par an, ceux recueillant des
articles issus de mémoires réalisés par les étudiants des différents par-
cours de master MEEF seront conservés mais complèteront cette col-
lection en devenant hors-série.
Dans la perspective d’une meilleure reconnaissance scientifique et
professionnelle, il nous semble à ce stade essentiel d’avoir un regard
extérieur sur les choix éditoriaux que nous avons faits, et d’améliorer
encore en conséquence la revue. Pour cela, les prochains numéros se-
ront évalués par des experts au moment de leur sortie. En outre, nous
avons créé une enquête afin de recueillir les avis de notre lectorat. Cette
enquête est disponible ici : https://questionnaires.univ-nantes.fr/index.
php/315781?lang=fr. Nous vous remercions de bien vouloir y répondre et
soyez assurés de la prise en compte de vos retours.
Florence LACROIX
Pour le comité de rédaction
Contributions
Les personnes qui ont contribué
à ce numéro :
BOCCHI Pier
BOURDON Patrice
FEUILLADIEU Sylvianne
LACROIX Florence
LAINÉ Aurélie
LEBOUVIER Bruno
LEFER Gaelle
MERCIER Cendrine
PERRAUD Caroline
PITTIGLIO Serge
Contacts
Pour contacter le comité de
rédaction de la revue Ressources :
inspe-ressources@univ-nantes.fr
Mentions légales
Directeur de publication ;
LEBOUVIER Bruno
Mise en page ; OLIVIER Sandra
Crédits photos : Shutterstock,
Université de Nantes
Sommaire
Éditorial
Il/elle va en inclusion
p. 3
p. 6
p. 10
p. 30
p. 64
p. 40
p. 50
Marie TOULLEC-THÉRY
Maîtresse de conférences, Université de Nantes, CREN EA 2661
Géraldine SUAU
Maîtresse de conférences, Université de Lorraine, LISEC UR 2310
Jean-Michel PEREZ,
Maître de conférences, HDR, Université de Lorraine, LISEC, EA 2310
Anne GOMBERT, Centre Psyclé (EA 3273 – AMU), Inspé Aix Marseille
Karine MILLON-FAURÉ, ADEF – AMU, Inspé Aix Marseille
Godefroy LANSADE
Anthropologue, Université Paul-Valéry Montpellier 3, LIRDEF EA3749
Le concept d’inclusion et ses défis
Liliane PELLETIER,
Maîtresse de conférences, Université de la Réunion, ICARE
Inclusion et égalité d’accès aux savoirs scolaires
A l’épreuve d’une scolarisation partagée
Inclure ou scolariser ?
L’AESH, aide ou écran à l’inclusion scolaire ?
Des praxéologies enseignantes inclusives
Réflexions d’un coordonnateur ULIS au collège
Vous avez dit inclusion ?
Parcours scolaire et scolarisation
Patrice BOURDON
Maître de conférences, Université de Nantes, CREN EA 2661
Aider les élèves dans leurs relations aux autres
Varias article – hors dossier : Conceptualisation, démarche critique et séquence forcée p. 122
Informations de la revue ressources
Pascale CHAMPAGNE, Enseignante spécialisée
Corinne MÉRINI, Chercheuse associée, Laboratoire ACTé, Université Clermont-Auvergne
Serge THOMAZET, Chercheur associé, Laboratoire ACTé, Université Clermont-Auvergne
p. 98
Gaïd ANDRO, Formatrice Inspé, Académie de Nantes
Sylvain DOUSSOT, Formateur Inspé, Académie de Nantes
Juliette HÉRON, Éducation Nationale
Anne VÉZIER, Formatrice Inspé, Académie de Nantes
Serge PITTIGLIO, Formateur Inspé, Académie de Nantes,
Docteur en psychologie clinique, Chercheur associé CREN EA 261
Benoit PIROUX
Enseignant spécialisé et formateur, Inspé Académie de Nantes
Appel à contribution : Interculturalité
Comité de lecture scientifique et professionnel
p. 144
144
145
p. 84
p. 90
p. 74
p. 112
Il/elle va en
inclusion
De l’énonciation d’un paradoxe sémantique aux pratiques de classe de l’école
inclusive.
Les enseignants de classes « ordi-
naires » comme les coordonnateurs
des dispositifs pour l‘inclusion sco-
laire, déclarent fréquemment : « cet
élève va en inclusion ». Comment
peut-on dire d’un élève qu’il « va en
inclusion » dans une classe alors
qu’il y est, de facto, inscrit adminis-
trativement ? Cette expression fait
pourtant consensus sur le
terrain, mais aussi dans les
textes récents du législateur
(par exemple les circulaires
de rentrée 2016, 2017). Elle
véhicule une véritable am-
biguïté (Gardou, 2017, Lan-
sade, 2016), où les termes utilisés
sont ceux d’accueil et de prise en
charge et non de scolarisation.
L’expression « aller en inclusion »
apparaît alors comme incompatible
avec les fondements épistémolo-
giques de l’école inclusive (Gardou,
Ibid. ; Benoit, Gombert & Gardou,
2016) et les cadres réglementaires
publiés dès la loi de 2005. Cette loi
précise, en effet, qu’il s’agit d’« as-
surer l’accès de l’enfant, de l’adoles-
cent […] handicapé aux institutions
ouvertes à l’ensemble de la popula-
tion et son maintien dans un cadre
ordinaire de scolarité ». Plus ré-
cemment, dans la loi d’orientation
de 2013, il est stipulé que « le ser-
vice public d’éducation veille à l’in-
clusion scolaire de tous les enfants,
sans aucune distinction ». La loi n°
2019-791 du 26 juillet 2019, intitulée
« Pour une école de la confiance »
consacre intégralement son cha-
pitre IV à l’École inclusive et crée
un grand service public de l’École
inclusive. Elle promulgue « une sco-
larisation de qualité à tous les élèves
de la maternelle au lycée, qui prenne
mieux en compte leurs singularités et
leurs besoins éducatifs particuliers ».
C’est dans cette loi que, pour la
première fois, le terme d’inclusion
commence à céder la place à ceux
d’inclusif et de scolarisation, sans
toutefois pour le moment modifier
l’expression de terrain « il/elle va
en inclusion ». Or cette expression
laisserait entendre qu’une école à
deux voies subsisterait, l’une dite
« ordinaire » et l’autre dite « spé-
cialisée ». Les élèves reconnus
institutionnellement comme handi-
capés (ERIH) se voyant ainsi inexo-
rablement assignés au dispositif
pour l’inclusion scolaire (ULIS), au
détriment de leur identification à
leur véritable classe d’inclusion, la
classe ordinaire.
Qu’est-ce qui fait alors que le verba-
tim « il va en inclusion » fasse aussi
peu l’objet d’un regard critique ?
La place de l’élève relèverait-elle
d’un dispositif spécialisé et il se
Comment peut-on dire d’un élève
qu’il « va en inclusion » dans une
classe alors qu’il y est, de facto,
inscrit administrativement ?
6 / Ressources n°22 // juin 2020
Il/elle va en inclusion
déplacerait parfois vers le milieu or-
dinaire, sans que ce déplacement ne
soumette ce milieu ordinaire à des
modifications de pratiques ? En effet,
« l’enseignant peut penser en toute
bonne foi que l’inclusion scolaire est
une valeur à défendre et à promouvoir
(registre axiologique), mais il n’a pas
de motif valable de changer ses habi-
tudes dans la mesure où l’histoire de
l’éducation des handicapés est domi-
née par une logique ségrégative (re-
gistre historique traditionnel), et que
la formation et l’information en ma-
tière de handicap restent encore trop
peu répandues, hormis dans le cadre
d’une formation spécialisée (registre
cognitif) » (Zaffran, 2013).
Qu’est-ce qui permettrait de pour-
suivre ce raisonnement d’un manque
de motifs pour changer les manières
de faire ?
La croissance exponentielle des
AESH est un autre indice de cette
difficulté des professeurs à scolari-
ser certains élèves avec un handicap
(Toullec-Théry, 2012, 2013). Elle at-
teste en effet que le principe de com-
pensation (l’aide humaine) prime sur
celui d’accessibilité des situations
la
d’enseignement-apprentissage,
différenciation et l’adaptation péda-
gogique (Ibid.; Gombert, A., Bernat,
V., & Vernay, F., 2017; Suau, Perez,
Tambone & Assude, 2017). Il suffirait
de la présence d’un AESH pour per-
mettre les progrès de l’élève.
Même si des solutions ingénieuses se
mettent localement en œuvre, quels
obstacles rencontreraient donc les
enseignants français à construire
dans leurs pratiques le paradigme in-
clusif ?
L’idée de scolarisation pour tous au
sein de laquelle les parcours sont
ajustés à chacun – qui fonde l’école
inclusive- serait-elle alors de l’ordre
d’une « illusion nécessaire » (Lan-
sade, 2015, 2016) trop loin des repré-
sentations actuelles du terrain ?
C’est ce débat que nous voulons me-
ner au sein de ce numéro, en faisant
converser des résultats
issus de
cadres scientifiques variés (didac-
tique, philosophique, psychologique,
anthropologique), mais aussi issus
d’expériences de terrain, dans les
établissements des premier et se-
cond degrés autant que dans les for-
mations initiales et spécialisées.
L’enjeu de cette production est ainsi
d’identifier des balises pour l’action
afin de passer d’une inclusion en droit
à une scolarisation en actes.
Nous avons organisé ce numéro en
deux parties.
La première rassemble six textes
postérieurs à un symposium natio-
nal organisé lors de la 4e édition du
« Printemps de la Recherche en Édu-
cation » par le Réseau national des
ÉSPÉ, à Paris les 27 et 28 mars 2018,
sous le Haut patronage de Monsieur
le Ministre de l’Éducation Nationale.
La Coordination de ce symposium
a été confié à Marie Toullec-Théry,
de l’Université de Nantes et Thierry
Philippot, de l’Université de Reims
Champagne-Ardennes.
Après l’article issu de la conférence
introductive de L. Pelletier, nous pré-
sentons cinq textes que nous avons
désirés volontairement plus courts
(J-M Pérez, G. Lansade, A. Gombert
et M. Toullec-Théry, G. Suau), articu-
lés à une production engageant plus
fortement le terrain et les pratiques
professionnelles (B. Piroux). Ces ar-
ticles s’ancrent dans des cadres théo-
riques divers. Ces croisements sont
cruciaux pour mieux comprendre ce
qui peut faire encore obstacle dans
l’école inclusive.
Dans une seconde partie, nous avons
ouvert la réflexion à d’autres cher-
cheurs et avons recueilli trois nou-
veaux textes, plus longs, de P. Cham-
pagne & S. Thomazet & C. Mérini, de
P. Bourdon et de S. Pittiglio
Marie TOULLEC-THÉRY
Coordinatrice du numéro
Ressources n°22 // juin 2020 / 7
BIBLIOGRAPHIE
Gardou, C. (2017). Une société inclusive ou le défi de « l’accès à l’existence »,
conférence introductive de l’université d’été « Quelle école pour une société
inclusive ? », INSHEA 10-12 juillet. https://www.canal-u.tv/video/ins_hea/une_
societe_inclusive_ou_le_defi_de_l_acces_a_l_existence_charles_gardou.36313
Benoit, H., Gombert, A., & Gardou, C. (2016). De l’adaptation de l’évaluation
scolaire aux fondements de la société inclusive : capillarité des gestes
professionnels et enjeux sociétaux. La Nouvelle Revue de l’Adaptation Scolaire,
74, 9-25.
Lansade, G. (2015). Entre classe d’inclusion et Unité Localisée pour l’Inclusion
Scolaire en lycée professionnel : suivis ethnographiques d’une scolarisation
adaptée. Recherches en éducation 23, 95-104.
Lansade, G. (2016). « La vision des inclus » Ethnographie d’un dispositif
d’inclusion scolaire à destination d’adolescents et jeunes adultes désignés
handicapés mentaux. Thèse de doctorat en Anthropologie sociale et ethnologie.
Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS). Paris.
Suau, G., Perez, J.-M., Tambone, J., Assude, T., (2017). Accompagnement et
accessibilité didactique : quels obstacles ? Revue Suisse de Pédagogie Spécialisée,
2, 30-36.
Gombert, A., Bernat, V., & Vernay, F. (2017). Vers une formalisation des pratiques
inclusives d’adaptation de l’enseignement : étude de cas pour un élève avec
autisme. Carrefours de L’Education, 43. 11-25.
Toullec-Théry, M. (2013). Mises en œuvre parfois paradoxales dans l’action
conjointe enseignant-AVS-élève handicapé. Deux études de cas à l’école
primaire. In T. Assude et J.-M. Pérez (Eds.) Pratiques inclusives et savoirs
scolaires. (p.125-142). Nancy : Presses Universitaires de Nancy.
Toullec-Théry, M. (2012). L’AVS, un moyen de compensation des conséquences
du handicap ou d’accessibilité des situations d’apprentissage ? Eduquer-Former,
44, 43-69. http://eduquer-former.icp.fr/ojs/index.php/ef/article/view/22/18
Zaffran, J. (2013). La règle et la norme ou comment dépasser l’hiatus de
l’inclusion scolaire. In Perez, J.-M. & Assude, T. (Éds.), Pratiques inclusives et
savoirs scolaires, paradoxes, contradictions et perspectives, (pp. 15-27). Nancy :
PUN.
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