Introduction :
« Si on veut résoudre le problème du chômage en France, il faut s’attaquer à l’amélioration des compétences avant toute politique
macroéconomique » estime Patrick Artus1, chef économiste chez Natixis. Les experts ne sont pas les seuls à mettre les compétences au
cœur de l’emploi : aujourd’hui, seulement 16% des employeurs, tous secteurs confondus, accordent au diplôme une place primordiale dans
le cadre de leurs recrutements. Une majorité d’entre eux (59%) lui donnent une place secondaire, pour valoriser davantage les
compétences comportementales ou l’expérience des candidats2.
Mais qu’entend-on par « compétences » ? Celles-ci ont-elles véritablement relégué le diplôme, la qualification et le CV au second rang ?
Pourquoi sont-elles devenues l’une des clés de l’employabilité ? Comment les identifier et les développer pour qu’elles facilitent les
parcours professionnels et les transitions entre métiers?
Caractérisant une transformation du marché du travail qui engage candidats et recruteurs bien au-delà de la seule approche « métier », les
compétences sont désormais considérées comme un indicateur de la capacité d’un individu à évoluer vers un poste, qu’il soit proche ou
très différent des fonctions précédemment occupées.
C’est pourquoi Pôle emploi place les compétences au cœur de sa stratégie d’accompagnement des demandeurs d’emploi et des entreprises
qui recrutent, pour permettre aux uns de construire des trajectoires professionnelles adaptées aux besoins des seconds.
1 Le Monde – 27 novembre 2018
2 « Diplômes, compétences techniques ou comportementales : quelles sont les principales attentes des entreprises ? », Pôle emploi, mars 2018 Le Monde – 27 novembre 2018
Pôle emploi | 3
I/ Les compétences : une nouvelle approche du marché du travail
La compétence désigne la capacité à exercer une activité dans une situation professionnelle donnée, en mobilisant trois types de ressources :
• les savoirs (connaissances théoriques et techniques acquises par l’enseignement) ;
• les savoir-faire (connaissances pratiques, mise en œuvre des savoirs acquis) ;
• les savoir-être professionnels (manières d’agir et d’interagir dans un contexte professionnel).
→ Face aux transformations du marché du travail, la nécessité d’identifier les compétences
Le marché du travail se transforme en profondeur, en lien avec les transitions numérique et écologique notamment, et les besoins des entreprises
évoluent. De nouveaux métiers se créent (data scientist, ingénieur cloud, happiness officer, etc.) pendant que d’autres se transforment
(hydrobiologiste, sylviculteur) ou disparaissent.
De plus, les parcours professionnels deviennent de moins en moins linéaires : plus d’un demandeur d’emploi sur trois retrouve aujourd’hui un
emploi différent du métier qu’il exerçait avant son inscription à Pôle emploi. D’autre part, certaines entreprises rencontrent des difficultés à
recruter, sur certains métiers en tension ou dans certains secteurs. 44% des projets de recrutement sont même anticipés comme difficiles par les
employeurs3. Par ailleurs, près de 8 millions de postes seront à pourvoir d’ici 2022, dont environ 6 millions sont liés à des départs à la retraite4.
Face à ces transformations, la nécessité de se démarquer de la seule logique « métier » devient impérative, pour protéger les parcours
professionnels, ouvrir de nouveaux horizons aux actifs et permettre aux employeurs d’élargir leur champ de recrutement.
Dans ce contexte, les demandeurs d’emploi sont de plus en plus amenés à identifier et valoriser leurs compétences tandis que les entreprises
leur accordent une place de plus en plus importante parmi leurs critères de recrutement.
→ L’expérience comme base d’acquisition des compétences
Les expériences passées d’un individu lui permettent d’acquérir ou de renforcer une compétence qui peut alors servir dans un autre
contexte professionnel et ouvrir des possibilités de reconversion. Les compétences acquises deviennent transférables ou transversales (voir
plus bas) et peuvent ainsi s’appliquer à d’autres métiers, plus ou moins éloignés des expériences précédentes.
Pour les demandeurs d’emploi, c’est l’opportunité d’ouvrir leur horizon professionnel et d’aller au-delà des postes occupés ou des diplômes.
Pour les entreprises, c’est le moyen de recruter au-delà
de la formation ou du métier d’origine. C’est reconnaitre,
chez le candidat, une capacité à mobiliser des savoirs,
des savoir-faire et des savoir-être correspondant au
besoin de recrutement.
Aujourd’hui, 6 employeurs sur 10 estiment par exemple
que les compétences comportementales ou « soft
skills » sont plus importantes que les compétences
techniques5 issues d’une qualification-métier.
3 « Enquête Besoins en Main d’œuvre 2018 », Pôle emploi / Credoc, avril 2018
4 « Les métiers en 2022 », France Stratégie / DARES, avril 2015
5 « Diplômes, compétences techniques ou comportementales : quelles sont les principales attentes des entreprises ? », Pôle emploi, mars 2018
Pôle emploi | 4
Les compétences sont donc un levier majeur pour un meilleur rapprochement entre l’offre et la demande d’emploi, une source d’opportunités
pour les demandeurs d’emploi comme pour les entreprises, et elles favorisent la mobilité professionnelle dans le cadre de transitions choisies.
La capacité à s’organiser, à s’adapter, l’autonomie, le sens des responsabilités et la capacité à travailler en équipe, en particulier, sont cités par au
moins 90% des recruteurs et constituent un socle de compétences de base très largement attendues.
→ Les compétences : des passerelles entre différents métiers
Les compétences transférables et transversales, clés de mobilité :
• Les compétences transférables sont des compétences attachées à une situation professionnelle donnée mais qui peuvent être mises en
œuvre dans un autre contexte professionnel. Par exemple : technique de lecture d’un plan ou compétences en analyse financière.
• Les compétences transversales sont les compétences « génériques » qui peuvent être mobilisées dans diverses situations professionnelles et
qui s’appuient sur des savoirs de base indépendants d’un contexte professionnel particulier (maîtrise d’une langue, de l’écriture ou du calcul,
connaissances de premier niveau en bureautique, etc.) ou correspondent à des aptitudes comportementales, organisationnelles ou cognitives
communes à plusieurs situations professionnelles (sens de l’organisation, gestion de la relation client, capacité à travailler en équipe, etc.).
Quelques exemples de transferts effectifs de compétences :
Métier d’origine
Métier de destination
Compétences transférées
Fleuriste
Chargé(e) de relations Grands comptes
Principes de la relation client / Techniques de
vente / Sens de la communication
Animateur(trice) de centre de loisirs
Conseiller(ère) commercial(e) / Téléconseiller
(ère)
Outils bureautiques / Sens de la
communication / Gestion du stress
Agent de voyages
Agent général d’assurances
Assistant(e) maternel(le)
Opérateur(trice)contrôle qualité
Hôte(sse) d’accueil/Standardiste
Vendeur(deuse) Spécialisé(e)
Techniques commerciales / Principes de la
relation client
Rigueur / Outils bureautiques / Sens de
l’organisation
Accueillir une clientèle / Renseigner un client
/ Sens de la communication
Chargé(e) de mission RH
Agent immobilier
Rigueur / Autonomie / Outils bureautiques
Plongeur(geuse) en restauration
Aide à domicile
Autonomie / Règles d’hygiène / Entretenir
des locaux / Règles et consignes de sécurité
II/ Un pilier de l’offre de services de Pôle emploi
Pour permettre aux demandeurs d’emploi d’exploiter pleinement leurs compétences et d’envisager plus de débouchés professionnels, Pôle
emploi a placé celles-ci au cœur de l’accompagnement proposé par ses conseillers.
→ Une étape incontournable : l’identification et la valorisation des compétences des demandeurs d’emploi
Sur la base de l’analyse de 4 millions d’offres d’emploi, Pôle emploi a actualisé son référentiel des métiers, ajoutant de nouvelles compétences
et un référentiel de 14 savoir-être professionnels pour répondre aux évolutions des métiers disponibles sur le marché de l’emploi et permettre aux
demandeurs d’emploi de mieux valoriser leur profil.
Pôle emploi | 5
Ce procédé permet concrètement d’élargir le champ des offres d’emploi auxquelles un demandeur d’emploi peut postuler et, pour les
entreprises, d’étendre leur sélection de candidats :
• Ainsi, les entreprises qui déposent une offre sur pole-emploi.fr peuvent aujourd’hui préciser les compétences recherchées, ce qui élargit
automatiquement la recherche de candidats à d’autres profils. Les 4 300 conseillers entreprise de Pôle emploi peuvent aussi aider les
recruteurs à saisir leur offre et définir un profil de compétences pour le métier recherché (savoir-être professionnels et compétences
transférables).
• D’autre part, les demandeurs d’emploi disposent désormais, dans leur espace personnel, d’un « Profil de compétences » où ils peuvent
renseigner l’ensemble des compétences acquises grâce à leurs expériences passées. Ils peuvent aussi s’appuyer sur des conseillers spécialistes
du conseil en évolution professionnelle, qui les informeront sur les métiers qui recrutent, les aideront à identifier leurs compétences et les
orienteront si nécessaire vers une formation.
FOCUS…
L’opération #VersUnMétier
Pour répondre aux besoins de recrutement des entreprises des secteurs en tension, Pôle emploi a lancé avec l’appui du ministère du
Travail un plan d’action national, orienté vers la détection et la valorisation des compétences. Ainsi, de septembre à décembre 2018,
l’établissement a programmé 12 221 actions (information sur les formations et les métiers, recrutement, etc.) dans l’ensemble de son
réseau d’agences sous le label «#VersUnMétier ».
Ont figuré au programme des ateliers, job datings ou visites d’entreprise mobilisant des employeurs et des demandeurs d’emploi
pour faire découvrir concrètement ces métiers, promouvoir les formations permettant d’y accéder ou initier des entretiens
d’embauche.
→ Des techniques de recrutement orientées vers la détection des compétences
Face à la problématique de la détection des compétences, Pôle emploi a conçu plusieurs dispositifs de recrutement innovants permettant de
révéler celles-ci :
• La plus emblématique est la Méthode de Recrutement par Simulation (MRS) qui permet de repérer la capacité d’une personne à occuper un
poste, en dehors de toute expérience ou prérequis, par la détection d’un potentiel de compétences. Conçue par Pôle emploi en 1995, cette
méthode ne cesse d’évoluer pour suivre l’évolution des métiers et des besoins en recrutement. En 2018, 88 832 candidats ont été évalués via
la MRS.
• Quant à l’immersion professionnelle, elle se déroule en entreprise et permet au demandeur d’emploi de découvrir un métier ou un secteur
d’activité, de confirmer son projet professionnel dans les conditions réelles du poste et d’accéder à l’emploi. Elle permet également au
recruteur, notamment pour des métiers rencontrant des difficultés de recrutement, de valoriser un métier et un secteur et de s’assurer des
aptitudes du candidat. L’immersion professionnelle dure au maximum un mois et vise notamment à favoriser l’insertion de personnes
éloignées de l’emploi.
• D’autres méthodes utilisées par Pôle emploi, tels les escape games et la réalité virtuelle, permettent de révéler les compétences.
FOCUS…
Les étapes du recrutement par simulation
Le processus se déroule en 5 étapes après que le conseiller a analysé le besoin en recrutement de l’entreprise et déterminé les
compétences nécessaires pour occuper l’emploi :
1. Analyse sur site du poste proposé pour définir avec l’entreprise les habilités requises
2. Création ou adaptation des exercices permettant de mesurer les habilités des candidats au regard du poste proposé
3. Présentation de l’entreprise et de la MRS lors d’une session d’information collective
4. Evaluation des candidats au moyen d’une mise en situation
5. Présentation des candidats qui ont réussi leur évaluation au recruteur pour un entretien de motivation
Pôle emploi | 6
→ La formation, outil privilégié du développement des compétences
Dans le cadre de la mobilité professionnelle, la formation permet de renforcer ou développer certaines compétences et de maximiser les
opportunités d’emploi.
Non seulement les conseillers de Pôle emploi orientent les demandeurs d’emploi vers des formations qui favoriseront leur employabilité, mais
l’établissement propose par ailleurs des applis et services digitaux tels que « La Bonne formation », « Ma formation » ou « Anotéa », qui les
aident à trouver la formation correspondant à leur besoin.
Les formations individuelles de type MOOC permettent ainsi de se former en continu et de monter en compétences. Certaines de ces formations
en ligne débouchent même sur la validation ou la certification d’aptitudes.
Dans le secteur du numérique, qui connaît d’importantes difficultés de recrutement (80 000 emplois non pourvus faute de profils adaptés6),
Pôle emploi se mobilise en partenariat avec La Grande Ecole du Numérique pour proposer à des jeunes de moins de 26 ans et à des
demandeurs d’emploi des parcours longs de formation opérationnelle (800 heures). Cela permet aux bénéficiaires d’atteindre un niveau de
qualification « technicien supérieur » (Bac +2) et de s’orienter vers des métiers comme la maintenance des matériels, l’exploitation, la
sécurité, le développement web, etc.
Par ailleurs, des dispositifs tels que l’AFPR (Action de Formation Préalable au Recrutement) et la POE (Préparation Opérationnelle à l’Emploi)
permettent de se préparer, par la formation, à une prise de poste et d’acquérir les compétences requises pour occuper durablement cet emploi.
Enfin, depuis septembre 2018, Pôle emploi propose aux demandeurs d’emploi un accompagnement intensif leur permettant de renforcer leurs
savoir-être professionnels. Nommé « Valoriser son image pro », ce dispositif a été créé grâce au concours de nombreux publics dont les
demandeurs d’emploi eux-mêmes. Il leur permet de connaître les attentes des employeurs, identifier/renforcer leurs acquis et rendre leur
candidature plus efficace. Au socle commun de ce dispositif s’ajoutent des modules optionnels, pour développer une dimension particulière du
savoir-être professionnel.
FOCUS…
Le Plan d’Investissement dans les Compétences
Pôle emploi est pleinement engagé dans le déploiement du Plan d’Investissement dans les Compétences, lancé en 2018 par le
Gouvernement et piloté par le ministère du Travail.
Le PIC répond aux ambitions suivantes :
• former un million de demandeurs d’emploi peu ou pas qualifiés et un million de jeunes éloignés du marché du travail ;
• répondre aux besoins des métiers en tension dans une économie en croissance ;
• contribuer à la transformation des compétences en lien avec la transition écologique et la transition numérique.
Il s’articule autour de trois axes d’intervention :
• mieux analyser les besoins en compétences pour mieux orienter les politiques de formation et les demandeurs d’emploi ;
• financer de nouveaux parcours de formation et d’accompagnement vers l’emploi durable ;
• innover et transformer par l’expérimentation, dans le cadre d’appels à projets.
Quelques données-clé :
• un plan d’action sur 5 ans ;
• 15 milliards d’euros de budget ;
• la formation qualifiante d’un million de jeunes non-diplômés et d’un million de demandeurs d’emploi.
« À l’heure de la reprise de la croissance, le Plan d’investissement dans les compétences traduit à la fois la volonté de miser sur les
qualifications, de démontrer que tout n’est pas joué à la fin de la scolarité, de ne laisser personne au bord de la route et de transformer le
système de formation pour soutenir la compétitivité des entreprises » – ministère du Travail.
6 Conseil d’orientation pour l’emploi, 2017
Pôle emploi | 7